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Solidarité : Hadj Hamitouche ou l’heure de gloire du privé algérien

Solidarité : Hadj Hamitouche ou l’heure de gloire du privé algérien

Beaucoup de leçons seront tirées de cette pandémie de covid-19 lorsque tout cela sera passé. On saura par exemple que la diabolisation du secteur privé algérien était une erreur à ne pas refaire.

Aux premières lignes de la solidarité avec les malades et les hôpitaux qui étouffent au sens propre plus qu’au figuré, on a vu des sociétés privées, au moment où les firmes étrangères, dont certaines multiplient chaque année juteux contrats et gros chiffres d’affaires, sont aux abonnés absents. Idem pour le secteur public.

Lire aussi : Lutte anti-covid : le formidable élan de solidarité des Algériens

Une entreprise est sur toutes les lèvres depuis l’aggravation de la situation sanitaire et le lancement des opérations de solidarité au profit des hôpitaux dans la bataille anti-covid. Il s’agit du groupe de produits laitiers Soummam, implanté à Akbou, dans la wilaya de Béjaïa.

Tout a débuté lorsque son patron, Lounis Hamitouche a été sollicité par le mouvement associatif d’Akbou pour contribuer à l’achat d’un générateur d’oxygène pour l’hôpital de la ville qui, à l’instar de tous les établissements sanitaires du pays, souffrait gravement de la pénurie de ce produit vital.

Soummam et General Emballage, un autre groupe privé implanté dans la même zone et leader national de l’emballage et du carton ondulé, et d’autres entreprises de la région, prennent en charge rapidement le paiement de la facture du matériel, d’une valeur de 17 millions de dinars (1.7 milliard de centimes).

Depuis, Hadj Hamitouche ne cesse pas d’être sollicité, et de proposer lui-même son aide pour les hôpitaux qui souhaiteraient acquérir du matériel d’oxygénothérapie.

Son programme est allé en augmentant. 10, puis 18 et enfin 21 générateurs d’oxygène sont financés par l’industriel d’Akbou à travers tout le territoire national.

Certes, les moyens de l’entreprise ne sont pas illimités, même si elle est leader national en produits laitiers, mais la gravité de la situation ne laisse guère le choix à son patron. « Je ne peux pas refuser les demandes des gens », dit-il.

Hadj Hamitouche n’a pas fait les grandes écoles de commerce, de management ou de conduite des affaires. Issu d’un milieu très modeste, il s’est contenté d’apprendre à l’école de la vie.

Mais il semble avoir compris bien plus que certains politiques et gestionnaires concernant le fonctionnement de la machine économique et le rôle social d’une entreprise.

« Si aujourd’hui j’ai de l’argent à donner, c’est grâce aux Algériens qui achètent mes produits. Aujourd’hui je leur rends leur argent d’une autre manière », dit-il.

L’équation est bien simple pourtant : les entreprises sont riches par leurs clients et le pays, et donc les clients, sont riches par leurs entreprises.

Une diabolisation qui n’a pas lieu d’être

Hélas, il faut dire que le secteur privé national n’a pas été souvent vu sous cet angle. C’est-à-dire comme une force qui peut être utile pour la collectivité nationale, indispensable même, et sans laquelle rien de sérieux et de pérenne ne peut être entrepris avec succès.

Les grandes nations de la planète sont d’abord grandes par leurs entreprises, leurs marques qui arrivent aux quatre coins du globe et leur tissu économique. Une entreprise qui se porte bien, qui crée de la richesse et des emplois, est un atout pour le pays.

Les erreurs commises en Algérie dans ce registre ont coûté cher. En parlant de Soummam et de son patron, ils n’ont pas échappé à la diabolisation qui épisodiquement touche telle entreprise ou telle autre.

Sans raison apparente, Soummam s’est retrouvé au début de l’année 2020 dans le collimateur d’une frange de la population sur les réseaux sociaux.

Un ministre de la République a fait miroiter la venue d’une marque saoudienne et de tout lui faciliter pour s’implanter en Algérie, qui pourtant ne manque pas d’entreprises dans ce domaine qui sont capables de conquérir des marchés à l’international.

Ramener des étrangers pour casser des fleurons de l’industrie nationale, c’est du jamais vu ailleurs. Le projet de la venue d’Almarai est vite oublié et le patron de Soummam a continué son chemin sans faire de bruit.

Cevital, un autre groupe leader national dans son domaine a fait l’objet de la même diabolisation pendant plusieurs années. Le groupe d’Issad Rebrab n’a pas seulement fait l’objet d’attaques sur les réseaux sociaux, mais il a vu plusieurs de ses projets de développement bloqués.

Cevital a aussi grandement contribué à atténuer la crise dans les hôpitaux en annonçant l’achat de 4000 concentrateurs d’oxygène, ainsi que des centaines d’entreprises de différentes tailles, peu connues pour la plupart.

L’heure de gloire du privé national est-elle enfin arrivée ? En tout cas, sur les réseaux sociaux, un bel hommage est rendu à tous ceux qui ont mis la main à la poche dans ces moments difficiles.

Il est connu que les actions de mécénat ne se médiatisent pas, mais les réseaux sociaux et même les médias traditionnels ne pouvaient rester insensibles devant ces actions d’envergure dans un moment de détresse nationale.

Cette forte médiatisation est assurément pour la bonne cause. Elle contribuera peut-être à faire prendre conscience de l’importance pour un pays d’avoir un secteur privé performant. Si c’est là sans doute le message que voudrait faire passer Lounis Hamitouche, il est reçu cinq sur cinq. Du moins auprès de l’opinion publique.

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