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Drame de Djelfa : à la veille du procès, des zones d’ombre demeurent

Drame de Djelfa : à la veille du procès, des zones d’ombre demeurent

Des membres du personnel médical et administratif des trois hôpitaux à Djelfa seront jugés, demain mercredi 12 septembre, au tribunal de Aïn Ouassara dans le cadre de l’affaire de la jeune femme enceinte décédée suite à ce qui a été qualifié de « négligence ». Parmi les accusés figure le Dr Ouali, accusée de « négligence ayant entraîné la mort », de « non-assistance à personne en danger » et de « faux et usage de faux ». Dans cet entretien, Me Amine Sidhoum, l’un de ses avocats, revient en détail sur cette affaire qui recèle plusieurs zones d’ombre.

Le Dr Ouali est en détention depuis le 6 août dernier. Vous estimez cela abusif. Pourquoi ?

Le contenu du dossier ne mérite pas une mise en détention pour le Dr Ouali. On ne peut pas poursuivre quelqu’un pour non-assistance à personne en danger au moment où ils ne se trouvent pas au même endroit. Cela est également valable pour l’accusation relative à la négligence. En ce qui concerne le faux et usage de faux, le problème reste administratif et non judiciaire. Le Dr Ouali a envoyé le certificat médical le jour des faits à huit heures du matin (avant que le couple ne se présente dans la soirée, NDLR).

Le Dr Ouali a-t-elle envoyé un faux certificat médical pour justifier son absence ?

Une commission rogatoire a été envoyée par le juge à l’hôpital de Beni Messous. L’établissement hospitalier a soutenu qu’il n’a jamais délivré ce certificat médical. Mais dans le dossier, il n’y a aucune expertise (prouvant qu’il s’agit d’un faux certificat médical, NDLR). En droit, le faux ne se prouve pas via une commission rogatoire mais via une expertise si on veut éviter les erreurs. J’ajoute que le certificat n’a pas été envoyé en retard. Le directeur de l’hôpital pouvait donc faire une réquisition et mobiliser une autre personne.

Que s’est-il exactement passé ce jour-là selon l’ordonnance de renvoi que vous avez étudié ?

Une femme enceinte arrive à l’hôpital de Aïn Oussara, (le 23 juillet), vers 23 heures. Elle est examinée par une sage-femme. Celle-ci constate que (son col était ouvert) à deux doigts. Quand il s’agit de la première fois, cela veut dire que la femme enceinte accouchera dans huit à quatorze heures. On demande au couple de revenir le lendemain puisqu’elle ne devait accoucher que le lendemain et parce qu’il n’y avait pas de place. Furieux, le mari sort et l’emmène à Hassi Bahbah. Elle est encore examinée. Ils lui disent la même chose. Son mari l’emmène ensuite à Djelfa. Sur place, on lui dit qu’ils ne peuvent pas la prendre vu l’absence de place et on lui ajoute qu’il faut aller à la circonscription où ils résident.

Le couple est alors obligé de revenir vers Aïn Ouassara…

Ils reviennent à 4h15 à l’hôpital de Aïn Oussara. La jeune femme était dans un état critique. Elle avait fait des pics de tension et souffrait d’une hémorragie dans l’utérus et d’une hémorragie cérébrale. Elle est immédiatement transférée au bloc opératoire. Le médecin cubain est réquisitionné. Il estime impératif d’enlever l’utérus. Là, il constate qu’il n’y a ni bébé, ni placenta. Le personnel retrouve le nouveau-né dans la voiture sous le siège. Une petite fille qui était décédée.

Que signifient ces éléments ?

Quand on revient au rapport d’autopsie pratiqué sur le nouveau-né, on constate que le médecin était très clair. Au chapitre des lésions et traumatismes externes, il précise que le cordon ombilical était coupé et ligaturé à 10 centimètres de son émergence. Qui a effectué cet acte chirurgical ? Qui a coupé le cordon ? Et où est passé le placenta ? Est-ce que la victime a accouché chez une accoucheuse avant d’être évacuée vers l’hôpital quand la situation se serait compliquée ?

Que dit le rapport d’autopsie pratiquée sur la jeune femme ?

Il n’y a pas eu d’autopsie sur le corps de la jeune femme afin de définir les causes de la mort (intervenue trois jours après l’accouchement) et savoir si on ne lui avait pas donné par exemple des substances traditionnelles qui pourraient peut-être expliquer les pics de tension. C’est le juge d’instruction qui devait le faire. Je pensais également que le magistrat allait demander les relevés téléphoniques des personnes présentes avec la victime dont la mère, le frère et le mari pour localiser les endroits où ils étaient. Chose qui n’a pas été faite.

Ni la police judiciaire, ni le juge d’instruction n’ont soulevé ces points ? Est-ce que cela est dû à la pression populaire ?

Je pense que c’est un peu cela. Des manifestations et des mouvements de protestation ont apparemment eu lieu dans la région. Si on veut appliquer la loi, c’est une chose. Mais appliquer la loi selon les pressions populaires, c’est une autre paire de manches. L’autre anomalie dans ce dossier est liée au fait que les directeurs des hôpitaux se constituent partie civile. Dans un pays qui se respecte, les directeurs sont les premiers à être poursuivis avec la direction de santé publique (DSP) de la wilaya et le ministère qui est aussi responsable.

Pourquoi ?

Si on ne peut pas prendre en charge des malades fautes de lits et de moyens logistiques, les médecins ne sont pas responsables. Et a priori, il y avait un autre problème. Ce jour-là, il n’y avait que le médecin cubain.

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