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Québec : polémique après un reportage bidonné contre les musulmans

Québec : polémique après un reportage bidonné contre les musulmans

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Le plus grand réseau de télévision francophone au Québec, TVA, a présenté vendredi, des excuses publiques après la diffusion d’un reportage bidonné mettant en cause une mosquée de Montréal.

Exclure les femmes d’un chantier

Mardi dernier, la chaîne diffusait dans son journal télévisé, TVA Nouvelles, et sur toutes ses plates-formes et en « exclusivité » le reportage en cause. Dans ce dernier, une journaliste affirmait qu’une mosquée montréalaise avait demandé d’exclure les femmes d’un chantier avoisinant pendant la prière du vendredi.  Le chantier appartient à un organisme public mais est géré par une entreprise privée.

Dans la première version, la reporter a confronté « hargneusement » les responsables du lieu de culte avec sa caméra leur demandant de confirmer l’existence d’un contrat entre la mosquée et les responsables du chantier qui interdirait la présence de femmes.

Incrédules, ils nient et lui demandent de leur montrer ce contrat. « Dès que je l’ai, je vous en envoie une copie, moi je l’ai filmée. C’est écrit noir sur blanc, je vais la montrer ce soir », leur répond la journaliste qui a inclus tout cet échange dans son envoi.

Entre-temps, la mosquée incriminée émet un communiqué par le biais de son avocat où ses responsables « nient vigoureusement avoir demandé l’exclusion de qui que ce soit sur le site en construction faisant face à son établissement ». « Ces déclarations contenues dans le reportage sont non seulement fausses mais contribuent à l’effritement social entre les Québécois de confession musulmane et non-musulmane », ajoute le communiqué. Mais rien n’y fait. Le coup est déjà parti et le mal est fait.

Le reportage a mis en émoi toute la classe politique et enflammé les réseaux sociaux. Des groupe d’extrême droite ont appelé manifester devant la mosquée. Le soir-même, le gouvernement du Québec ordonne une enquête « rapide » pour savoir ce qui s’est réellement passé. Elle est confiée à la Commission de construction du Québec.

Fake-News 

Seule la maire de l’arrondissement du quartier où se trouve la mosquée a défendu le lieu de culte pendant la controverse. Sue Montgomery qui est une ancienne journaliste vedette a été impitoyable avec la reporter à l’origine de cette fake-news. « C’est irresponsable comme journalisme. La journaliste n’a pas fait son devoir. Elle n’a même pas vu le contrat. Mais elle a mis dans son reportage que c’est écrit noir sur blanc », a-t-elle affirmé à un média local. Elle a aussi rappelé qu’elle a visité plusieurs fois le lieu de culte « sans porter de foulard ».

Le lendemain, des journalistes de la presse écrite commencent à fouiller en profondeur le sujet et les failles du reportage commencent à émerger.

Le coup de grâce discréditant le reportage a été donné par les conclusions de l’enquête. « Absolument, rien n’indique que les dirigeants ou les représentants des mosquées aient demandé des aménagements concernant la présence des femmes au chantier », affirment les enquêteurs qui ont interrogé tous les intervenants et consulté tous les documents administratifs.

Dans un premier temps, la chaîne de télévision a diffusé une précision parlant d’un imbroglio. Mais devant l’énormité de la bourde et du bidonnage, elle a fini par présenter ses excuses formelles lues pendant le journal télévisé : « TVA Nouvelles regrette cette situation et tient à s’excuser auprès des différents intervenants et des téléspectateurs qui ont été affectés. La direction continue de mener son enquête interne pour valider les étapes de la démarche journalistique effectuées dans le cadre de ce reportage ».

La chaîne de télévision est propriété de l’homme d’affaires Pierre-Karl Péladeau qui a été à la tête du Parti Québécois, un parti progressiste qui flirte avec la droite identitaire. Le même homme d’affaires était propriétaire de la chaine de télévision Sun News, appelée la Fox news du nord en référence à ses attaches de droite. Cette dernière a disparu en 2015.

Ce même parti dont les ténors se sont empressés de dénoncer la mosquée sont restés muets après la publication des résultat de l’enquête et des excuses.

Aucune sanction n’a encore été prise contre la journaliste ou ses responsables. Plusieurs plaintes ont été déposées au Conseil de presse du Québec, gardien de la déontologie et de l’éthique.

Il est utile de rappeler que sur la même chaîne de télévision, en 2011, une présentatrice d’origine haïtienne avait perdu son travail pour avoir mal prononcé le nom du dirigeant nord-coréen Kim Jong-Il qu’elle avait prononcé Kim Jong-2.

Dans un contexte de montée de l’islamophobie et malgré les démentis publics, une poignée d’extrémistes est venue perturber la prière du vendredi à laquelle assistait le ministre de l’Immigration et quelques élus locaux.

Les responsables de la mosquée disent qu’ils pardonnent la bourde mais réfléchissent encore aux éventuelles suites judiciaires à donner à cette affaire.

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