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Prix des produits alimentaires : l’urgence d’une solution globale et concertée

Prix des produits alimentaires : l’urgence d’une solution globale et concertée

Après sa petite guerre aux distributeurs de lait en sachet subventionné, le ministre du Commerce a ouvert un autre front, cette fois avec les producteurs de viandes rouges. Dans le style à la hussarde qu’on lui connaît désormais, Kamel Rezig a menacé les éleveurs locaux d’ouvrir les ports aux viandes des pays du Sahel si, au cours du mois de ramadhan prochain, les prix ne baissent pas de près de la moitié.

800 DA le kilogramme, c’est le prix que veut Kamel Rezig, contre 1400-1500 dinars actuellement. Moins d’une semaine plus tard, et au hasard d’une rencontre avec les premiers concernés, c’est-à-dire les producteurs, le ministre s’est semble-t-il rendu compte qu’il est allé un peu vite en besogne.

Ses interlocuteurs lui ont expliqué que le prix qu’il avait fixé était très en deçà du seuil de rentabilité pour les éleveurs, assurant qu’il est impossible d’avoir dans l’immédiat de la viande ovine et bovine en dessous respectivement de 1200 et 1050 dinars.

Qu’ils disent vrai ou pas, la question des prix, pas uniquement des viandes, est très complexe pour être réglée en un tour de main par un ministre. Elle ne peut être prise en charge que dans le cadre d’une stratégie gouvernementale, impliquant une réponse globale et concertée aux questions connexes que sont la politique agricole, la distribution, les subventions et la protection de la production nationale.

Les dérèglements sont tels que nous assistons à des situations que la logique économique n’explique pas et sur lesquelles il y a lieu de réfléchir avant d’entreprendre quoi que ce soit.

Comment, par exemple, les pays du Sahel, très peu gâtés par la nature du moins concernant la pluviométrie, arrivent-ils à produire de la viande à bas prix ? Pourquoi la filière des viandes blanches connait-elle, au contraire, une situation de surproduction et d’effondrement des prix chez nous ? Pourquoi les producteurs de pomme de terre en sont-ils arrivés à déverser des tonnes du précieux tubercule sur les routes il y a quelques semaines ? Par quel miracle la viande de poulet, qui nécessite des mois d’élevage, se vend-elle au tiers de celui de la sardine pêchée dans la nature par des chalutiers offerts gracieusement par l’Etat ?

Il y a visiblement un déficit de régulation, de contrôle et de planification. Cela fait des années qu’on en parle mais la grande distribution, qui couvre le gros des transactions commerciales dans les pays avancés, est toujours au stade du balbutiement en Algérie.

C’est connu, les chaînes de grandes surfaces, avec leurs centrales d’achat qui négocient sur l’année les prix de chaque produit, constituent le plus gros régulateur du marché, permettant la disponibilité continue des produits et d’éviter les situations extrêmes de flambée ou d’effondrement des prix. La lutte contre la spéculation, dont se plaignent producteurs et consommateurs, passe par la mise en place de circuits modernes de distribution.

Il est plus facile pour l’Etat d’avoir à l’œil quelques dizaines de gros distributeurs que de mettre un gendarme derrière chaque petit commerçant, comme semble vouloir le faire le ministre du Commerce avec les distributeurs de lait et bientôt, promet-il, avec tous ceux qui interviennent dans les autres produits alimentaires de base. L’autre parent pauvre de l’économie algérienne, c’est l’industrie de transformation qui peut assurer une valeur ajoutée aux produits agricole tout en prémunissant les agriculteurs des aléas de la surproduction.

Cela dit, il faut reconnaître que l’idée d’utiliser l’importation comme régulateur des prix n’est pas totalement dénuée de bon sens. Protéger les agriculteurs et plus globalement la production nationale c’est bien, mais le mieux c’est de trouver le juste équilibre entre cet impératif et celui de soutenir le pouvoir d’achat du citoyen.

Pour rester dans l’exemple de la viande, l’Etat dispose de tous les outils pour déterminer combien coûte à l’éleveur la production d’un kilogramme de viande et, partant, à partir de quel seuil des prix le marché national sera ouvert aux ovins et bovins du Sahel ou d’ailleurs.

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