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Covid-19, variants, 3e vague, vaccination : entretien avec le Pr Belhocine

Covid-19, variants, 3e vague, vaccination : entretien avec le Pr Belhocine

Le Pr Mohamed Belhocine, membre du comité scientifique Covid-19 et président de la cellule d’investigation et de suivi des enquêtes épidémiologiques, est inquiet. En dépit de la situation épidémique liée au Covid-19, qui est stable avec moins de 100 cas positifs par jour, il met en garde contre la propagation des variants du Covid-19. Il n’exclut pas une troisième vague.

Quelle lecture faites-vous de la situation épidémiologique actuelle en Algérie et du relâchement général sur les mesures barrières ?

Effectivement on voit qu’il y a un relâchement sur toutes les mesures de prévention, un peu mieux respectées un moment donné.  Faut-il s’en réjouir ou tirer la sonnette d’alarme ?

Je préfère plutôt tirer la sonnette d’alarme et je peux expliquer pourquoi. Il est vrai que nous vivons une accalmie totalement vérifiée et remarquable dans l’évolution de l’épidémie de Covid-19.

Nous avons un nombre de cas (positifs) qui tourne autour de 100 cas par jour. Ceci est rassurant. Cette situation est-elle réellement rassurante sur le moyen et le long terme ? Probablement non.

Premièrement, parce que le nombre de cas déclarés ne signifie pas le nombre de cas infectés qui sont de l’ordre du double, voire le quadruple du nombre des cas déclarés. Un cas déclaré est un malade qui est allé se faire examiner parce qu’il a eu des symptômes. À côté de chaque cas qui a des symptômes, nous avons entre 1 et 4 cas qui n’ont pas développé de symptômes.

Et je vous parle de ces chiffres qui ont été étudiés pendant le développement du virus souche de la Covid-19. Or, nous avons chez nous aujourd’hui des variants, celui dit britannique et le variant dit nigérian.

| Lire aussi : Covid-19 : un spécialiste alerte sur le non-respect des mesures barrières

« Il est aussi établi que le virus britannique a un taux de mortalité plus élevé que le virus souche »

Justement en parlant des variants, on dit qu’ils se propagent rapidement. Or, trois semaines après leur apparition en Algérie, on ne voit pas cette vitesse de propagation. Comment l’expliquez-vous ?

Si vous vous rappelez les premiers temps de l’apparition de la pandémie dans les différents pays, effectivement vous pouvez rester plusieurs semaines avec une impression de calme, de cas pas très nombreux que nous arrivons à contrôler, de services hospitaliers qui ne sont pas débordés.

Mais il y a une augmentation exponentielle et ça monte très vite. Pendant une première période, on n’observe pas parce que les chiffres restent bas, mais brutalement à un moment donné, le nombre de cas infectés peut augmenter massivement et donc le nombre de nouveaux cas qui présentent des symptômes risquent d’augmenter aussi massivement.

Nous avons observé ces phénomènes-là lors des flambées à la fin du mois de Ramadan de l’année passée et des mois de novembre-décembre (2020). Les pays européens qui sont en train de vivre une troisième vague observent exactement la même chose.

En Italie, une région comme la Lombardie qui avait vécu une situation catastrophique l’année dernière (à la même période) est en train de revivre la même situation et peut-être pire.

Parce que ces variants ont la capacité de se propager plus rapidement, de toucher plus de gens que la souche originelle, d’une part. D’autre part, il est maintenant établi que des tranches d’âge plus jeunes peuvent être touchées, et il est aussi établi que le virus britannique a un taux de mortalité plus élevé que le virus souche.

En Algérie, les capacités de séquençage sont très faibles, d’où la difficulté de détecter les variants… 

Ce n’est un secret pour personne, les capacités de dépistage par PCR sont restées en deçà de ce qu’elles auraient dû l’être.

Et heureusement que nous avons la possibilité de suspecter grâce à la radiologie et le scanner thoracique. Évidemment, la capacité de séquençage est relativement limitée.

Le nombre de virus qui ont été identifiés des deux variants qui sont en circulation chez nous, ne signifie pas qu’il n’y a que ces cas.

Il y a probablement d’autres cas de ces variants en circulation mais comme on ne va pas faire le séquençage dans tous les cas où on fait un test PCR, quasiment impossible à réaliser, cela veut dire qu’il nous reste à être extrêmement vigilants.

| Lire aussi : Immunité collective des Algériens face au Covid : l’idée gagne du terrain

« Nous ne sommes pas à l’abri d’une troisième vague »

L’Algérie est-elle à l’abri d’une troisième vague ?           

Nous ne sommes pas à l’abri d’une troisième vague, l’unique élément qui nous permettrait de nous en protéger c’est le respect des mesures barrières.

Cela peut paraître une obsession mais ce sont les pays qui respectent les gestes barrières qui gèrent au mieux cette épidémie. Ensuite, il y a d’autres mesures techniques qui sont : 1- l’identification rapide et la prise en charge des cas ; 2- les enquêtes épidémiologiques pour l’identification des cas contact et leur isolement.

Quand on fait bien ce travail, on arrive à couper la chaine de transmission du virus. À Djelfa, les épidémiologistes, au début de l’épidémie, ont identifié sur dix-sept contacts onze nouveaux cas.

Ceci pour dire que si les enquêtes épidémiologiques sont bien faites, elles ne sont pas quelque chose de superflu et quelque chose d’absolument important dans le suivi de l’épidémie. Le troisième élément : c’est la vaccination.

Vous faites bien Pr Belhocine de parler de la vaccination qui a démarré mais à un rythme très lent. Qu’avez-vous à nous dire à ce sujet ?

Je pense que c’est un problème d’approvisionnement en vaccins. Nous ne sommes pas le seul pays au monde à vivre cette situation de difficultés d’approvisionnement.

Il y a une demande qui surclasse de très loin l’offre en vaccins, et donc il faut espérer que les vaccins commandés et pour lesquels l’Algérie a signé des contrats soient livrés à temps, de façon à accélérer la vaccination.

Notamment en vaccinant ceux qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire les sujets exposés en première ligne, les personnes âgées de plus 65 ans et les personnes avec des comorbidités.

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