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Production et importation de céréales : le paradoxe algérien

Production et importation de céréales : le paradoxe algérien

Il y a comme un paradoxe dans la gestion par l’Algérie du dossier sensible des céréales : au moment où elle multiplie les achats sur les marchés mondiaux, la propulsant au rang des plus gros importateurs, elle semble ne pas trop savoir quoi faire de sa propre production.

Les images de camions de gros tonnage garés en file indienne devant les silos des CCLS (Coopératives des céréales et légumes secs), laissent logiquement déduire que la production est abondante, du moins supérieure aux capacités de stockage du pays.

Les mêmes scènes ont été rapportées à Djelfa, Khenchela et Adrar et sont appelées à se répéter dans d’autres wilayas considérées comme des bassins céréaliers, la campagne de moisson n’étant qu’à ses débuts.

Les plaintes des agriculteurs sont les mêmes : ils peinent à placer leur production auprès de l’OAIC, principal débouché pour la filière.

En dépit d’une telle situation, l’Algérie continue à importer des céréales en quantité, principalement du blé tendre. Une réalité encore confirmée cette semaine avec la publication des détails de la facture alimentaire du pays au cours du premier trimestre de l’année en cours.

Sur près de 2 milliards de dollars (1.92 milliard usd) d’importation, les céréales se taillent la part du lion avec 32.5%, soit quasiment le tiers.

Les céréales, semoule et farine ont coûté 629,5 millions de dollars durant seulement trois mois, contre 614,39 millions pour la même période de 2019.

La facture a légèrement augmenté (+ 2,46%) et pourrait encore gonfler lors de l’exercice à venir. À en croire les prévisions du département américain de l’Agriculture, les importations de céréales par l’Algérie lors de l’exercice 2020-2021 devraient augmenter de 15%, à 7.5 millions de tonnes, avec comme seule incertitude les limites qu’imposeront les réserves de change du pays sur fond de recul des recettes pétrolières.

Les chiffres des surfaces emblavées et de la production augmentent aussi d’année en année, avec des variations parfois assez marquées, en fonction principalement des précipitations.

En 2017-2018 par exemple, la production avait atteint 60.5 millions de quintaux contre quasiment la moitié (34 millions de quintaux) en 2015-2016, pour plus de 3.5 millions d’hectares emblavés.

La performance a été rééditée en 2019 et devrait encore l’être cette année en dépit d’un important déficit en pluviométrie durant l’hiver et une partie du printemps.

Ce qu’il convient d’appeler le paradoxe algérien, fait de fortes importations et de difficultés à collecter la production locale, s’explique en partie par les variations climatiques, un facteur qui ne peut être maîtrisé que par la généralisation de l’irrigation à toute la filière.

Les nombreux appels d’offres lancés successivement en mars et avril derniers avaient coïncidé par exemple avec la forte demande interne sur certains produits comme la semoule à cause du confinement annoncé mais aussi avec une période de sécheresse qui perdurait depuis le début de l’année.

L’autre élément que les autorités ne maîtrisent pas a trait à la nature même du climat de la région qui ne permet pas, quel que soit le volume des précipitations, une production abondante de blé tendre, utilisé pour les farines panifiables et constituant l’essentiel des importations du pays.

Mais le manque de vision, de stratégie et de bonne gestion est indéniable quand on constate que les quantités produites de blé dur et d’orge ne sont pas toutes collectées, ou le sont difficilement.

Lors de la campagne 2018, l’OAIC avait annoncé des mesures pour régler la problématique avec notamment la mise en place d’une carte magnétique pour les agriculteurs permettant le traitement de leurs dossiers en 48 heures, la disponibilité de 500 points de collecte, mais la situation n’a pas trop changé, laissant déduire que les infrastructures de collecte et de stockage ont été le parent pauvre des programmes de soutien à l’agriculture de ces deux dernières décennies.

De même que l’effort nécessaire pour trouver des débouchés autres que les silos de l’OAIC pour la production locale, ne semble pas avoir été fait.

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