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Ne jouez pas avec le feu !

Ne jouez pas avec le feu !

TRIBUNE. La nouvelle Algérie peine à trouver sa voix et sa voie. Une impression de déjà vu, déjà vécu, s’insinue dans l’inconscient des Algériens.

La vague du « Hirak » retombée et c’est la résignation qui reprend son cours habituel. Tout comme les vieilles habitudes de gouvernance.

Et voilà que ceux qui avaient annoncé avec frénésie le « grand soir », nous refont, avec une pointe de nostalgie ou de dépit, les éloges de l’Algérie de Bouteflika, finalement pas si « autoritaire » que cela, beaucoup plus clémente envers l’opposition que la « nouvelle ».

Les plus audacieux, ne craignant pas l’indignité, vont même jusqu’à éprouver une forme de compassion envers des oligarques, généraux, anciens ministres et premier-ministres incarcérés,…victimes de simples règlements de compte politiques.

Alors que le pays a frôlé l’hécatombe. Que les « ateliers » des « révolutions colorées » ont saisi l’énorme brèche provoquée par un 5e mandat encouragé par l’ancienne puissance coloniale pour s’y engouffrer méthodiquement, les dirigeants de l’Algérie nouvelle, avec le retour d’une saison exceptionnelle de pluie de « devises », retrouvent les vieux réflexes et habitudes.

L’Algérie du développement politique, économique et social et culturel qui renforce l’indépendance du pays attendra.

Laissons pour le moment les Algériennes et les Algériens s’abreuver des « bonnes intentions » et s’il le faut faisons preuve de générosité sociale pour calmer les esprits impatients.

À écouter les responsables politiques, la « bureaucratie », ce léviathan qu’on ne parvient pas à dompter depuis… 50 ans, est beaucoup trop puissante.

Ce frein « carbone céramique » à l’émergence de l’Algérie, de l’économie de production hors hydrocarbures, de l’intelligence et du travail, sert, en définitive, davantage à justifier une forme d’impuissance qu’à faire prendre conscience d’un « mal » qu’il s’agit de combattre.

Car, s’il était question de cela, quel meilleur remède que d’encourager la formation de contre-pouvoirs politiques, associatives, syndicales ou médiatiques plutôt que de sponsoriser une série de « hauts conseils » comme autant de lieux où se bousculent les courtisans les plus zélés et les vieux relais de l’ancienne « issaba »?

Cette obsession à vouloir se constituer une base sociale, sur le mode caricatural des « organisations de masse » des années 70, s’avérera autant budgétivore que contre-productive faute d’un projet de « développement global ».

C’est dire que la perspective électorale à venir « contraint » le premier concerné, peut-être bien malgré lui, à adouber le tout et son contraire donnant cette impression d’incohérence et de cafouillage.

Il se trouvera bien sûr toujours des experts laudateurs pour louer l’ingéniosité de ceux qui nous gouvernent et se moquer de l’étroitesse d’esprit de ceux qui, par exemple, ont pointé la scène surréaliste d’un président face au représentant d’une ONG qualifiée il y a pas si longtemps d’ennemi de l’Algérie.

Ce dernier fait est révélateur, à lui seul, d’une autorité politique dirigeante ne sachant où placer son curseur dans un monde en profonde mutation et dans lequel l’ « équidistance » est synonyme d’effacement géopolitique.

La volonté affichée, stratégiquement juste, de rejoindre l’organisation des Brics est chaque jour contrariée par l’inaction, l’immobilisme et la très grande « sensibilité » aux oukases occidentaux.

Rejouer avec le feu sera, cette fois, fatal

La diplomatie algérienne, qui renoue avec ses fondamentaux, ceux de Bandung et de la conférence d’Alger de 1973, après une longue période d’hibernation, risque d’être plombée dans son action par une situation interne loin d’être normalisée.

Le « front interne », indispensable pour annihiler toute action extérieure hostile à notre pays, à sa souveraineté et à l’unité de son peuple, reste fragile.

Conçu sur le mode unanime du ralliement inconditionnel plutôt que d’une adhésion libre et responsable qui autorise les divergences de vue sur les objectifs de politique intérieure et sur le mode de gestion des affaires publiques, le « lem echeml » présuppose la mise sous scellé de toute vie politique.

L’acte politique d’opposition, y compris celui s’inscrivant dans un cadre légal et républicain, devient dérangeant.

Cette attitude interroge autant qu’elle trouble. Réduire l’action de l’opposition patriotique par toute une série de lois répressives, dont celle annoncée sur les partis, ne fait-elle pas le jeu des mercenaires, agents actifs de la guerre de 4e génération menée contre l’Algérie ?

Il est encore temps de se raviser pour éviter de reproduire les mêmes impasses. L’ouverture doit se faire en direction des forces patriotiques et non en direction de ceux qui ont ruiné le pays.

Le « lem echeml » s’il emprunte les chemins marécageux de la réhabilitation des cercles compradores néolibéraux et néocoloniaux que le peuple a dégagés un certain 22 février 2019, fera courir au pays un énorme risque.

Rejouer avec le feu sera, cette fois, fatal.

Si l’institution militaire demeure le bouclier protecteur de la Nation, déverrouiller les espaces de libertés et permettre le débat contradictoire notamment au sein des médias publics, ne profitera pas aux extrémistes mais renforcera l’État national et les défenses immunitaires de l’Algérie.

La stabilité du pays, indispensable au développement du pays, suppose la construction d’un espace politique autonome et l’émergence d’une élite politique civile dotée d’un sens élevé de l’État et consciente des intérêts stratégiques de la Nation.

Il appartient aux autorités politiques, à commencer par le premier magistrat du pays, de faire le choix du meilleur et d’éviter la tentation du pire.

*Secrétaire national du FFS à l’analyse et à la stratégie politique


Important : Les tribunes publiées sur TSA ont pour but de permettre aux lecteurs de participer au débat. Elles ne reflètent pas la position de la rédaction de notre média.

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