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Nouvelle aérogare d’Alger : Tahar Allache nous dit tout

Nouvelle aérogare d’Alger : Tahar Allache nous dit tout

TSA
Tahar Allache, PDG de la Société de gestion des services et infrastructures aéroportuaires (SGSIA)

ENTRETIEN. Tahar Allache est président-directeur général de la Société de gestion des services et infrastructures aéroportuaires (SGSIA). Dans cet entretien, il nous parle de la société et dit tout sur la nouvelle aérogare d’Alger dont l’ouverture est prévue pour septembre prochain.

Quel est le taux d’avancement des travaux de la nouvelle aérogare de l’aéroport d’Alger ?

Les travaux ont commencé fin 2014 et devaient durer 40 mois. On est dans les délais. Nous avons presque achevé la totalité des travaux, il ne reste que quelques finitions, nous avons commencé les tests des équipements déjà installés, tels que les tapis à bagages, les ascenseurs, la télésurveillance. Nous avons acquis des équipements électriques pour pouvoir donner à la nouvelle aérogare 12 MVA en matière d’énergie pour tester en puissance, pour faire tout marcher en même temps et voir si les équipements tiennent, s’il n’y a pas insuffisance d’énergie. Ces tests vont durer jusqu’u 31 août, sinon, l’ensemble des équipements sont mis en place.

Il reste l’affichage, on est en train d’installer des écrans, la solution pour l’informatique aéroportuaire et le paramétrage c’est aussi presque terminé. Il nous reste la signalisation, on va commencer à mettre en place des panneaux pour indiquer les différentes zones au niveau de l’aéroport pour orienter les passagers. Pour ce qui est du parking, on finira les travaux d’ici deux mois au maximum.

On peut dire que les travaux du lot 1, soit le bâtiment de 200 000 m², sont terminés à 95%, les autres, soit le parking véhicules et le parking avions, seront achevés dans deux mois. Pour nous, c’est le même projet, parce qu’ils vont ensemble, on ne peut pas avoir une aérogare sans parking véhicules et parking avions. Le viaduc pour les départs, il est terminé à 90%.

Globalement, on est entre 90 et 95%. Les travaux sont presque terminés. La mise en exploitation et l’ouverture au public se feront vers fin septembre, début octobre 2018. Nous avons respecté les délais de réalisation, bien que nous ayons ajouté certains travaux supplémentaires sur des parties qui n’étaient pas prévues.

Pourquoi une nouvelle aérogare pour l’aéroport d’Alger ?

En 2009, et pour avoir une visibilité sur le développement de l’aéroport, nous avons lancé une étude d’un schéma directeur pour le développement de l’aéroport d’Alger. Nous avons lancé un appel d’offres international et nous avons choisi un bureau d’études espagnol qui s’appelle Sener. C’était un plan à court, moyen et long terme. Avec la projection statistique que nous avons faite à l’époque, il s’est avéré que l’actuelle aérogare, le terminal que nous avons actuellement, allait être saturé et il nous fallait une nouvelle aérogare en 2018 pour faire face justement à cette croissance du trafic.

Quel est le coût du projet et sur quels fonds a-t-il été financé ?

Notre société est le maître d’ouvrage, c’est elle qui a financé le projet. Nous avons décidé de financer par nous-mêmes parce que nous avons estimé que nous en sommes capables. C’est tout à fait normal, si nous essayons de créer des richesses, de générer des profits, c’est pour pouvoir les réinvestir pour le développement de l’aéroport.

Nous avons mis 12 milliards de dinars et nous avons fait un emprunt bancaire de 62 milliards de dinars que nous allons rembourser en 20 ans. Le coût est de 74 milliards de dinars, sans compter les intérêts (2%). On plus de cela, les pouvoirs publics nous ont chargés de réaliser une centrale énergétique, un poste transformateur qu’on va faire directement sur nos fonds propres et une base pour les policiers qui vont s’occuper de la nouvelle aérogare, ce qui porte notre part directe à 16 milliards de dinars. Donc nous avons mis 16 milliards cash et nous avons emprunté 62 milliards de dinars.

Le projet a été confié au groupe chinois CSCEC qui devra le livrer clés en main, mais beaucoup de sous-traitants interviennent en fait dans les travaux…

Étant donné que l’emplacement de la nouvelle aérogare a été arrêté dans le schéma directeur précédemment, nous avons fait un autre appel d’offres international pour réaliser les études techniques de la future aérogare. Un groupement de trois bureaux d’études a été choisi (l’Anglais Llywin Davis, l’Espagnol Prointec et l’Algérien Brea). La conception architecturale du projet, c’est le bureau d’études anglais qui l’a faite et l’engineering ce sont les Espagnols avec les Algériens.

Après avoir terminé les études, choisi l’architecture et finalisé l’engineering, nous avons lancé un appel d’offres pour sélectionner une entreprise de réalisation, en entreprise générale parce qu’un projet comme celui-là c’est très complexe, on ne peut pas nous-mêmes nous occuper des différents lots. On a préféré lancer un projet clés en main, en global et forfaitaire. C’est l’entreprise chinoise CSCEC qui a gagné le marché, avec bien sûr des conditions dans le contrat pour les sous-traitants. Nous avons mis des conditions. L’entreprise doit nous présenter trois sous-traitants qui respectent le cahier des prescriptions techniques, pour ne pas avoir du bas de gamme, et nous choisissons suivant d’autres critères qui sont par exemple l’expérience, l’état de santé récent de l’entreprise, son chiffre d’affaires, etc.

En vertu du contrat, notre société n’a pas de relation avec les sous-traitants. Notre relation est exclusivement avec CSCEC. J’ajouterai d’ailleurs que tous les équipements que nous avons choisis sont des équipements de grande marque.

Justement y a-t-il eu des obstacles, des avenants, voire des surcoûts ?

Il faut dire d’abord que le terrain était inconstructible du fait qu’il y avait beaucoup de réseaux qui passaient et la première opération qu’on a faite c’est la déviation de tous les réseaux. La deuxième étape, c’est la réalisation de 3500 pieux de 1.2 mètre de diamètre et 35 mètres de profondeur parce qu’il s’agit d’un sol hétérogène qui ne porte pas bien et qu’il fallait donc consolider pour pouvoir supporter la masse de la nouvelle aérogare. Cette année, on a été un peu freinés par les intempéries, sinon les travaux seraient déjà terminés.

Pour ce qui est des avenants, dans un projet comme celui-là, il y en a toujours, mais ce sont de petits changements. Comme par exemple pour le projet de l’hôtel, il fallait réaliser un rond-point pour faciliter la circulation. Il y a eu aussi des changements pour ce qui est du désenfumage, on a rajouté des choses qui n’étaient pas prévues dans l’appel d’offres, c’est tout à fait normal, l’essentiel est de livrer le projet à temps. Mais il n’y a pas eu de surcoût, on va tomber à peu près sur le même prix, parce qu’on ajoute des choses et on enlève d’autres dans le contrat. Le seul surcoût qu’on pourrait avoir, c’est par rapport à la dévaluation du dinar, on n’y échappera pas, c’est la loi du marché.

Quelle est la capacité de la nouvelle aérogare, ses caractéristiques ?

C’est une aérogare de catégorie A, d’une capacité de dix millions de passagers par an. L’actuelle aérogare est de catégorie B avec une capacité de six millions. La catégorie A, c’est celle qui réserve plus d’espace aux voyageurs. En fonctionnant en catégorie B, la nouvelle aérogare pourra aller jusqu’à 12 millions de passagers.

Elle est constituée d’un bâtiment central avec une jetée dédiée pour les passagers. La surface totale du bâtiment est de 200 000 m², contre 82 000 m² seulement pour l’actuel.

Nous avons un sous-sol de 40 000 m² avec voies mécaniques (accessible pour les voitures) et destiné aux locaux techniques, tels que les centrales de traitement d’air, les groupes électrogènes, les pompes, les déchetteries. L’autre niveau c’est celui des arrivées qui est dédié exclusivement au traitement de bagages. Pour l’actuelle aérogare, les formalités de police et le traitement de bagages se font au même niveau. Nous avons 12 tapis bagages, contre 6 actuellement. Nous avons un niveau intermédiaire, qui est la mezzanine inférieure, dédiée exclusivement pour l’arrivée des passagers de la passerelle vers la jetée.

Le dernier niveau, qui est, lui, destiné aux départs, est constitué de 120 banques d’enregistrement, contre 60 actuellement, avec bien sûr tous les commerces qui vont avec. La jetée est longue de 400 mètres et nous avons 21 passerelles d’embarquement, 54 ascenseurs, dont certains sont panoramiques, avec vitrage, et 34 escaliers mécaniques. Pour le nouveau parking, il est d’une capacité de 4200 à 4500 places qui s’ajouteront aux 2400 places déjà existantes.

Pour résumer, je dirai que c’est la capacité de traitement qui va augmenter, ça veut dire qu’on sera à l’aise jusqu’en 2030, et puis la conception de la nouvelle aérogare est une nouveauté et tous les équipements sont de dernière génération.

Concrètement, ce sera un gain de temps et un confort certain pour le voyageur. En tout cas, je suis persuadé que tous les Algériens en seront fiers. C’est grand, mais c’est facile à utiliser.

Qu’en sera-t-il des contrôles qui, actuellement, sont trop nombreux, de l’avis des passagers…

Ces barrages et ces contrôles ont toujours existé, c’est un dispositif de sécurité qui a été mis en place pour assurer un maximum de sécurité, mais nous sommes en train d’étudier la possibilité de revoir, non pas pour diminuer le niveau de sécurité mais de voir comment assurer la facilité d’accès des passager et assurer la ponctualité des vols, sans porter atteinte à la sécurité que ce soit des passagers, des avions ou des biens de l’aéroport.

Pour ce qui est de la fin de la fouille systématique au niveau des douanes, la direction des douanes a une politique de développement, ça va être du ciblage, comme partout ailleurs, parce que il y a d’autres moyens maintenant qui n’existaient pas avant. La douane est plus performante, elle a d’autres moyens d’avoir des informations. Il y a des scanners au niveau des arrivées, il y a des douaniers certes, mais les passagers passent, c’est fluide, il n’y a pas d’arrêt systématique comme avant. Quand on était dans l’ancienne aérogare, c’était systématique, tous les passagers passaient à la fouille, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Il y aura aussi de nouveaux moyens de transport qui desserviront l’aéroport…

Oui, jusque-là, nous n’avons pas des moyens de transport de masse, ce qui est insuffisant ni pour les passagers ni pour les employés de l’aéroport, sachant qu’entre 15 et 20 000 personnes se déplacent quotidiennement à l’aéroport pour travailler. On est obligés de transporter notre personnel par bus, au même titre qu’Air Algérie ou les autres partenaires et cela crée un encombrement immense que ce soit au niveau de l’aéroport ou au niveau de la ville de Dar El Beida. Le train et le tramway arriveront jusqu’à la plate-forme aéroportuaire, donc cela changera énormément de choses, d’autant plus que le métro est ponctuel.

La station de métro devrait être achevée fin 2018, la ligne vers 2020. Pour l’hôtel, il sera mis en service en même temps que la nouvelle aérogare ainsi que le train. Les travaux avancent bien et à ce rythme-là, ils ouvriront au même temps que l’aérogare.

Que deviendra l’actuelle aérogare ?

L’actuelle aérogare est constituée de deux halls. Nous sommes en train d’étudier la possibilité de garder le hall 1 pour les vols domestiques, car le domestique est actuellement à environ 1.9 million de passagers, donc on pourra traiter 3.5 à 4 millions de passagers sur ce hall car il y a moins de formalités et plus de fluidité. Le hall 2 où il y a actuellement Air Algérie et quelques compagnies, nous allons le réserver pour les compagnies des pays du Golfe qui transportent beaucoup de pèlerins, on va justement le spécialiser pour cela pour qu’il n’y ait plus de déperdition de passagers.

Pour l’actuel aéroport domestique, on va le dédier pour tout ce qui est vols pour le Hadj et la Omra mais en charter, soit les vols d’Air Algérie et de la compagnie saoudienne. Quant à l’actuel charter, qu’on appelle le T3, nous avons prévu de le démolir. Parce qu’il y a d’autres projets pour le futur, on doit commencer à préparer le terrain à l’aérogare qui va remplacer l’actuelle quand elle sera saturée. On prépare le terrain dès maintenant jusqu’en 2028 pour lancer les études pour la réalisation de la future aérogare parce que nous avons prévu dans le cadre du schéma directeur une nouvelle aérogare pour 32 millions de passagers.

Et pourquoi pas un nouvel aéroport au centre du pays pour désengorger justement celui d’Alger ?

Quand on construit un aéroport, il faut planifier pour aller jusqu’à 100 à 150 millions de passagers. Or avec l’urbanisation, il est difficile de trouver une telle assiette de terrain. On a fait un schéma directeur pour rationnaliser au maximum les terres environnantes pour permettre l’extension de l’aéroport d’Alger vers le Sud.

Grâce à un décret exécutif qui date de 2008, la construction sur toutes les terres au Sud de l’aéroport d’Alger, sur environ 2 200 hectares, est complètement gelée. Il est préférable de faire l’extension de l’aéroport que de construire un nouveau qui va nous coûter plus cher. Nous avons déjà des pistes, des infrastructures et demain, on pourra ajouter d’autres pistes mais sur le même site. C’est l’utilisation rationnelle de ce que nous avons. Nous pourrons aller jusqu’à 100 ou 120 millions de passagers par an, dans le futur bien sûr.

Les gros porteurs, comme l’A380, peuvent-ils se poser sur les pistes actuelles ?

Oui, bien sûr. Nous avons d’ailleurs prévu deux postes de stationnement pour l’A380. Si, dans le futur, le besoin se fait sentir, le problème ne se posera pas. Dans la conception, nous avons prévu deux postes de stationnement qui sont côte-à-côte, avec trois passerelles par avion. Au niveau des pistes, ce genre d’appareil peut se poser, nous n’avons pas de problème pour ça, nous avons certains travaux à ajouter au niveau de la voie de circulation seulement, sur les accotements qu’on va élargir pour que le réacteur n’absorbe pas la poussière, donc ce ne sont pas des travaux de piste. Nous allons réaliser 33 postes de stationnement supplémentaires pour avions, c’est énorme, puisqu’actuellement nous en sommes à 12 seulement.

Avec une telle aérogare, Alger peut-elle devenir une passerelle entre l’Afrique et l’Europe ?

C’est là justement l’objectif des pouvoirs publics, faire un rapprochement avec l’Afrique. Air Algérie pourra créer son hub et les passagers qui viennent d’Afrique peuvent être redispatchés ailleurs, par exemple Abidjan-Alger puis Alger-Paris. Je signale d’ailleurs qu’en 2017, on a eu une progression de 9% du trafic vers l’Afrique.

Il viendra le jour peut-être où une aérogare sera dédiée à Air Algérie Air dont le trafic croît aussi, mais rien ne l’empêcherait de faire son hub au niveau de la nouvelle aérogare en occupant un espace pour accueillir ses passagers et les rediriger vers d’autres destinations. Actuellement, il  n’y a pas beaucoup de correspondances mais il y a certaines conditions qu’on a assurées à Air Algérie pour qu’elle puisse faire de la correspondance le plus normalement du monde. Ça nous intéresse que les compagnies ramènent des passagers. Nous, les aéroportuaires, sommes des partenaires des compagnies, et chaque fois qu’une compagnie développe une politique pour ramener plus de passagers, nous sommes automatiquement partie prenante.

La SGSIA a en charge la gestion de l’aéroport d’Alger. Pouvez-vous nous en dire plus sur la société ?

La SGSIA a été créée en 2006, c’est une société par actions, dont le capital est détenu à 100% par l’État. Actuellement, nous avons un effectif de 1500 personnes, nous gérons directement les trois aérogares de l’aéroport d’Alger, l’international, le domestique et le T3 qui est dédié aux charters et vols Omra. J’ai une direction d’audit à mon niveau, une conseillère juridique et un conseiller technique. Nous avons cinq directions : ressources humaines, exploitation, financière, commerciale et infrastructures techniques.

L’aérogare actuelle a été inaugurée le 5 juillet 2006 par M. le président de la République et le 31 octobre de la même année, la SGSIA a été créée pour prendre l’aéroport d’Alger en autonomie, par rapport aux autres entreprises de gestion aéroportuaire qui sont des EPIC et qui continuent à gérer les autres aéroports, à l’exception de celui d’Alger.

Pour le trafic aérien, lorsque nous avons commencé, nous étions à 3.5 millions de passagers par an, nous sommes actuellement à 7.8 millions, et nous allons bientôt franchir la barre des 8 millions de passagers, donc nous sommes en progression constante. Le chiffre d’affaires de la société également croît en permanence, nous allons atteindre les 9 milliards de dinars cette année.

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