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Tizi Ouzou : découverte d’un gisement fossilifère à Ouacif ?

Tizi Ouzou : découverte d’un gisement fossilifère à Ouacif ?

Mohamed Arezki Himeur

Pour une trouvaille, c’en est bien une. Et de taille. Un fossile représentant une gigantesque patte à quatre doigts, vraisemblablement d’un membre postérieur. L’empreinte gravée sur un rocher fait apparaître une patte proche de celle d’un dinosaure, de l’espère tricératops.

Le rocher sur lequel elle est estampée est suspendue sur le flan d’un précipice surplombant une rivière qui déboule du massif du Djurdjura. Il est accessible en prenant, néanmoins, quelques précautions. Pour éviter de se retrouver ratatiné plusieurs dizaines de mètres plus bas sur un rocher ou dans le lit de la rivière, dont l’eau abondante, coule en cascade pour rejoindre le barrage de l’Oued Aïssi.

En fait, tout a commencé à partir de quelques pierres et rocs trouvés, à Ouacif, wilaya de Tizi Ouzou, dans des tas de terres destinées aux petits jardins qui embellissent la cour du Centre de formation professionnelle pour adulte (CFPA) de la ville. La forme des cailloux a d’abord attiré l’attention puis suscité l’intérêt de Djamel Laceb, enseignant et auteur en tamazight.

Mais celle qui a titillé sa curiosité a la forme oblongue. Il l’a suspecté  d’être un fossile, un fémur avec rotule d’un animal de grande taille. « Tu as trop d’imagination » lui a répliqué un de ses amis. Un autre ami, Hacène Halouane, enseignant à l’université et auteur en tamazight était lui aussi convaincu que la  suspicion  est loin d’être farfelue sans intérêt. Bien au contraire, il a pris la trouvaille de son ami au sérieux.

Décision est prise. Tous deux prennent le chemin de l’endroit d’où a été ramenée la terre pour le jardinage. Le coin planté essentiellement d’oliviers, regorgent d’importants tas de pierres et de rochers suspects , pour reprendre l’expression de M. Laceb. Ils tourbillonnent autour de ces amas de cailloux en retournent de temps à autres quelques-uns dans l’espoir de repérer, de deviner un signe, un indice, un résidu intelligible pour des amateurs « ighsanologue », expression humoristique tirée de l’aménagement de deux mots kabyle et français inventée par M. Laceb pour désigner les paléontologues.

L’empreinte d’une patte géante

Le déplacement n’a pas été vain. La recherche, en surface évidemment, s’est traduite par la découverte par M. Halouane, de l’empreinte de la patte géante cité précédemment. Vendredi dernier, les deux enseignants que nous avons accompagné ; qui ont déjà publié des photographies de leurs trouvailles sur les réseaux sociaux ; ont déniché plusieurs pierres et rocs ayant la forme de fémur, mâchoire, dents etc. aux lieux-dits Tibudrarin et Taassast, dans la commune d’At Boumahdi, dans la daïra d’At Ouacif. Un habitant nous a montré l’empreinte d’un pied humain gravée sur un bloc de pierre.

(Crédit photo : D. Laceb ©)


Une autre empreinte semblable existait déjà dans le secteur. On l’appelait « adar n’nbi » (le pied du prophète) et qui fut, autrefois, un lieu de pèlerinage et de visites pour femmes. L’empreinte a disparu, détruite ou enfouie sous terre lors d’une ouverture, il y a quelques temps, d’une piste forestière.

Tibudrarin, Taassast et Smad se trouvent dans une plaine complantée essentiellement d’oliviers, surplombée par le massif montagneux du Djurdjura, plus particulièrement par le plateau d’Aswel et la cime de Talettat, connue aussi sous l’appellation de « la main juif. »

(Crédit photo : M.A. Himeur ©)


L’ensemble du site s’étend sur une vaste surface. Il est parsemé de nombreux amoncellements de blocs, de pierre et de cailloux. Déterrés lors de la réalisation d’une piste, par des crues provoquées par de fortes précipitions et, aussi, à l’occasion de l’aménagement de plateformes des nouvelles constructions individuelles érigées dans la zone.

Djamel Laceb et Hacène Halouane vont prendre attache avec le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques d’Alger (CNRPAH).

Un organisme bien outillé pour mener les fouilles et les travaux d’analyses, dont le champ d’action va de la préhistoire à nos jours. La paléontologie fait partie de ses activités et dispose même d’un laboratoire dans les locaux du centre.

(Crédit photo : M.A. Himeur ©)


Les recherches du CNRPAH sur le terrain vont de la prospection aux travaux de laboratoires, en passant par le recueil et la collecte de corpus. « Les missions sur le terrain sont souvent pluridisciplinaires et regroupent préhistoriens, anthropologues et autres spécialistes avec la collaboration de photographes et de laboratoires techniques. Les résultats des travaux sont publiés dans les supports éditoriaux du CNRPAH ainsi que dans des revues internationales, peut-lire sur son site Internet.

Qui sait ? Tibudrarin, Taassast et Smad peuvent créer la surprise. En livrant le secret d’un important gisement fossilifère du pays, qui prendra les contours d’un musée à ciel ouvert susceptible de drainer, plus tard, une fois les fouilles achevées et les objets découverts protégés de nombreux visiteurs.

(Crédit photo : M.A. Himeur ©)


En plus des messages que pourraient délivrer les fossiles sur un fragment de la préhistoire, une telle perspective est de nature à donner un coup de fouet à l’activité touristique et artisanale de la commune d’Ath Boumahdi, à laquelle est rattachée la zone de la daïra de Ouacif ainsi que des villes et villages environnants.

(Crédit photo : M.A. Himeur ©)


 

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