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Djamel Ould Abbes, un secrétaire général en quête de légitimité pour dompter ses adversaires

Djamel Ould Abbes, un secrétaire général en quête de légitimité pour dompter ses adversaires

Au FLN, pour s’exprimer en public, il faut désormais l’autorisation du Secrétaire général du parti. Aussi paradoxale qu’elle puisse paraître, la décision a été annoncée à partir du cimetière d’El Alia où Djamel Ould Abbes s’est déplacé, dimanche 4 mars, avec des cadres du FLN pour se recueillir sur la tombe de Larbi Ben M’hidi.

Ould Abbes veut faire du FLN de 2018 « une copie du FLN de 54 », a-t-il affirmé. Mais comment compte-t-il y arriver ? Par quel procédé ? Et surtout pourquoi une telle démarche ?

Un chef en quête d’une légitimité

Aujourd’hui, une chose est sûre : le successeur d’Amar Saadani veut faire taire toutes les voix discordantes au sein du FLN. Toutes sans exception, pour faire de sa parole la voix unique du FLN. « On ne pardonnera pas », a-t-il menacé, devant la presse, en s’adressant à ceux qui oseraient ne pas appliquer la nouvelle consigne.

Ould Abbes a les outils pour mettre en application sa nouvelle stratégie. La commission de discipline du FLN, qui a chômé depuis quelques années en dépit des divergences et des tensions qu’a toujours connues le parti, a été réactivée. Sept cadres ont déjà été entendus par cette instance. Deux autres ont été convoqués pour y comparaître cette semaine.

Ould Abbes, qui communique sur ces cas, souhaite que ces cadres servent d’exemple pour les autres contestataires. Avec un objectif : asseoir son pouvoir et éloigner la perspective d’une contestation qui couve depuis qu’il a été intronisé chef du parti.

Face à ses adversaires, Ould Abbes souffre d’un important déficit de légitimité. Le 22 octobre 2016, l’homme a été intronisé contre toute attente à la tête du FLN après la démission surprise d’Amar Saadani le jour même, à l’occasion de la réunion du Comité central. À l’unanimité, la salle a approuvé la désignation de Ould Abbes, sans toutefois cautionné le départ de Saadani. Ce dernier avait en effet soumis les membres du CC à un exercice périlleux : il a demandé à ceux qui sont favorables à son départ de « lever la main ». Aucune main ne s’est levée. Un cadeau empoisonné laissé à son prédécesseur.

Une légitimité auprès de la présidence

Dès le départ, Ould Abbes avait compris que sa nomination ne faisait pas l’unanimité au sein du parti. Il devait donc s’imposer. Sur ce plan, le Secrétaire général du FLN a procédé par étapes.

D’abord, il s’est positionné en « rassembleur », en lançant en grande pompe une initiative pour rapprocher les parties en conflit. Une initiative qui a fait long feu.

Des cadres du FLN avaient, dès le début, compris que le but de Ould Abbes était de gagner du temps avant les élections législatives et locales. Le concerné n’a d’ailleurs pas tenu longtemps dans son rôle de rassembleur. Très vite, il s’est mis à tirer sur les anciens dirigeants du FLN à l’image d’Abdelaziz Belkhadem et d’Amar Saadani.

Ensuite, Ould Abbes a tenté de trouver cette légitimité au sein du cercle présidentiel et plus précisément auprès de Saïd Bouteflika. Ce dernier est décrit tantôt comme « un ami », tantôt comme « un frère ». Une arme assez efficace pour affaiblir ses adversaires au sein du FLN. Ould Abbes s’est même improvisé porte-parole du frère du chef de l’État. Il a affirmé : Saïd « n’a aucune ambition présidentielle», le frère du président est « un homme de bonne famille ».

Des déclarations qui ont créé une certaine confusion au-delà du FLN : Ould Abbes était-il mandaté pour parler au nom du président et de son frère ? Y avait-il des messages politiques derrière ces déclarations ?

Retour à la pensée unique

Mais cette stratégie n’a pas réussi au chef du FLN. La contestation ne s’est pas calmée au sein du parti, à tel point que le comité central a été reporté à plusieurs reprises. Dans ce contexte, Ould Abbes a changé de stratégie. Depuis quelques semaines, il a commencé à hausser le ton, allant jusqu’à interdire à ses militants de parler.

À un an des élections présidentielles, le Secrétaire général du FLN décide d’une manière unilatérale qu’il est le seul habilité à participer aux débats qui agitent la scène politique. Les cadres et les militants ne sont plus autorisés à évoquer la présidentielle et le cinquième mandat. Pour bien se faire comprendre, il a trouvé la solution : la commission de discipline. Dernier à être convoqué : le puissant sénateur Abdelwahab Benzaïm, pour avoir demandé le départ de la ministre de l’Éducation nationale. Il a reproché à Benzaïm d’interférer dans les affaires du gouvernement.

Ould Abbes ne prend-il pas de risque en voulant mater l’opposition au sein de son parti ? Le FLN est connu depuis toujours pour être le fief de plusieurs courants politiques et idéologiques. Le parti qui a défendu des années durant la pensée unique au sommet de l’État a vécu depuis sa création au rythme des conflits, des idées et des intérêts.

« Il sait que le prochain comité central risque de lui être fatal. Il utilise la sanction pour affaiblir ses adversaires. Mais il se trompe de stratégie. Plus il va sanctionner, plus la contestation va monter », résume un haut cadre du parti. Le prochain Comité central dont la date n’est pas encore connue constituera sans aucun doute le premier test réel de la capacité de Ould Abbes à dompter le FLN.

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