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Discours de Bensalah : le pouvoir propose une « élection libre » sans les libertés

Discours de Bensalah : le pouvoir propose une « élection libre » sans les libertés

La nouvelle approche du pouvoir pour le règlement de la crise a été dévoilée mercredi soir par le chef de l’État par intérim. Abdelkader Bensalah a invité la classe politique et la société civile à engager un dialogue dans lequel les institutions de l’État, y compris l’ANP, ne seront pas partie prenante.

À première vue, il s’agit d’une avancée d’autant que le pouvoir, même s’il ne cède pas sur son attachement à la « solution constitutionnelle » et à l’organisation d’une élection présidentielle, s’engage solennellement à accepter tout ce qui sortira des discussions : les mécanismes d’organisation du scrutin, les garanties, la composante et le fonctionnement de l’instance électorale…

L’objectif et la promesse déclarés c’est d’arriver à organiser une élection propre et honnête par laquelle s’exprimera la réelle volonté du peuple. Néanmoins, l’appel risque d’essuyer la même fin de non-recevoir que ceux du 5 mai et du 6 juin si les autorités ne s’empressent pas d’annoncer des mesures concrètes d’apaisement.

Car le discours prononcé par le chef de l’État par intérim ne contient aucun des préalables réclamés par les différentes composantes de l’opposition et de la société civile, qui ont beau diverger sur des questions de forme et de fond mais restent unanimes à exiger que cessent d’abord le musellement et la restriction des libertés.

Même les partis des Forces du changement qui tiennent ce samedi une conférence décisive et auxquels les autres factions de la classe politique reprochaient de ne pas faire du respect des libertés un préalable indiscutable, se sont rattrapés par la voix du coordinateur de la conférence.

Abdelaziz Rahabi a insisté mardi dans un entretien à TSA sur la mise en œuvre de mesures d’apaisement, appelant le pouvoir à ne pas entraver l’action politique, à ouvrir les médias publics notamment la télévision et à cesser de harceler les manifestants.

Ces dépassements sont hélas une réalité indéniable et ce serait conclure un marché de dupes que de croire à la volonté du régime d’aller vers le changement en maintenant les pratiques qui ont fait son impopularité. Une élection libre et honnête ne peut s’accommoder de médias publics fermés à toutes les opinions sauf au discours officiel, de médias privés qui subissent quotidiennement des pressions comme TSA qui en est à sa troisième semaine d’un blocage qu’aucun service de l’État ne veut assumer, de l’arrestation d’acteurs politiques et de manifestants, de l’atteinte à la liberté de circuler des citoyens en bloquant l’accès à la capitale sans aucune base légale…

Les libertés sont en net recul par rapport à la situation d’avant le 22 février et les seuls acquis du hirak jusque-là sont l’empêchement du cinquième mandat et les poursuites engagées contre les hommes d’affaires et anciens hauts responsables impliqués dans des affaires de corruption.

Dans son discours de mercredi, Abdelkader Bensalah a même indirectement justifié le tour de vis qui touche les libertés en rappelant que l’exercice des droits doit « se faire dans le respect d’autrui et surtout dans le plein respect des Lois de la République et que leur expression ne soit pas détournées à des fins attentatoires à la stabilité de notre pays et à son unité nationale ».

Le pouvoir a néanmoins tout le temps de rectifier le tir et on aura déjà un aperçu de ses intentions à partir de la gestion sécuritaire et médiatique qu’il réservera aux marches de ce vingtième vendredi qu’on annonce imposantes. Une éventuelle persistance des manœuvres, des pressions et des arrestations condamnerait sa nouvelle offre au rejet même par la frange la moins radicale de la classe politique.

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