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La France veut faciliter les expulsions des sans-papiers

La France veut faciliter les expulsions des sans-papiers

Comment reconduire dans leur pays les étrangers, dont les Algériens, visés par une décision d’expulsion ? C’est un casse-tête qui turlupine le gouvernement français soucieux d’envoyer un message de fermeté pour éviter que grossissent les légions de sans-papiers.

Combien sont-ils ? Difficile à dire. En 2010, avant la crise des réfugiés, ils étaient évalués à 400.000. Aujourd’hui, personne n’ose avancer le moindre chiffre. Parmi eux, des milliers d’Algériens. Pour la plupart, ce sont des personnes ayant perdu le droit de séjour après être arrivés régulièrement en France. Certains sont arrivés avec un visa touristique mais animés du désir de s’établir en France. D’autres ont achevé leurs études et veulent obtenir un changement de statut. Il y a aussi ceux qui sont arrivés clandestinement via l’Espagne ou au terme d’un voyage plus long via la Turquie et l’Europe de l’Est.

Phénomène de plus en plus grandissant, il y a des femmes dans chacune des catégories. Parfois des mères de famille. Pour éviter l’expulsion, le mieux est d’éviter les contrôles d’identité qui se sont multipliés sous le régime de l’état d’urgence. En la matière, il faut savoir ruser. Et les ruses peuvent se révéler étonnantes.

Autour de 90.000 décisions d’expulsion sont prononcées chaque année par la justice et l’administration françaises. Seulement, 25% sont exécutées. La reconduite s’effectue après la « rétention » (détention administrative) des personnes visées. Cette rétention, passée de 30 à 45 jours sous le mandat de Nicolas Sarkozy, permet aux autorités françaises de vérifier l’identité des « expulsables » qui cachent leurs papiers et d’obtenir le laisser-passer consulaire pour effectuer l’expulsion. S’il n’est pas obtenu pendant ce délai, le « clandestin » est remis en liberté.

Pour éviter cette issue, Paris envisage d’allonger à 90 jours la durée de la rétention. Une disposition contenue dans son projet de loi sur l’immigration intitulé « Pour un droit d’asile garanti et une immigration maîtrisée », dévoilé ce jeudi. « À titre exceptionnel » le juge pourrait ensuite ordonner une prolongation « de quinze jours », dans le cas où l’étranger ferait « obstruction » à son éloignement.

Dans les faits, beaucoup de pays refusent de délivrer le laisser-passer nécessaire à l’expulsion. Il s’agit notamment de pays africains. L’Algérie est considérée comme un pays plutôt coopératif en la matière. Pour échapper à l’expulsion, certains « sans-papiers » demandent l’asile politique.

En 2016, les Algériens ont été 2.050 à effectuer cette démarche sur une demande globale de 85.726 personnes. Une hausse algérienne de 4,8% par rapport à 2015. Un grand nombre de demandeurs algériens sont des membres des forces de sécurité déclarant fuir les groupes terroristes pourtant en voie d’extinction.

D’autres invoquent des conflits privés, avec des créanciers par exemple, pour éviter de revenir au pays, selon le rapport officiel de l’Office français pour la protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Il y a aussi des femmes qui ont déclaré avoir fui les violences conjugales ou le risque de représailles à la suite d’une relation sexuelle hors mariage. Parmi les demandeurs figurent également des homosexuels, des personnes qui craignent des sanctions après avoir dénoncé la corruption, des chrétiens ou des membres de « mouvements de défense des Kabyles ».

Pour faciliter les discussions avec les pays qui rechignent à accueillir les « expulsés », le président Emmanuel Macron a nommé un ambassadeur chargé des migrations. « Un des blocages fondamentaux, c’est la délivrance des laissez-passer consulaires », confirme un expert.

« Nous reconduisons beaucoup trop peu », avait affirmé début septembre M. Macron, en promettant des dispositions dans le projet de loi « pour permettre d’améliorer les retours vers les pays d’origine » comme le font « nos voisins, en particulier l’Allemagne ».

Au 1er semestre, l’Allemagne a expulsé 12.545 personnes. C’est autant que la France en 2016, alors que 91.000 personnes en situation irrégulière avaient été interpellées.

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