Économie

« L’Algérie n’est pas sortie des radars des groupes français »

En pleine crise politique aiguë entre Alger et Paris, le patron d’un grand groupe économique français est reçu au plus haut niveau de l’Etat algérien. Lundi 2 juin, le président Abdelmadjid Tebboune a accordé une audience à Rodolphe Saadé, patron du géant français des mers CMA CGM.

Au-delà de son caractère purement économique, cette visite qui permet au troisième armateur mondial de relancer ses projets en Algérie, envoie un message politique dans un contexte de grave crise entre les deux pays.

Certains à Paris avancent que l’Algérie n’est plus dans les radars des grands groupes français. La visite de Rodolphe Saadé, un proche du président Emmanuel Macron, signifie-t-elle qu’elle y est revenue ? La question a été posée par TSA à Michel Bisac, président de la Chambre de commerce et d’industrie algéro-française (CCIAF).

Le fait que le patron français a été reçu par le président signifie qu’ « en économie, on reste pragmatique », répond-il.

“Cette visite, poursuit notre interlocuteur, est une lueur d’espoir, elle signifie que l’économie sera épargnée, ce qui peut influer sur le politique. Quand un président reçoit un grand chef d’entreprise français, c’est un signe de détente. J’espère qu’il y aura d’autres signes plus forts.”

Michel Bisac rappelle qu’il est de ceux qui ont toujours soutenu la « séparation de l’économie du politique » dans les relations entre l’Algérie et la France. 

La crise politique déclenchée en juillet 2024 entre les deux pays a influé sur la relation économique. Les échanges commerciaux entre les deux pays, en baisse en 2024, ont encore chuté au premier trimestre de 2025, notamment les exportations françaises vers l’Algérie qui ont reculé de 21%. 

 

Michel Bisac : “Les groupes français n’ont pas sorti l’Algérie de leurs priorités”

 

Certaines filières françaises qui dominaient le marché algérien, comme celles du blé et de l’automobile, ont vu leurs parts réduites à presque rien. En outre de grands investissements français en Algérie sont à l’arrêt, comme l’usine Renault d’Oran. 

Néanmoins, malgré ces chiffres et ces faits, Michel Bisac souligne une autre réalité : l’Algérie n’est en fait “jamais sortie des radars des groupes économiques français”. 

Selon lui, les entreprises travaillant régulièrement avec l’Algérie n’ont jamais sorti le pays “de leurs priorités”. Il suffit pour s’en convaincre, dit-il, de voir les derniers contrats signés par Sonatrach avec Vallourec et Viridien concernant, respectivement, la fourniture de tubes en acier et l’étude et le retraitement des données sismiques. 

Sans oublier, ajoute le président de la CCIAF, la récente commande de chalutiers fabriqués en Algérie par un armateur breton. “La visite en Algérie de Rodolphe Saadé s’inscrit dans cette lignée. Nous devons à tout prix séparer la politique de l’économie et nous inscrire en faux par rapport à cette volonté qui cherche à nous entraîner vers la rupture totale”, plaide Michel Bisac.

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