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Montage automobile : « Il n’y a pas de liste figée »

Montage automobile : « Il n’y a pas de liste figée »

Hassiba Mokraoui est directrice générale du développement industriel et technologique au ministère de l’Industrie et des Mines. Dans cet entretien, elle revient sur le montage automobile en Algérie et les perspectives en matière de sous-traitance.

 Nous assistons ces dernières années au lancement de plusieurs projets dans le secteur automobile, mais la sous-traitance reste le maillon faible de cette industrie. Pourquoi ?

La filière véhicule est naissante chez nous. Les constructeurs ont justement également pour mission de développer le tissu de la sous-traitance. La règle est simple : sans donneur d’ordre, il n’y aura pas de receveur d’ordre.

Il y a quelques années, nous avions seulement la SNVI. Elle avait créé un réseau de sous-traitance. Mais cela ne s’est pas fait de manière importante, ni bien structurée. L’entrée en lice de nouveaux constructeurs automobiles va contribuer à développer cette branche.

L’Algérie n’a-t-elle pas pris en fin de compte le chemin inverse, en se lançant dans l’industrie automobile avant de s’intéresser à la sous-traitance ?

Je ne suis pas d’accord avec ce constat. Je pense que c’est aux constructeurs de faire venir leurs équipementiers pour les accompagner. D’ailleurs, on constate qu’il y a de plus en plus d’entreprises algériennes qui investissent dans la sous-traitance, qui nouent des partenariats avec les étrangers.  Il y a de grands entreprises étrangères qui viennent parce qu’il y a une demande qui s’exprime de la part des constructeurs.

Atteindre un taux de 40 à 60% après cinq ans est-il un objectif réalisable ?

Oui, avec de la volonté. Il faut rappeler que nous ne sommes pas partis de rien en matière de sous-traitance. Des entreprises locales existent. Elles ne sont pas organisées ni très nombreuse, certes, mais il faut les encourager.

Qu’est-ce qu’on produit concrètement comme composants automobiles aujourd’hui ?

On produit beaucoup de choses : câblerie, boîtes à vitesse, sièges, freins…. Vous aurez l’occasion de rencontrer les sous-traitants locaux à l’occasion des journées d’études sur la sous-traitance véhicule qui auront lieu les 5 et 6 mars prochain à l’Aurassi. On veut à travers ce rendez-vous donner la parole aux constructeurs pour expliquer tout le processus d’homologation. Jusqu’à présent, les sous-traitants fabriquaient des pièces de manière artisanale. Maintenant, ils sont obligés de passer par tout le processus industriel pour être homologués et vendre leurs  pièces à l’international.

C’est pour cela qu’on demande aux constructeurs de venir avec leurs équipementiers qui ont déjà des pièces homologuées. Ceci qui nous fera gagner beaucoup de temps. Je vous informe qu’a partir de mercredi, le ministère mettra en ligne  un site dédié à la sous-traitance véhicule www.jtsv.dz. Il ne s’agit pas là d’un site d’information seulement, mais d’une plateforme virtuelle qui mettra en relation les sous-traitants algériens avec des partenaires étrangers.

Les équipementiers automobiles veulent justement du volume et de la visibilité pour s’installer. La multiplication des marques et des intervenants ne risque-t-elle pas de les dissuader ?

Nos constructeurs sont capables de produire plus. Ils veulent produire plus. D’ailleurs, c’est une exigence du cahier des charges : il faut qu’ils exportent. On a accordé des avantages comparatifs qu’il ne faut pas oublier : une énergie peu chère, une ressource humaine qualifiée, une position géostratégique extraordinaire… Le marché algérien est intéressant. Tout ça fait qu’on devient compétitifs.

Qu’en est-il pour le projet de texte relatif à la sous-traitance qui est bloqué depuis l’été ?

En tant qu’Etat, on est là pour réguler, pour encourager les industries naissantes dont les activités de sous-traitance qui bénéficient de plusieurs avantages fiscaux et douaniers. Certes, il y a eu un retard dans la publication du texte, mais il ne s’agit pas d’un blocage. Je peux vous assurer que tout est concrétisé, qu’on est prêt pour la publication de ce texte. C’est une question de jours.

Vous avez accordé des autorisations à plus de 40 opérateurs pour lancer des usines de montage de véhicules. Est-ce que ce n’est pas beaucoup pour le marché algérien ?

A mon niveau, il n’y a pas de liste. Nous travaillions d’après les besoins du marché local et d’après les besoins de l’Etat qui passe avant tout. Les autorisations ne concernent pas les véhicules de tourisme seulement. Il y a les véhicules utilitaires, les motocycles, les tracteurs, les camions… Nous avons énormément de demandes et de dossiers. L’Etat est là pour réguler. On ne veut pas reproduire l’histoire des minoteries.

Vous confirmez qu’il y a seulement cinq concessionnaires retenus pour les véhicules légers ?

Je répète : il n’y a pas de liste figée. Pour nous, il s’agit de dossiers à traiter. Il y a l’avis des administrations concernée mais il n’y a pas de liste. Ce secteur est ouvert. Il n’y a pas de liste fermée.

L’ancien ministre de l’Industrie Bedda Mahdjoub avait dénoncé « une importation déguisée », êtes-vous du même avis ?

Je dirai que c’est le prix à payer pour asseoir une véritable industrie automobile compétitive et réelle. Ou on veut avoir une industrie ou on n’en veut pas. On ne peut pas avoir en une année une véritable industrie automobile. C’est pour ça qu’on donne un délai de trois ans. Importation déguisée ou non, peu importe le nom qu’on donne à cette activité, mais c’est le prix à payer pour avoir notre industrie automobile. Pour attirer les meilleurs constructeurs et avoir une véritable industrie, nous sommes obligés de passer par une telle étape. On ne peut pas faire le bilan maintenant. Il faut attendre 10 ans.

Les concessionnaires sont-ils prêts à suivre votre stratégie ?

Ils ont signé le cahier des charges. Donc ils sont d’accord. ils sont en train de constituer eux-mêmes leur plate-forme comme c’est le cas pour Sovaac, TMC, GMI… Des dizaines de contrats seront signés le 6 mars entre sous-traitants et constructeurs. Il y a même un constructeur qui va signer un avec 1.000 entreprises à l’Ansej.

L’autre prix à payer pour booster l’industrie automobile, c’est aussi l’arrêt de l’importation qui a pénalisé le client et fait flamber le prix du véhicule…

C’est un nouveau chantier que nous avons démarré. Certes, les prix n ont pas vraiment baissé, mais cette baisse viendra progressivement au fur et à mesure qu’il y a de l intégration locale. Au lieu d’ouvrir l’importation, on préfère travailler sur les prix de sortie d’usine.

Comment peut-on maîtriser le prix si la production reste liée dans les trois prochaines années au moins à l’importation des composants des véhicules produits en Algérie ?

Il y a un effort à faire de la part des constructeurs. Il ne faut pas oublier qu’ils ont énormément d’avantages. Il faut qu’ils baissent leurs prix .

Avez-vous envoyé des notifications aux constructeurs autorisés ?

Non. Pas pour tout le monde. A chaque fois qu’un dossier est traité au ministère, on envoie une notification au constructeur pour compléter la procédure et déposer son dossier à l’ANDI avant l’examen au CNI.

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