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Bouteflika : « La continuité », qu’est-ce que cela pourrait être ?

Bouteflika : « La continuité », qu’est-ce que cela pourrait être ?

Plus que le cinquième mandat sur lequel certains d’entre eux se sont montrés hésitants, la « continuité » met tous les soutiens du pouvoir d’accord.

On ne sait toujours pas ce que le vocable signifie concrètement pour ceux qui l’ont mis à l’air du temps, mais on est déjà presque certain qu’il ne porte pas le sens qui, à première vue, est évident : la réélection du président Bouteflika en avril prochain.

Mais rendons d’abord à César ce qui appartient à César. C’est Djamel Ould Abbès, l’homme qui n’a que très peu été pris au sérieux, qui, le premier, a lancé l’idée en avril dernier. Une semaine après avoir appelé le chef de l’État à se représenter, celui qui était alors à la tête du FLN se ravisait presque en affirmant publiquement : « J’ai appelé à la continuité, pas au cinquième mandat ».

La reculade était presque passée inaperçue et même ceux qui l’avaient notée l’ont vite mise dans la case des légèretés de Ould Abbès tant la formule paraissait dénuée de sens.

Le cinquième mandat sera donc le tube de l’été, mais dès le milieu de l’automne, les premières incertitudes surgissent, nourries sans doute par les images montrant un président Bouteflika sérieusement amoindri par l’âge et la maladie. C’était le 1er novembre au cimetière d’El Alia. On change donc de disque à la hâte et, depuis, on ne parle plus que de « continuité ». Un concept qui pourrait cadrer avec plusieurs scénarios. 

Un cinquième mandat : plus que jamais incertain

Logiquement, la continuité signifierait la reconduction du président sortant pour un mandat supplémentaire. Mais le chef de l’État ne semble pas en mesure de rester cinq ans supplémentaires à la tête du pays. Les dernières images qu’on a vues de lui le confirment.

Le quatrième mandat, qui s’achève en avril prochain, était déjà celui de trop. Son activité est réduite au strict minimum. Il ne fait presque plus d’apparitions publiques, ne s’adresse plus directement à la Nation, ne réunit que rarement le Conseil des ministres et annule régulièrement des tête-à-tête avec des chefs d’État étrangers. Son état de santé pourrait même poser des soucis de protocole lorsqu’il devra effectuer des activités auxquelles il ne pourra échapper car inscrites dans la Constitution, comme la prestation de serment en cas de réélection.

Autant dire que les chances de le voir rempiler en avril prochain son infimes. C’est ce que confirme du reste le changement de cap subi de ses principaux soutiens qui se sont donné le mot pour ne plus parler de cinquième mandat.

Une succession dynastique : zéro chance

L’une des interprétations qui ont été faites du concept de continuité est celle de voir le président se faire remplacer par un membre de sa famille « biologique ». Plus clairement par un de ses frères.

Saïd, son conseiller, est celui qui était cité le plus, et pas seulement depuis qu’il s’est avéré que l’option du cinquième mandat est difficilement réalisable. En 2014 déjà, on parlait de l’éventualité d’une succession dynastique. Des comités de soutien à « la candidature de Saïd Bouteflika » avaient même été mis sur pied, mais c’était plus le fait d’opportunistes et de zélés que le fruit d’une injonction.

Officiellement, on ne connaît pas à Saïd Bouteflika de telles ambitions. Pas plus qu’à Nacer, l’autre membre de la fratrie dont les dernières apparitions publiques ont donné lieu à quelques interprétations farfelues. Rien dans l’attitude des membres du clan Bouteflika ne permet de déceler des velléités de succession dynastique.

Certes, rien ne l’empêche légalement, mais une telle option risque de rencontrer de sérieuses oppositions dans et en dehors du système.

Un successeur issu du cercle proche de Bouteflika : une option plausible

Les soutiens de Bouteflika, depuis qu’ils ont cessé de parler de cinquième mandat, mettent en avant unanimement la nécessité de la continuité de l’œuvre du président, donc la poursuite de l’application de son programme.

Cela, seul un homme issu de son cercle, qui a été aux affaires au plus haut niveau ces dernières années, peut le garantir. Beaucoup ont vite vu en Ahmed Ouyahia le profil idéal. Le SG du RND est un homme clé de la vie politique nationale de ces vingt dernières années. Ministre de la Justice, Premier ministre, chef de cabinet de la présidence et chef du deuxième parti en termes de représentation dans les assemblées. Le bilan de Bouteflika, c’est aussi le sien.

Abdelaziz Ziari, pourtant issu du FLN, ne voit que lui comme potentiel successeur. « Voilà un responsable politique qui a été pendant plus de dix ans chef du gouvernement du président Bouteflika qui a donc mis en œuvre son programme. On ne peut pas dire que nous avons réussi, que nous avons obtenu des résultats ces vingt dernières années et en même temps exclure les responsables qui ont œuvré à ça, ce serait totalement inconséquent. Cela fait partie de la logique et du bon sens si l’on s’inscrit dans une volonté de continuité, de consolidation de ce qui a été fait », répétait ce dimanche sur TSA l’ancien président de l’APN. Ouyahia est un homme à suivre de près. Mais il devra d’abord convaincre tous les autres au sein du pouvoir pour devenir l’homme du consensus. Ce qui est loin d’être gagné.

Report du scrutin et prolongation du mandat actuel : très probable  

La continuité sans cinquième mandat peut aussi signifier que le président Bouteflika reste en poste au-delà du 15 avril prochain sans avoir au préalable sollicité ce droit auprès du peuple. Plus clairement, son mandat actuel pourrait être allongé d’une ou deux années, ce qui signifie le report de l’élection présidentielle pour la même période.

À première vue, l’exercice semble compliqué, car il faudra d’abord amender la Constitution actuelle qui ne prévoit pas une telle éventualité. Néanmoins, c’est le plan sur lequel semblent se pencher les principaux soutiens du pouvoir. L’idée a été lancée par le chef d’un parti d’opposition, Abderrazak Makri, mais elle a été favorablement accueillie, pour ne pas dire adoptée par ceux de la majorité avec une célérité qui pose question.

La transition n’est plus un tabou pour le pouvoir, de même que le respect du calendrier électoral et la stabilité des institutions ont subitement cessé de constituer des lignes rouges. L’option du report de l’élection présidentielle est désormais plus que probable. Presque actée.

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