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Les trois jours les plus longs

Les trois jours les plus longs

Où le président Bouteflika fêtera-t-il demain ses 82 ans ? Parti dimanche à Genève pour y « effectuer ses contrôles médicaux périodiques », son retour n’était pas annoncé jusqu’à ce matin.

La présidence qui avait inhabituellement informé par avance sur ce séjour avait bien précisé qu’il serait « court ». Il est déjà plus long que les précédents voyages helvétiques ou français pour ces contrôles périodiques. Ces examens ont été rendus nécessaires par les séquelles de l’AVC qui l’avait frappé en 2013.

Selon la presse helvétique, le chef de l’Etat séjournait bien mercredi dans les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). C’est un établissement situé au cœur de la ville qui dispose notamment d’une « division privée » qui offre aux VIP « toutes les conditions de sécurité et de discrétion souhaitées, selon le site internet des HUG.

A deux jours de la fin du délai pour déposer son dossier de candidature au Conseil constitutionnel, son retour est plus que jamais urgent. Il est mis au défi par ses adversaires de se montrer en public et de dire quelques mots en signe de bonne santé.

Entre autres documents exigés par le Conseil constitutionnel figure justement un certificat médical délivré par des « médecins assermentés ». Mais le Conseil, déjà assujetti au chef de l’Etat, n’est pas en mesure de contester la sincérité du document et d’ordonner une contre-expertise. S’il est improbable qu’un praticien suisse délivre le sésame, on ne voit pas quel médecin algérien dans l’entourage de M. Bouteflika refuserait de signer le certificat si son désir de « continuité » ne l’abandonne pas.

Faute de communication, il est très difficile de savoir si le chef de l’Etat, incarné par son cadre, est tenu au courant de la vague contestataire qui ne cesse de grossir. Celle de la semaine dernière a provoqué une rupture de la digue de la peur et a libéré même une expression de la haine.

Le président n’est plus révéré comme le montrent ses portraits détachés, voire parfois piétinés. Le culte de Bouteflika s’est bien estompé. Les manifestants les plus indulgents expriment juste de la compassion pour un vieillard qu’ils jugent « maltraité » et « pris en otage » par des proches qui ont usurpé ses pouvoirs quasi monarchiques sans avoir à rendre compte.

L’histoire n’offre pas d’exemple d’un dirigeant aussi affaibli et qui brigue un nouveau mandat après avoir passé celui en cours sur son lit. Ce désir obsessionnel de se maintenir est en lui-même un signe clinique inquiétant.

En 2014 déjà, sa candidature paraissait surréaliste. On misait alors sur une récupération de ses facultés avec le temps. Manifestement, elles se sont dégradées comme le constatent tous les médecins lors de ses rares apparitions à l’écran. Le président qui promettait en 1999 une Algérie « fière et digne » en donne aujourd’hui une image pitoyable qui blesse profondément les citoyens. Ils se sentent atteints dans leur honneur par toutes ces moqueries qui les ciblent dans les médias du monde.

Les trois jours qui séparent l’Algérie du 3 mars sont décisifs. D’ici là, on évoque des scénarios de substitution, dont un report de l’élection présidentielle et l’organisation d’une conférence de transition.

C’est peut-être une simple coïncidence, mais Bouteflika a rappelé récemment à ses côtés Ramtane Lamamra qui se trouve justement être un grand spécialiste des transitions dans des pays en proie à des troubles politiques. C’est le cœur de ses missions actuelles au sein de l’ONU et de l’UA.

Si malgré tout Bouteflika maintient sa candidature ses courtisans auront de la peine à mener campagne dans un pays remonté contre eux. Leurs menaces et leurs tentatives de créer un climat d’inquiétude ne semblent pas pour l’instant impressionner les contestataires qui défilent sous la bannière du pacifisme.

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