search-form-close
Prix des carburants : les calculs du ministre de l’Énergie sont-ils bons ?

Prix des carburants : les calculs du ministre de l’Énergie sont-ils bons ?

Le prix moyen de l’essence est fixé à 32 dinars par litre alors que ce carburant coûte en réalité 125 dinars à l’État, a affirmé, lundi 28 août, Mustapha Guitouni. Selon le ministre de l’Énergie, l’État algérien dépenserait en moyenne plus de 1 euro par litre d’essence. Son calcul est-il bon ?

En France, par exemple, le coût du pétrole brut et du raffinage représentent environ 34% du prix des carburants à la pompe. Cet élément permet de mieux comprendre pourquoi les prix à la pompe ont finalement peu baissé depuis 2014 alors même que le prix du brut était en chute libre.

Près de 60% de taxes

Dans le prix payé par le consommateur, il faut également ajouter les coûts de transport et de distribution. Ces coûts représentent environ 6%.

Les taxes représentent en 2017 près de 60% du prix payé par le consommateur. Le carburant est soumis à la TVA à 20% (Taxe sur la valeur ajoutée), à la TICPE (Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) qui est-elle même soumise à la TVA à 20% soit à « un impôt sur l’impôt ».

La TICPE, fixée chaque année par la Loi de finances, est une des principales sources de revenus de l’État. Elle est aussi très controversée car elle augmente chaque année. En 2017, cette taxe qui varie en fonction des régions se décompose de la manière suivante (hors Ile-de-France et Corse) : 0,658€ par litre pour l’essence et 0,544€ par litre pour le gazole, selon les chiffres des Douanes françaises.

Actuellement, le prix de l’essence en France oscille entre 1,30 et 1,40 euro en moyenne. Ce prix est très proche de celui avancé par notre ministre de l’Énergie. Dans ces calculs, notre ministre ne prend sans doute pas en compte les taxes – l’État ne se taxe pas lui-même. L’Algérie étant un pays producteur de pétrole, comment peut-on arriver au prix annoncé par Guitouni ?

Trois hypothèses se dégagent. La Première est que l’Algérie ne maîtrise pas du tout ces coûts de raffinage et de transport. La deuxième est que l’Algérie importe l’essentiel de sa consommation en carburants au prix fort. La troisième : le ministre se serait trompé de calcul. Dans un contexte marqué par une gestion opaque du secteur, il est difficile de trancher.

L’essence subventionnée, un gouffre pour l’Algérie 

Si en France le poids de la fiscalité sur le carburant pèse sur le prix à la pompe, et donc sur le budget des ménages, la politique de subventions en Algérie a, quant à elle, un lourd impact sur les finances publiques.

Une note du FMI publiée le 31 août 2016 rappelait que ces subventions sont d’autant plus difficiles à maintenir dans un contexte où les recettes pétrolières ont fondu depuis 2014. « Les services du FMI estiment que les subventions ont coûté aux pouvoirs publics environ 14% du PIB en 2015, soit pratiquement autant que le déficit budgétaire lui-même et le double des budgets cumulés des ministères de la Santé et de l’Éducation. Les subventions à l’énergie régressives sont à l’origine de plus de la moitié de ce coût ».

De plus, estime l’institution financière internationale, la plupart de ces subventions profitent davantage aux riches qu’aux pauvres. « Les 20% d’Algériens les plus riches consomment six fois plus de carburant que les 20% les plus pauvres. Cela n’est guère surprenant sachant que les personnes fortunées ont tendance à conduire davantage. Cela signifie que les subventions aux carburants sont régressives : plus vous êtes riche, plus vous en bénéficiez », note Andrew Jewell, l’économiste auteur de cet article.

Enfin, « les prix bas de l’énergie ont entraîné une progression rapide de la consommation d’énergie dans le pays », rappelle le FMI. Par conséquent,  « l’Algérie exporte moins de pétrole et de gaz, ce qui provoque une diminution des recettes budgétaires et une aggravation de la pollution et des embouteillages locaux. Les fortes subventions à certains produits encouragent aussi la contrebande vers les pays voisins ».

| LIRE AUSSIL’énormité des subventions énergétiques devient le problème numéro 1 de l’économie algérienne

  • Les derniers articles

close