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Vaccination et véhicules : 2 polémiques qui révèlent les carences du gouvernement

Vaccination et véhicules : 2 polémiques qui révèlent les carences du gouvernement

À défaut de voitures et de vaccins anti-Covid, le gouvernement a servi aux Algériens deux polémiques qui illustrent ses difficultés à anticiper et à prendre des décisions difficiles.  

Entamé l’été dernier, le débat autour de la vaccination de masse contre la Covid-19 a débouché sur la décision surprenante du président Abdelmadjid Tebboune de fixer la date du début de la campagne pour ce mois de janvier.

Le 20 décembre, depuis l’Allemagne où il était en convalescence, le président Tebboune avait demandé au gouvernement d’accélérer les préparatifs pour choisir le vaccin anti-Covid et entamer la vaccination dès le mois de janvier 2021.

Tebboune désavoue Djerad et Benbouzid

Dix jours après, le gouvernement annonce avoir commandé 500.000 doses du vaccin russe « Spoutnik V ».

Avant l’intervention de Tebboune, le ministre de la Santé Abderrahmane Benbouzid, des membres du comité scientifique et même le premier ministre Abdelaziz Djerad ont fait évoluer d’une façon radicale leur discours sur le choix des vaccins.

Le 15 décembre, Djerad avait annoncé que l’État algérien ne prendra pas de décision sans « garanties » quant à l’efficacité des vaccins proposés.

Le 2 août dernier, le même Djerad tenait un autre discours : « L’Algérie sera parmi les premiers pays à acquérir le vaccin anti Covid-19 ». Il avait dit que « tous ceux qui en ont besoin seront vaccinés ».

Au lundi 25 janvier, soit cinq jours avant la fin de l’échéance fixée par le chef de l’État, la vaccination n’a toujours pas commencé. L’Algérie n’a pas reçu les doses commandées, et elle ne figure pas parmi les premiers pays à acquérir le vaccin.

Les autorités sanitaires sont même dans l’incapacité de fixer une date précise pour le début de la campagne de vaccination. Dans ce dossier, le gouvernement a manqué clairement d’anticipation, sans doute qu’il a sous-estimé l’ampleur de la tâche, et la forte demande mondiale sur les vaccins.

Manque d’anticipation et cacophonie

« La forte pression sur le vaccin, il fallait l’anticiper. Il aurait fallu anticiper dès le mois de mars, ce que l’Algérie n’a pas fait », a déploré le professeur Kamel Bouzid, dans un entretien à TSA, publié hier dimanche. Avant lui, le Dr Mohamed Bekkat Berkani, membre du comité scientifique, avait critiqué la démarche du ministre de la Santé concernant l’acquisition des vaccins anti-Covid.

Le président du SNPSP, le Dr Lyes Merabet a aussi déploré sur TSA, que la communication autour de la campagne vaccinale était « très timide ». « On donne l’impression qu’on n’est pas sûr de soi, on est en train d’avancer des délais et des échéances, et même beaucoup de suppositions au nom de responsables. Or, lorsqu’on s’exprime en tant que responsable, je pense qu’il faut être formel, affirmatif et précis », a-t-il expliqué.

Le président de la Forem, le Pr Mustapha Khiati, a pointé une « véritable cacophonie », tout en regrettant les déclarations « contradictoires » des membres du comité scientifique.

Outre la vaccination contre la Covid-19, ces derniers mois ont été marqués par une autre polémique qui concerne un dossier moins sensible : l’importation des véhicules neufs.

Après des mois d’attente, d’instructions de Tebboune, de rappels à l’ordre, le ministre de l’Industrie Ferhat Ait Ali, a fini par annoncer début janvier, une enveloppe de 2 milliards de dollars pour l’achat des voitures neuves.

Le gouvernement, qui a bloqué les importations de véhicules neufs et fermé les usines d’assemblage, s’est attelé en 2020 à changer les réglementations relatives à l’industrie automobile et à l’exercice des activités de concessionnaires.

Fin août, les nouveaux textes ont été promulgués au Journal officiel, après plusieurs réunions du Conseil des ministres, pour fixer les conditions. La modification des réglementations a permis au gouvernement de gagner du temps, et d’économiser des devises qui devaient servir à acheter les véhicules. Une politique qui a provoqué une flambée incroyable des prix des voitures d’occasion en Algérie.

Fin décembre 2020, le même Ait Ali avait pourtant proclamé que les véhicules neufs ou d’occasion n’étaient pas une « priorité », et avait enterré définitivement le dossier relatif au retour à l’importation des véhicules de moins de 3 ans.

« Avec la baisse des réserves de change, des prix de pétrole, nous devons préserver les réserves, unique garantie du dinar et de la souveraineté du pays pour le fonctionnement de l’économie et de la vie publique. 

Pour cela, il faut que le citoyen ne fixe pas lui-même ses besoins personnels ou catégoriels concernant les importations du pays. Quand vous perdez 50 % de vos revenus et que vous voulez garder le même rythme de dépenses, c’est comme dire après moi le déluge », a soutenu Ferhat Ait Ali.

Importation des véhicules neufs : échange d’accusations

Les propos d’Ait Ali ont été qualifiés de provocation par le président de l’Apoce, Mustapha Zebdi, qui suppose que le changement de braquet d’Ait Ali sur cette question serait la conséquence d’un recadrage de la part du président de la République. Mais la réaction la plus virulente est venue du sénateur du FLN, Abdelouahab Benzaim.

« S’il y a une décision écrite du président, qu’il la montre », a réclamé le sénateur en référence à l’instruction évoquée par le ministre Ait Ali. La polémique a culminé au Sénat jeudi 21 janvier par un échange houleux entre les deux hommes.

Le sénateur Benzaim a pointé du doigt le manque de transparence qui entoure l’opération d’octroi lundi 18 janvier de quatre agréments provisoires aux concessionnaires. Mais l’identité des quatre heureux candidats n’a pas été dévoilée.

Au Sénat, le ministre de l’Industrie a défendu sa méthodologie en affirmant que l’opération d’octroi d’agréments aux concessionnaires s’est déroulée dans la transparence. Ait Ali a accusé des « groupes douteux » de mener « une campagne, depuis Marseille », contre sa politique dans l’automobile, et engagent des canaux locaux « sous la protection d’un faux nationalisme ». « Je reçois des étrangers qui essayent de faire pression au profit de ces groupes douteux, et quand ils ne réussissent pas, ils mènent une campagne à travers les médias, ou bien leurs émissaires dans le pays », a indiqué Aït Ali, a rapporté El Watan. Benzaim a vivement protesté en demandant au ministre de ne pas accuser « qui que ce soit de traîtrise ou d’être un fils de la France ! ».

Transparence : Djerad désavoue Ferhat Ait Ali

« Il est attendu de nous que nous défendions les intérêts de l’État et du peuple, et de ne pas se soumettre aux pressions des cercles occultes ni à leur chantage. Il n’y a que la loi qui doit prévaloir », a lancé Benzaim.

Une exigence de transparence à laquelle le Premier ministre n’a pas été insensible, en appelant, mercredi 20 janvier, dans le communiqué, à l’accélération du « rythme de traitement des dossiers introduits au niveau du Comité technique placé auprès de son secteur et de veiller à l’exigence de transparence dans ce domaine ».

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