Économie

Agriculture : révolution discrète dans les champs algériens

Pendant longtemps en Algérie, la récolte de l’ail a été manuelle. Cette saison à Mila, des agriculteurs ont, pour la première fois, utilisé une déterreuse-lieuse qui permet de mécaniser la récolte. Une première en Algérie qui accélère la mécanisation de ses récoltes agricoles.

Des producteurs d’ail de Téleghma (Mila) ont en effet utilisé un engin de marque Zocapi importé d’Espagne. Rang par rang, il leur est ainsi possible de déterrer les gousses d’ail et de lier des bottes d’une vingtaine de pieds de façon automatique.

Traditionnellement, cette opération est manuelle. Après qu’un tracteur passe en traînant une lame d’acier qui déterre les plants, des ouvriers agricoles devaient former des bottes. Toute la journée, ils devaient ramasser les plants et les lier d’un bout de ficelle.

Face à cette tâche harassante, certains agriculteurs avaient même recours à de la main-d’œuvre sub-saharienne, faute de bras locaux. Aujourd’hui, il suffit d’atteler l’engin derrière un tracteur et qu’un ouvrier assis sur l’engin le guide pour que chaque rang d’ail soit ainsi récolté.

Certes, reste ensuite l’opération de collecte des bottes que laisse tomber au sol le tapis roulant de l’engin. Cependant, le recours à la main d’œuvre est considérablement réduit de même que les charges salariales.

Depuis des années, les agriculteurs de Mila avaient introduit des planteuses d’ail, avec cette nouvelle mécanisation de la récolte, c’est l’ensemble des opérations qui sont en cours d’être mécanisées.

L’enjeu est énorme. Les services agricoles prévoient pour cette saison une récolte de 1,55 million de quintaux sur plus de 3 000 hectares, selon l’agence APS.

Vers la généralisation de la mécanisation des récoltes agricoles en Algérie

L’essor de la production locale d’ail à Mila est lié à la décision prise par les pouvoirs publics en 2020 de ne plus importer d’ail. Le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, avait à l’époque réunit les cadres du Ministère, des membres du Conseil national de la filière ail ainsi que les directeurs des instituts techniques concernés pour étudier les procédures et mesures à prendre afin de développer cette culture.

Aujourd’hui, la surproduction est telle que les producteurs souhaitent que le surplus soit exporté.

L’ail n’est pas la seule culture dont la récolte est aujourd’hui mécanisée en Algérie.

C’est le cas des céréales dont les moissonneuses-batteuses de marque Sampo permettent aujourd’hui la récolte en vrac. C’est le cas également de la tomate industrielle, du maïs fourrage conditionné en balles rondes, des olives avec l’emploi de peignes vibreurs ou du déterrage des pommes de terre.

Certes, le pourcentage de mécanisation pour chacune de ces cultures est variable. S’il est de 100% pour les céréales, il reste faible pour les olives et ne fait que débuter dans le cas de l’ail.

Dans le cas de la pomme de terre, les opérations de déterrage mécanique deviennent la norme. Mais, alors que ce tubercule fait part égale avec les céréales comme aliment de premier plan des Algériens, la mécanisation de sa récolte reste incomplète.

En effet, une fois les pommes de terre déterrées, il s’agit de les ramasser. Or, la quasi-totalité des tubercules consommés en Algérie sont ramassés à la main. Cette opération est réalisée par des ouvriers agricoles qui sont le plus souvent payés à la tâche, c’est-à-dire au cageot rempli et qui durant des journées entières sont à genoux pour ramasser ces tubercules.

En cause, l’inexistence d’arracheuses-chargeuses, c’est-à-dire d’arracheuses munies d’un tapis roulant permettant de convoyer les pommes de terre jusque dans une remorque.

Avec la généralisation de la mécanisation des récoltes, une révolution discrète est en train de gagner les champs agricoles algériens.

Production agricole : l’effet positif des surtaxes à l’importation

Le succès de la production d’ail en Algérie revient à la mesure prise par les pouvoirs publics d’affecter des Droits additionnels provisoires de sauvegarde (DAPS) à l’ail auparavant importé. Une mesure qui a radicalement fait chuter les importations.

Les DAPS, constituent des mesures provisoires, ce qui implique que les producteurs locaux puissent arriver à terme à des coûts de revient voisins de ceux pratiqués sur le marché international. Et la mécanisation est un moyen d’aligner les coûts locaux avec ceux des agriculteurs étrangers.

A cela s’ajoute la décision de permettre l’importation du matériel agricole de moins de 7 ans comme l’indique le décret exécutif n° 24-241, publié dans le Journal officiel.

De nombreux artisans locaux mettent au point des outils permettant de mécaniser une partie des opérations agricoles. C’est le cas de la lame permettant de déterrer les gousses d’ail. Dans le cas de la plantation de tomate et de pastèques, des artisans se sont inspirés de modèles étrangers et aujourd’hui produisent des engins qui effectuent plusieurs opérations. Ils déroulent un film de plastique, le tuyau servant à l’irrigation par goutte à goutte, perforent ce film et déposent même une dose d’engrais là où doit être repiqué ultérieurement le plant.

L’ingéniosité des artisans algériens n’a pas de limite à l’image de ceux d’Oued Souf à l’origine de la mise au point de pivots rotatifs qui ont permis l’essor de la culture de la pomme de terre dans le sud.

A ce titre, au-delà de la seule importation de matériel, ces artisans méritent toute l’attention des pouvoirs publics.

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