Politique

Transition politique et 5e mandat : pourquoi l’initiative de Makri est condamnée

Comme il fallait s’y attendre, le FLN a réservé une fin de non-recevoir à l’initiative du MSP d’engager une réflexion sur un consensus national devant aboutir à une période de transition.

Si le vieux parti a mis les formes dans son rejet, feignant d’accepter le principe de consensus en émettant quelques réserves, les autres formations qui ont eu connaissance de la teneur du projet de Abderrzak Makri ont été plus catégoriques. L’idée d’une période de transition telle que proposée par le MSP n’a trouvé grâce ni aux yeux du MPA ni à ceux du FFS, en attendant de connaitre la réponse d’Ali Benflis, sondé lui aussi par une délégation du parti, et surtout, d’Ahmed Ouyahia qui devrait l’être dimanche prochain.

De ce qu’il a entendu jusque-là, rien ne devrait pousser M. Makri à l’optimisme. L’échec de son initiative a même été évoqué lors de la conférence de presse qui a suivi sa rencontre avec son homologue du FLN et il l’a admis comme une éventualité tout à fait plausible d’autant plus que, assure-t-il, il n’a reçu « aucune garantie de qui que ce soit ».

« Oui, le projet de consensus national peut aboutir comme il peut échouer. C’est peut-être la dixième fois que nous lançons ce genre d’initiative depuis l’époque du regretté Mahfoud Nahnah et toutes ont échoué. J’ai l’espoir que cette fois-ci le succès sera au bout, mais si ce n’est pas le cas, nous aurons au moins fait notre devoir », reconnait-il.

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En parlant d’échec, le MSP n’a pas été la seule formation politique à en connaitre. Plusieurs partis de l’opposition n’ont pas pu se mettre d’accord sur une feuille de route lors de la conférence de Mazafran en 2014. La même année, c’est le FFS qui a vu son projet de construire un consensus national ignoré par tout le monde, pouvoir et opposition.

D’expérience, Makri sait de quoi dépend le succès ou l’échec de ce genre de projet et il l’a dit sans ambages lors de son point de presse : la volonté politique du pouvoir. Le mot est lâché et la déduction est toute simple : quand bien même il réussirait à convaincre toutes les formations politiques, le MSP verra son initiative subir le sort des précédentes si elle ne trouve pas grâce aux yeux du pouvoir.

Que pensent donc les décideurs de l’idée de transition ? L’institution militaire, concernée directement par le projet du MSP puisqu’elle est invitée à « accompagner » une probable période de transition, n’a pas encore fait connaitre ce qu’elle en pense. Quant aux autorités politiques, si elles devaient émettre quelque avis, c’est d’abord par le biais des deux partis majoritaires qu’elles le feraient.

En attendant donc Ouyahia, Djamel Ould Abbès a peut-être exprimé mardi le fond de la pensée de la présidence de la République, d’autant plus que le personnage n’a pas pour habitude de se positionner sur des questions sensibles de sa propre initiative. On retient aussi que le chef du FLN est resté droit dans ses bottes concernant la question du cinquième mandat, en faisant presque un préalable à toute discussion.

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Si, comme il le dit, son initiative émane des seules instances du parti, le président du MSP aura au mieux mal exprimé sa proposition, au pire mal évalué la situation avant de la dévoiler. En ce sens que le rapport de forces en ce moment n’est franchement pas en faveur de son parti ni du reste des formations de l’opposition.

Autrement dit, le pouvoir n’est pas en position de se voir imposer quoi que ce soit. Le front social est calme, les cours du pétrole ne sont pas au plus bas et l’opposition est plus que jamais désunie. Aucun parti ou coalition n’a réussi jusque-là à lui faire accepter quelque feuille de route, même dans des périodes de grandes difficultés économiques ou politiques. Faut-il rappeler que tous les rounds de dialogue pouvoir-opposition de ces vingt ou trente dernières années ont débouché sur l’acceptation et la mise en œuvre de plans initiés par le premier, d’où d’ailleurs sa pérennité.

On le sait, même si son initiateur ne le dit pas, le projet de consensus dont il s’agit cette fois consiste à adopter une position commune vis-à-vis de la question du cinquième mandat. Une question certes problématique, vu l’âge et l’état de santé du président, mais qui devrait être tranchée par le premier concerné, son entourage proche et ceux qui ont l’habitude de peser sur ce genre de grandes décisions.

Quant à l’opposition, elle devra d’abord se défaire de son incapacité chronique à s’unir et surtout à mobiliser.

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