En juillet 2023, le maire de Bézier, Robert Ménard, soupçonnant officiellement un mariage blanc, avait refusé de marier Mustapha, un Algérien sous OQTF, et Eva, une citoyenne française. Près de deux ans après, cette affaire fait encore parler d’elle.

Bien que Mustapha, après le refus humiliant de la célébration de son union avec Eva par la mairie de Bézier, a été rapidement expulsé en Algérie, son couple ne s’est pas disloqué pour autant. Sa fiancée, Eva, lui rend régulièrement visite à Oran, où il vit désormais. Malgré tout ce qui s’est passé, le couple n’a pas perdu espoir d’un mariage en France. 

Les deux tourtereaux prévoient de se marier en Algérie, avant de tenter de revenir chez eux à Béziers, dévoile Mediapart cette semaine. Mais la tâche s’annonce désormais complexe après l’intervention du président français dans le débat.

« Ménard a raison », selon Macron

Le 13 mai dernier, Emmanuel Macron a brisé les espoirs de ce jeune couple franco-algérien. Interpellé par Robert Ménard, lors de l’émission « Les défis de la France », le président français a apporté son soutien au maire de Béziers, pourtant poursuivi en justice pour violation de la loi sur le mariage.

Macron a qualifié le cas de Robert Ménard « d’ubuesque » estimant que c’était « le droit qui était mal fait ». Pour rappel, le maire de Béziers risque toujours 75 000 euros d’amende, cinq ans de prison et de l’inéligibilité pour avoir refusé le franco-algérien.

Mais Macron ne s’arrête pas là. Il estime que Robert Ménard « a raison » et que sa décision de refuser de marier Eva et Mustapha relevait « du bon sens ». 

Interdire le mariage aux étrangers sous OQTF

Le président a même affirmé qu’il « souhaite » que la proposition de loi interdisant le mariage aux OQTF « soit inscrite rapidement à l’Assemblée nationale ». Pour rappel, cette proposition de loi a déjà été adoptée par le Sénat, bien qu’elle l’ait été jugée anticonstitutionnelle.

Les soutiens du couple franco-algérien tombent ainsi l’un après l’autre tandis que la France semble se diriger de pas fermes vers l’interdiction du mariage pour les sans-papiers, un droit actuellement garanti par la Constitution.

Pour Sylvie Pelletier, du collectif Les Amoureux au ban public, citée par Mediapart, « que le président soutienne une loi anticonstitutionnelle est un coup de théâtre et un point de dérapage important ». L’activiste redoute que le prochain droit qu’on enlèvera au sans-papiers soit l’inscription à l’école ?

« Je n’ai pas le bras assez long », déplore la femme de l’Algérien expulsé

La fiancée de l’Algérien expulsé déplore, toujours auprès de Mediapart, le fait qu’elle n’a pas « le bras assez long pour faire des plateaux télé face à un président ». Elle veut dire que « c’est elle la victime (et non Ménard) » et qu’elle subit encore les railleries des gens dans la rue. « Elle n’est pas encore en Algérie celle-là ? », disent-ils.

Eva se rappelle très bien de ce qui s’était passé. Pour elle, elle et son mari ont été attirés dans un « guet-apens » par le maire de Béziers. « On nous a laissé venir, et on nous a humiliés publiquement », confie-t-elle au média français. « J’avais l’impression d’être un criminel », lâche son fiancé depuis Oran.

Pourtant, et contrairement aux informations relayées par plusieurs médias et affirmées par Menard, Retailleau ou encore Macron, bien qu’il soit sans-papiers au moment des faits, Mustapha n’est pas entré en France de manière irrégulière, mais avec un visa qui lui a été délivré en 2016, indique Médiapart.

Des contre-vérités sur l’Algérien expulsé

Ce jeune Algérien expulsé en 2023, n’est pas non un récidiviste, comme le dit régulièrement Robert Ménard. Mustapha a, certes, été condamné pour violence en 2020, et son OQTF n’a rien à voir avec cette affaire.

Selon des attestations consultées par Médiapart, Mustapha séjournait régulièrement en France depuis ses 10 ans, et c’est d’ailleurs en France qu’il a décroché son CAP de matelot en 2020. 

Le jeune Algérien était décrit par son école comme un élève de « bon niveau », « discipliné », « irréprochable ». Actuellement, il est en Algérie où il pêche l’Espadon avec son père.