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Le pouvoir ne veut pas assumer seul les décisions impopulaires

Le pouvoir ne veut pas assumer seul les décisions impopulaires

Le premier ministre Abdelmadjid Tebboune attend toujours le feu vert du président Abdelaziz Bouteflika pour lancer « un dialogue national » avec les partis, les syndicats, les organisations professionnelles et la société civile.

Des contours imprécis

« L’instruction relative à l’ouverture des canaux de dialogue et de concertation entre les composantes du tissu national est fin prête et a été transmise, il y a peu au président de la République pour qu’il nous donne l’imprimatur. Dès qu’il nous donne l’imprimatur, elle va être diffusée et on va commencer à contacter tout le monde. Cela concerne tous les partis représentés à l’APN et au Sénat, toutes les organisations de masse, nous allons même contacter le syndicat des journalistes. Tout le monde sera présent pour donner son point de vue », a déclaré M. Tebboune, lors de sa visite d’inspection à Alger, samedi 15 juillet.

Le Premier ministre n’a donné aucune date pour le début de ce dialogue, ni précisé la forme qu’il prendra. S’agira-t-il d’organiser plusieurs rounds de dialogue séparés ? Ou de rassembler tous les participants dans une conférence nationale ? Rien n’est encore clair. « C’est une conférence ouverte. On donnera à tout le monde l’occasion de s’exprimer et de nous donner un rapport final deux mois après. Et sur la base de ce rapport qu’on engagera les spécialistes », s’est contenté de dire Abdelmadjid Tebboune.

Fin juin 2017, lors de la présentation du Plan d’action du gouvernement au Parlement, M. Tebboune a déclaré que le gouvernement entend ouvrir des canaux de concertation avec « les composantes du tissu national, qu’elles soient politiques, syndicales, académiques ou associatives ». La finalité principale ? « Expliquer la démarche de Exécutif et obtenir la confiance et l’adhésion de toutes les catégories du peuple », a-t-il dit.

Le dialogue, qui pourrait ressembler à une immense « Tripartite », sera principalement axé sur les questions économiques et sociales. Politiquement, il n’existe aucun enjeu dans l’immédiat, le pouvoir ayant toujours refusé d’évoquer la légitimité des institutions et des personnes déjà élues.

Les conseils du FMI

En fait, Abdelmadjid Tebboune, qui entend éviter les erreurs de son prédécesseur Abdelmalek Sellal, cherche surtout à obtenir un « consensus » pour des décisions qui risquent d’être impopulaires ou mal comprises, issues en partie des conseils du Fonds Monétaire International (FMI).

Depuis au moins cinq ans, le FMI recommande à l’Algérie de remplacer les subventions généralisées des produits de première nécessité par un système ciblé de transferts sociaux vers les catégories les plus défavorisées pour « une meilleure efficacité de la dépense publique » et surtout pour réduire la facture : 18 milliards de dollars sont consacrés annuellement aux transferts sociaux par l’État. Après avoir longtemps hésité, le pouvoir, confronté à des soucis financiers importants, semble désormais prêt à suivre les conseils du FMI. Reste à savoir comment et quand le fera-t-il.

Lors de la présentation de son plan d’action, le Premier ministre, qui n’a pas attendu les conclusions du « dialogue national », avait annoncé l’installation prochaine d’une commission nationale consultative pour « l’examen du dossier du soutien destiné aux catégories les plus démunies ». Cette commission va élaborer des textes de loi. Seront-ils proposés aux participants au « dialogue national » pour débat ? Ou vont-ils atterrir directement au Parlement après adoption du Conseil des ministres ?

À moins que « le rapport » évoqué par M. Tebboune, qui serait l’émanation du « dialogue nationale », va servir de « base de travail » pour la commission. On n’en sait rien à l’heure actuelle. Une chose est sûre : la tâche ne sera pas aisée.

Dossier lourd

En effet, les observateurs s’interrogent déjà sur la capacité du gouvernement à pouvoir appliquer ce plan de réduction de subventions dans un climat social aussi tendu et aussi incertain. L’Exécutif vient, par exemple, d’ajourner la discussion sur le problématique projet de loi relative à la santé. Le débat sur la révision du Code du travail, autre texte controversé, n’est pas encore ouvert.

Par ailleurs, la durée de vie du gouvernement Tebboune est trop courte. Dès le début de l’année prochaine, c’est-à-dire dans moins de six mois, l’Exécutif va commencer à préparer la présidentielle de 2019. L’Algérie entrera alors en campagne électorale, une période peu propice pour annoncer ou mener des réformes sensibles.

Or, la révision du système de subventions est un dossier lourd qui nécessite beaucoup de temps et d’énergie et qui a des conséquences sociales imprévisibles. À partir de là, on peut penser que « le dialogue national » n’est qu’une nouvelle manœuvre pour gagner du temps.

Une partie de la classe politique est méfiante à l’égard d’une telle démarche surtout que le processus de concertation autour de la révision constitutionnelle de 2015 a montré tous ses limites.

Les propositions faites par les partis et les personnalités n’ont pas été retenues dans le projet final de la nouvelle Constitution de février 2016.

Pourquoi alors le gouvernement prendrait-il en compte les propositions et les idées des participants au « dialogue national » sur la nouvelle politique sociale de l’État ? Il reste que la remise en cause des acquis sociaux ne passera pas facilement auprès de l’opinion nationale. Dialogue ou pas, l’exercice de persuasion sera compliqué pour le gouvernement Tebboune.

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