search-form-close
Après le discours de Gaid Salah : le dialogue de sourds continue entre le pouvoir et le peuple

Après le discours de Gaid Salah : le dialogue de sourds continue entre le pouvoir et le peuple

Très attendue, l’allocution prononcée par Ahmed Gaïd Salah ce lundi 20 mai à Ouargla n’a pas permis d’entrevoir un début de solution à la crise. Et pour cause, le général de corps d’armée ne cède rien sur sa solution constitutionnelle ni sur son attachement à l’élection présidentielle pourtant unanimement rejetée dans les conditions actuelles.

« La tenue des élections présidentielles mettra un terme à tous ceux qui tentent de faire perdurer cette crise. (Elle) permettra d’éviter de tomber dans le piège du vide constitutionnel et tout ce qui s’ensuivra comme dangers et dérapages aux conséquences désastreuses, ce qui exige des enfants dévoués de l’Algérie, jaloux de la notoriété de leur patrie et des intérêts de leur pays et sa place parmi les nations, d’adhérer à cette démarche décisive pour l’avenir du pays ».

On notera tout de même que Gaïd Salah parle de l’élection sans lui adjoindre une date, ni même de délai précis. Cela signifie clairement que le scrutin n’aura pas lieu le 4 juillet, faute de candidats et de quitus populaire, mais peu importe, il aura lieu à une date ultérieure sans passer par la phase de transition réclamée par la rue pour de meilleures garanties.

Une transition que tout le pays réclame chaque vendredi et que le chef d’état-major de l’ANP n’évoque dans ses discours que par le vocable épouvantail de vide constitutionnel porteur de dangers. Trois mois après le début du mouvement populaire, près de deux après sa première incursion dans la sphère politique, lorsqu’il a appelé le 26 mars à l’application de l’article 102, on ne peut pas dire qu’Ahmed Gaïd Salah n’est pas resté droit dans ses bottes. Dès le début, il avait clairement balisé les choses, pour lui-même et l’armée d’abord, en signifiant qu’il était hors de question de déborder le cadre constitutionnel.

 

Depuis, la vie nationale est rythmée par un chassé-croisé entre le peuple qui réclame vendredi une vraie transition et le chef de l’armée qui lui répond mardi qu’il partage ses revendications mais que les dispositions de la constitution étaient une ligne rouge. Tout le monde s’est quelque peu oublié dans ce dialogue de sourds jusqu’à ce que le pays se retrouve au bord du vide constitutionnel tant redouté.

Le report ou l’annulation de l’élection du 4 juillet est une certitude -elle n’a été évoquée ni par le chef de l’État par intérim dans son message aux étudiants dimanche ni ce lundi par le chef d’état-major- et un tel cas figure n’est pas prévu par la loi fondamentale, donc anticonstitutionnel. Le vide institutionnel n’est pas loin non plus.

Le mandat d’intérim d’Abderkader Bensalah expirera le 9 juillet et, au-delà, il n’aura aucune légitimité à la tête de l’État, ni lui ni son remplaçant s’il n’est pas dûment élu. Le vide constitutionnel, on y est presque.

À qui la faute ? Gaïd Salah pointe ceux qui s’obstinent à porter des revendications irrationnelles « comme le départ de tout le système ». Mais l’obstination est au moins partagée. C’est bien le chef d’état-major qui s’accroche à une élection sans candidats ni électeurs, rejetée tant par le peuple que par les fonctionnaires censés l’encadrer et la quasi-totalité de la classe politique, y compris les partis traditionnellement proches du pouvoir. Même après le report de la présidentielle du 4 juillet, le problème va demeurer le même : une élection avec le gouvernement Bedoui et l’administration actuelle sera rejetée.

Le chef d’état-major est aussi resté imperturbable dans sa résolution à ne pas s’impliquer directement dans le jeu politique. Son discours de ce lundi a été l’occasion pour livrer une réponse négative au trio Taleb-Ali Yahia-Benyelles qui a appelé à un dialogue direct entre l’armée et les représentants du mouvement populaire. Si dialogue il y aura, ce sera entre les « vrais » représentants du mouvement, et les institutions auxquelles ce même mouvement ne reconnaît aucune légitimité. L’impasse est presque totale.

  • Les derniers articles

close