Politique

Le général Toufik au banc des accusés

Son nom revient régulièrement dans l’actualité politique depuis quelques semaines. L’ancien patron du DRS, l’ex-général-major, Mohamed Mediene, dit « Toufik », officiellement mis à la retraite en septembre 2015, continue de faire parler de lui.

Ce mardi, il a eu droit à une nouvelle salve inédite du général de corps d’armée, Ahmed Gaid Salah. « J’ai déjà évoqué, lors de mon intervention du 30 mars 2019, les réunions suspectes qui se tiennent dans l’ombre pour conspirer autour des revendications du peuple et afin d’entraver les solutions de l’Armée Nationale Populaire et les propositions de sortie de crise », a accusé le chef d’état-major dans son allocution prononcée à Ouargla.

« Toutefois, ces parties, à leur tête l’ex-chef du Département du renseignement et de la sécurité, ont tenté, en vain, de nier leur présence dans ces réunions, et d’induire en erreur l’opinion publique, et ce, en dépit de l’existence de preuves irréfutables sur ces faits abjects », a encore asséné le vice-ministre de la défense.

Un dernier avertissement

« Nous avons affirmé, ce jour là, que nous allions dévoiler la vérité, et les voici continuer à s’agiter contre la volonté du peuple et œuvrer à attiser la situation, en approchant des parties suspectes, et inciter à entraver les solutions de sortie de crise » a ajouté Gaid Salah. Avant de brandir la menace : « Je lance à cette personne un dernier avertissement, et dans le cas où il persiste dans ses agissements, des mesures légales fermes seront prises à son encontre ».

On ignore les raisons exactes de cette nouvelle offensive du chef de l’armée contre l’ancien patron du DRS. Mais, dans les propos de Gaid, Toufik est accusé pêle-mêle de « conspiration » autour des revendications du peuple, d’entraver les solutions de l’armée, de « mensonge », puisque niant sa présence dans des réunions « suspectes », coupable de « faits abjects » et de proximité avec des « parties suspectes ». Pire : Gaid Salah suggère en demi-mot que les « dérapages » de la marche de vendredi dernier portent la griffe de ces cercles occultes liés à l’ex-patron du DRS.

Il faut dire que Gaid Salah n’est pas le seul à mettre au banc des accusés l’ancien patron des services de renseignements, soupçonné d’avoir réactivé ses réseaux dans l’optique de peser sur la succession à Bouteflika et de parasiter la dynamique populaire.

Saadani, Sadi, Zeroual…

« Je n’ai pas vu des revendications dans la rue appelant au départ de l’État profond. Ils veulent le départ de Bouteflika… Le président partira. Il faut demander la disparition de l’État profond qui agite les ficelles dans le noir, qui a des relations avec l’étranger, qui a fait mal au peuple algérien, qui a enterré des gens vivants et qui a évincé des présidents. L’ex-DRS doit disparaître et laisser les citoyens tranquilles. Qu’il cesse de faire mal aux Algériens », avait accusé le 24 mars dernier, Amar Saadani, dans un entretien exclusif à TSA.

Deux jours plus tard, c’est au tour de Said Sadi de l’épingler. «L a principale force extraconstitutionnelle est la police politique. Aucun oligarque, aucun apparatchik ne peut violer durablement la loi s’il n’est pas couvert ou encouragé par les services parallèles, bras politique séculier de l’armée. On assiste à plusieurs manœuvres où les anciens réseaux du DRS, fidèles au général Mediene, se reconnectent aux structures actives du renseignement pour préparer une OPA sur le mouvement à travers le parachutage de Liamine Zeroual dont un poster géant a été accroché ce vendredi (22 mars) sur un bâtiment de la Place Audin (Alger). Fausse piste ou ballon d’essai, il est trop tôt pour dire si l’ancien chef d’État se laissera reprendre au jeu des appels obliques des services », a écrit le fondateur du RCD sur son compte Facebook.

Début avril, c’est l’ancien président, Liamine Zeroual de dévoiler la tenue d’une réunion avec l’ancien patron du DRS que celui-ci avait pourtant démentie après l’annonce de Gaid Salah le 30 mars. L’ancien président avait révélé qu’une proposition, inspirée par Said Bouteflika, lui a été faite par Mohamed Mediene pour conduire une transition.

« J’ai fait part à mon interlocuteur de toute ma confiance dans la maturité des millions de manifestants et de la nécessité de ne pas entraver la marche du peuple, redevenu maître de son destin », a écrit Zeroual dans une déclaration à la presse. « Aujourd’hui, et devant la gravité de la situation, les tenants du pouvoir doivent faire preuve de raison et de discernement et s’élever à la hauteur de notre peuple pour éviter tout dérapage aux conséquences incalculables pour le pays et laisser les Algériens s’exprimer librement et imposer la volonté de notre grand peuple », a préconisé Zeroual.

En le chargeant ce mardi, Ahmed Gaid Salah détient-il de nouveaux éléments qui confondent celui que tout le monde accuse, à tort ou à raison, d’avoir contribué à conduire le pays dans la situation dans laquelle il se trouve aujourd’hui ? Si tel est le cas, pourquoi ne procède-t-il pas à son arrestation puisqu’il est accusé d’agissements « suspects » et de comploter contre l’armée et l’État ? Faute de transparence et en attendant une hypothétique réaction de l’ex-général-major, les Algériens sont conviés à l’étalage de la guerre clanique au moment où le pays est en quête de perspectives démocratiques.

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