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Entretien avec Abderrezak Makri : « Chakib Khelil veut se présenter à la présidentielle de 2019 »

Entretien avec Abderrezak Makri : « Chakib Khelil veut se présenter à la présidentielle de 2019 »

NEWPRESS

Abderrezak Makri est le président du MSP.

Vous avez repris la présidence du parti après six mois. Comment l’aviez-vous retrouvé ?

Du point de vue structurel et de la pensée qui a été votée au 5e congrès et que je représente, je l’ai retrouvé comme je l’ai laissé. Je l’ai retrouvé soudé et aussi apte à continuer le chemin et la résistance politique dans tous les domaines.

Des médecins résidents ont été tabassés par les services de l’ordre le 3 janvier. Vous avez dénoncé la répression. Quelle lecture faites-vous de cette violente réaction ?

On était le premier parti à réagir quelques minutes après la répression. D’abord, ces turbulences sur le front social, qui ne concernent pas seulement les médecins, prouvent que ce que nous avons prédit est en train de se réaliser. C’est-à-dire les conséquences de la crise économique, de la mauvaise gouvernance et des restrictions en matière de libertés. Quant à la répression, celle-ci démontre la fragilité des autorités dans la gestion de cette crise, il fallait privilégier le dialogue et la prise en charge des aspirations des médecins parce qu’elles sont tout à fait logiques. Au lieu de cela, ils ont choisi la violence.

Que traduit cette violence ?

Lorsqu’il s’agit d’Alger, les autorités perdent le contrôle. Marcher à Alger est périlleux pour les autorités. À mon sens, les autorités vont rentrer dans une situation de panique parce qu’elles savent très bien qu’il y aura des turbulences au sein du front social. Et si elles n’arrivent pas à contrôler la situation, il va y avoir un effet boule de neige.

Le jour même, le FLN organisait une tripartite parallèle. Selon vous, elle prouve la profondeur de la crise que vit le pays. Comment ?

Cela était inimaginable. Selon les résultats des élections truquées, le FLN est la première force dans cette alliance gouvernementale. Ce qui aurait été logique est de discuter et parler avec le Premier ministre (de cette tripartite). Ce qui aurait été logique aussi est d’imposer ses idées et sa façon de voir cette tripartite au sein du Parlement puisqu’il a la majorité. Pourquoi faire un travail parallèle ?

Comment expliquez-vous cela ?

On est en dehors des normes de l’action politique en Algérie. Ce n’est pas un pays où il y a un ancrage de l’esprit démocratique, l’action et de la tradition démocratique, le FLN n’use pas de la démocratie pour s’imposer dans l’échiquier politique. Son secrétaire général, Djamel Ould Abbès, dit souvent : je suis l’État. Maintenant, il y a beaucoup d’États, (au sein de l’État). Lui représente une tendance au sein de l’État. Donc, il répond à Ahmed Ouyahia par une tripartite parallèle. Ça n’a rien de politique ou de démocratique.

Dans ce contexte, une polémique a éclaté entre Chakib Khelil et le RND…

Cette polémique est liée à l’échéance de 2019 (l’élection présidentielle) tout simplement. Chakib Khelil veut se présenter.

Chakib Khelil voudrait donc se porter candidat aux élections ?

Tout ce qu’il fait ne peut s’expliquer que par ses ambitions pour la présidentielle. Pourquoi une personnalité politique voyage dans toutes les wilayas ? Pourquoi présente-t-elle un programme ? Pourquoi va-t-elle parler avec les citoyens et critiquer d’autres personnalités politiques ? Ce sont les agissements et le comportement d’une personne qui veut se présenter à des échéances politiques.

Pensez-vous qu’Ouyahia le dérange et constitue un obstacle pour lui ?

Ahmed Ouyahia le dérange parce qu’il est pour le moment le mieux placé si Bouteflika ne se représente pas pour un cinquième mandat

Est-ce que le cinquième mandat est une option probable ?

C’est une option très probable. Il y a maintenant une lutte au sein du pouvoir pour 2019. Certaines personnalités sont entrées en course comme Ahmed Ouyahia et Chakib Khelil. Mais au sein du pouvoir, il y a ceux qui ne sont pas d’accord avec Ouyahia et ils sont à mon sens plus puissants. Le problème de ce camp est qu’il n’a pas de candidat prêt. Ceci donne beaucoup plus de chance au cinquième mandat. Mais il faut bien penser que si Bouteflika sera en mesure de décider, il n’acceptera jamais qu’il y ait un autre président tant qu’il est vivant.

Fin décembre, des manifestations ont eu lieu en Kabylie et à Batna pour protester contre le rejet d’un amendement sur le tamazight. Quelle est la position de votre parti sur la généralisation de l’enseignement de cette langue ?

D’abord, nos députés ont voté pour l’amendement. Ensuite, j’ai personnellement présenté une proposition scientifique. Je pense qu’il faut être réaliste. Pour généraliser une langue, il faut passer par des étapes. La première est culturelle. La deuxième est sociale (l’incarnation de cette spécificité culturelle par une frange importante de la société). La troisième étape est légale (qui a une relation avec la législation). La quatrième étape est académique. Lorsqu’on parle de la langue, il faut d’abord œuvrer à ce que cette langue ait les caractéristiques d’une véritable langue. Nous avons le kabyle, le chaoui, le mozabite, le tergui. C’est-à-dire que nous avons plusieurs parlers mais il faut un tamazight « classique ».

Le tamazight est déjà enseigné dans plusieurs wilayas…

Ce sont des actions politiques. Ce ne sont pas des actions scientifiques et académiques. On répond à des pressions.

Quelle graphie faut-il adopter pour le tamazight ?

Pour nous, c’est les lettres arabes ou le tifinagh. Pas le latin. Qu’est-ce qu’on a à voir avec eux. On ne veut pas que certains utilisent tamazight comme cheval de Troie pour l’intérêt de la langue ou de la culture française. C’est notre droit de refuser cela. D’autres utilisent aussi l’arabe pour les mêmes objectifs.

Yennayer a été consacré comme journée fériée et chômée. Se réjouit-on de cette décision au MSP ?

C’est une étape. C’est une spécificité culturelle qui est représentée par une frange très importante de la société qui a le droit d’arriver à cet acquis. Des gens ont tendance à nous coller cette étiquette d’un parti hostile au tamazight. Il faut voir les positions officielles du parti à ce sujet. On est des musulmans. On n’a aucun problème avec les langues qui sont un don de Dieu. Notre religion nous interdit le racisme.

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