L’Algérie se prépare à introduire la chirurgie robotique pour moderniser sa médecine et faciliter davantage l’accès aux malades. Pour réussir ce projet, la création d’une académie de chirurgie moderne pour la formation des chirurgiens est indispensable, soutient le Dr Khelifa Ait Saïd, chirurgien urologue algérien installé en France, spécialisé dans la chirurgie robotique, la cancérologie urologique et la transplantation d’organes.
Exerçant comme praticien en Normandie, il a participé le 22 juin dernier à la première greffe rénale avec cœlioscopie au CHU de Bab el Oued. Cette intervention a soulevé une autre problématique à savoir l’introduction de la chirurgie robotique qui est une technique chirurgicale, plus élaborée et assistée par un robot, généralement commandée par un chirurgien via une console. Elle permet de réaliser des interventions très précises, souvent peu invasives, en offrant des avantages significatifs par rapport à la chirurgie traditionnelle. Le Dr Ai Said précise que :
• Le robot ne prend pas de décisions seul : c’est le chirurgien qui contrôle les bras du robot.
• Le système le plus connu est le robot Da Vinci, utilisé dans des domaines comme l’urologie, la gynécologie, la chirurgie digestive, ou thoracique.
• Le chirurgien est assis à une console, regardant une image 3D haute définition, et utilise des manettes et pédales pour guider les instruments miniaturisés
• Actuellement, plusieurs robots sont disponibles sur le marché : Hugo, Ottava, Versius, Sentence/Luna, Thoumai , Edge Medical …
• D’abord utilisé pour la prostatectomie, il s’étend ensuite à la gynécologie, la chirurgie digestive, thoracique, etc.
Cette technique a de nombreux avantages d’abord pour les patients, puis pour le personnel soignant et tout le pays, indique le spécialiste dans un rapport intitulé : « Comment réussir l’implantation de la chirurgie robotique en Algérie : impact, enjeux et limites ».
Pour le patient, explique Dr Aït Saïd, elle permet une « réhabilitation plus rapide et par conséquent la diminution de la durée et du coût de d’hospitalisation. La chirurgie robotique réduit aussi les risques et les complications, elle est moins douloureuse et moins invasive et les cicatrices sont plus discrètes ».
Elle offre également de « meilleurs résultats pour la préservation des fonctions de continence et de sexualité (s’agissant de l’urologie), permet une amélioration de la survie globale et sans récidive des cancers ainsi que la préservation du capital néphrogénétique pour les cancers du rein », poursuit le Dr Ait Said.
Ses avantages pour les chirurgiens sont une « grande maniabilité des instruments chirurgicaux, une vision augmentée du champ opératoire et une totale précision des gestes sans aucun tremblement éventuel », explique-t-il. Toutes ces caractéristiques permettent un apprentissage plus rapide et facilité par rapport à la cœlioscopie conventionnelle », expose-t-il.
Ce que l’Algérie doit faire pour bénéficier des avantages de la chirurgie robotique
La chirurgie robotique permettra par exemple à l’Algérie de réaliser des opérations chirurgicales à distance entre les grands hôpitaux du nord et les établissements hospitaliers de l’intérieur et du sud du pays. Cela va réduire la pression sur les grands CHU du nord du pays, et faciliter l’accès à des soins de qualité aux habitants du grand sud qui sont souvent contraints de faire de longs déplacements au nord du pays pour se soigner.
Elle offrira à l’Algérie une « image de prestige et de développement et permet la réduction des coûts liés à la santé (moins de dialyse, moins de séjour hospitalier, moins de radiothérapie…) », soutient le Dr Ait Saïd.
Néanmoins, l’introduction de cette technique fait souvent face à des obstacles, que cite le chirurgien algérien. Il y a d’abord son coût mais cet inconvénient reste toutefois relatif car les avantages qu’elle offre amortissent considérablement son prix.
« Les systèmes robotiques nécessitent du temps et du personnel formé et expérimenté ».
L’autre obstacle, c’est la « résistance au changement culturel ». « Les nouveaux programmes de chirurgie robotique s’accompagnent de nouvelles techniques, de nouveaux processus et de nouvelles façons de faire les choses. Dans certains hôpitaux, il peut se révéler difficile de présenter des arguments convaincants en faveur du changement », explique-t-il.
Pour la réussite de la chirurgie robotique en Algérie, Le Dr Khelifa Ait Saïd propose « l’institution d’un forfait de remboursement spécial pour la chirurgie robotique, la formation de chirurgiens compétents pour piloter ces robots, la création de la société algérienne de chirurgie robotique et l’accompagnement des premières procédures ».
« Je propose la création d’une Académie de formation de chirurgie moderne pour former les chirurgiens algériens notamment les urologues, les gynécologues les chirurgiens digestifs, les chirurgiens thoraciques, les ORl, et les chirurgiens cardiaques. Cette Académie est indispensable pour le succès de l’introduction de la robotique dans la chirurgie en Algérie », explique à TSA le Dr Aït Saïd. « Je suis prêt à former en Algérie et transmettre mon savoir-faire aux chirurgiens algériens », affirme-t-il.
Le spécialiste préconise également le transfert de la technologie, l’installation progressive des robots en choisissant les plus fiables, de choisir des centres de référence avec une expérience en coelioscopie et de donner la préférence à la formation progressive des équipes au lieu de la formation de masse.