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Les Algériens disent non à une normalisation par la force

Les Algériens disent non à une normalisation par la force

Quand la force de la volonté est plus forte que celle de la répression. C’est cette démonstration qui a été faite aujourd’hui à Alger où le 14e vendredi du mouvement populaire n’est pas tombé dans les flets tendus sur son parcours par le nouveau pouvoir.

Barrages en amont pour empêcher les arrivées à la capitale, arrestations préventives de nombreux manifestants dès les premières heures de la matinée, confiscation de banderoles et de drapeaux, déploiement impressionnant de la police, barricades à la Grande Poste : rien n’a été laissé au hasard pour faire avorter un nouvel acte de lutte contre laquelle le régime ne cache plus son irritation.

Le général Gaid Salah ne supporte plus d’entendre l’appel à tous de dégager et qui vise les symboles du régime et ne l’épargne plus. Celui qui avait promis de répondre à toutes les revendications du peuple juge maintenant que le départ du système est une demande « non objective et irraisonnable, voire malveillante et dangereuse ». Dès l’instant où cela devient dangereux, il faut donc y mettre un terme. Et comment sinon par l’insinuation d’abord, puis ensuite par une exhibition de muscles.

Dans son dernier discours, il a insinué que les manifestations étaient infiltrées par des courants qui peuvent les faire dévier et appelé à leur « encadrement ». Sauf que les figures ayant émergé sont harcelées et victimes de tentatives de diabolisation par les médias acquis. Les tonnes de boue qui se déversent sur les Bouchachi, Tabou, Benbitour, les jeunes du et même les figures locales du mouvement grossissent avec l’évidente volonté de les ensevelir. Même Ahmed Taleb Ibrahimi n’a pas échappé aux attaques des fameuses « mouches électronique » pour avoir osé suggérer un plan de sortie de crise sans l’élection du 4 juillet.

À défaut de leur reddition, il faut décourager les manifestants, sinon leur faire peur. C’est cela qui a été essayé mardi face aux étudiants et qui a été reproduit aujourd’hui à une échelle plus importante. Comme les étudiants qui ont franchi les murs de policiers, les manifestants ont aussi pu franchir tous les obstacles pour se retrouver massivement. Dans un cas comme dans l’autre, les écueils ont pu être évités sans chercher l’affrontement avec les forces de l’ordre. L’image de cette étudiante criant sa rage face aux policiers restera comme le symbole de cette détermination.

Il y a dans cette détermination affichée ce vendredi quelque chose qui rappelle la « marche du sel » lancée par Gandhi en 1930 pour la réappropriation d’un bien vital confisqué. Au fil des kilomètres parcourus, la détermination s’est accrue et le bien a été reconquis. Le poing fermé sur le sel est devenu le symbole de cette plus grande manifestation de non-violence.

Les Algériens veulent aujourd’hui reconquérir leur dignité perdue et fermer le poing sur les richesses du pays qu’un « gang » s’est mis à piller sans aucune retenue. Dans cette foi légitime de justice, le général Gaid Salah a puisé des raisons de lancer une lutte contre la corruption et de s’offrir une popularité. Mais il est plutôt crédité d’insincérité, soupçonné de régler des comptes et de neutraliser ceux qui par leur notoriété et leur poids peuvent contrarier ses projets.

En tout cas, son désir de normalisation par la force ne fait plus mystère. Que l’on interdise une conférence d’Ahmed Benbitour, que l’on interdise un Iftar collectif en présence de Bouchachi sont des signes qui ne trompent personne. Mais face au mur de la peur brisé et à la parole libérée, ces armes produisent des tirs à blanc. Jusqu’où la tentation de la répression peut-elle aller ? C’est peut-être une voie qu’il faut carrément éviter face à la détermination qui crient « dawla madaniya » (Etat civil) ou encore « al-djazaïr macci casirna » (l’Algérie n’est pas une caserne).

Les manifestants ne veulent plus cesser de se battre pour un changement dont les conditions n’ont jamais été aussi bien réunies. Après la chute de Bouteflika et de son « gang », ils sont en voie d’obtenir l’annulation de la présidentielle du 4 Juillet qui n’a séduit aucun candidat sérieux. Une autre issue va subséquemment se dessiner.

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