Et si les attaques du 7 octobre n’étaient que le début de quelque chose de plus dévastateur pour Israël ? Aluf Benn, rédacteur en chef de Haaretz, un journal israélien de gauche et favorable à la paix avec les Palestiniens, va jusqu’à évoquer l’ « autodestruction d’Israël » du fait de la cécité de son Premier ministre, Benyamin Netanyahou.
Dans une longue analyse parue dans la revue Foreign Affairs le 7 février, le journaliste qualifie les attaques du Hamas de tournant qui mènera soit à « la paix et une coexistence digne avec les Palestiniens », soit au « début d’un âge sombre dans l’histoire d’Israël ».
L’analyste explique que dans sa réponse à l’attaque du 7 octobre, le gouvernement israélien n’a pas pris en compte les causes profondes de la colère des Palestiniens.
Soit tout le contraire des premiers dirigeants d’Israël, qui savaient que les Palestiniens n’oublieraient jamais la Nakba de 1948. Il cite l’ancien chef de l’armée israélienne, Moshe Dayan, qui a appelé, lors de l’enterrement d’un jeune tué en 1956, à ne pas blâmer les meurtriers, car « nous avons transformé les terres et les villages où eux et leurs pères habitaient en notre domaine ».
Netanyahou est un opposant de la première heure aux accords d’Oslo en 1993 et a utilisé son très long mandat de Premier ministre à empêcher l’établissement d’un État palestinien, quitte à encourager le Hamas.
« Quiconque s’oppose à un État palestinien doit soutenir l’envoi de fonds à Gaza, car le maintien de la séparation entre l’Autorité palestinienne en Cisjordanie et le Hamas à Gaza empêchera la création d’un État palestinien », a-t-il déclaré publiquement en 2019.
Israël va vers l’autodestruction : la mise en garde d’un analyste israélien
La promesse faite par Netanyahou au peuple israélien est de pouvoir « prospérer sans la paix ». Une promesse partiellement tenue puisque l’économie israélienne a effectivement prospéré et, mis à part quelques actions sporadiques du Hamas, les Israéliens n’ont pas été sérieusement inquiétés ces dernières années. Mieux, ils ont pu normaliser leurs relations avec d’autres pays arabes, comme le Maroc et les Émirats arabes unis. Tout cela, sans rien céder aux Palestiniens.
Puis il y a eu l’attaque surprise du 7 octobre dernier qui constitue la « pire calamité de l’histoire d’Israël » et qui a rappelé à tout le monde que « les Palestiniens ont maintenu leur cause en vie » malgré tout.
Le plus inquiétant, c’est que le gouvernement israélien ne semble pas prêt de le comprendre. Il ne semble pas avoir réfléchi à « la haine à l’origine de l’attaque, ni aux politiques susceptibles d’en empêcher une autre », écrit Aluf Benn et, ajoute-t-il, quel que sera le sort de Netanyahou lui-même, « il est peu probable qu’Israël ait une conversation sérieuse sur un règlement avec les Palestiniens ».
Pour Israël, l’attaque du Hamas est survenue à un moment où il est le plus divisé de son histoire, fracturé par les efforts de Netanyahou à saper la démocratie et à instaurer une « autocratie religieuse et nationaliste ».
L’auteur note que, après quatre mois de guerre, Israël suit toujours le chemin de Netanyahu et son identité est désormais « moins libérale et égalitaire, plus ethnonationaliste et militariste ».
La poursuite de l’occupation, l’expansion des colonies, le siège de Gaza et le déni des droits des Palestiniens « n’apporteront pas au pays une sécurité durable » et conduiront à « davantage de catastrophes », prévient l’auteur de l’article. Il reste aux Israéliens une seule voie pour espérer vivre en paix : tendre la main aux Palestiniens pour une coexistence respectueuse.
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