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Le Maroc et les nouveaux amis arabes d’Israël face à leur gros mensonge

Le Maroc et les nouveaux amis arabes d’Israël face à leur gros mensonge

Les responsables palestiniens, toutes tendances confondues, avaient mis en garde contre les retombées des accords établis à partir de l’été 2020 entre Israël et de nombreux pays arabes.

Contrairement à ce qu’affirmaient les promoteurs de la normalisation, les Palestiniens avaient estimé que les accords n’allaient pas servir la paix. Et le temps leur a donné raison au bout de seulement quelques mois.

Depuis une semaine, l’enclave de Gaza, déjà soumise à un blocus étouffant depuis près de quinze ans, est une nouvelle fois sous le feu des bombardements de l’aviation israélienne.

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Les images qui tournent en boucle dans le monde entier sont insoutenables. Parmi la centaine de victimes déplorées côté palestinien, figurent, comme à chaque agression, de nombreux enfants.

La scène de l’effondrement de la tour Burj Al Shourok est affreuse. Dans les villes où cohabitent juifs et arabes israéliens, les seconds sont agressés jusque dans leurs maisons et lynchés par les premiers, et la police laisse faire.

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À l’origine de cette énième agression, une nouvelle provocation des autorités israéliennes qui ont pris d’assaut la mosquée d’Al Aqsa, troisième lieu saint de l’Islam, et entrepris d’expulser des contingents supplémentaires de Palestiniens de leurs habitations pour poursuivre leur politique de colonisation.

La réalité est là, indéniable : l’agression de ce mois de mai 2021 est au moins aussi atroce que les précédentes, et la colonisation, qui rend de plus en plus illusoire la perspective d’une paix juste, se poursuit à une cadence plus soutenue qu’avant les accords de normalisation. À quoi donc celle-ci a-t-elle servi ? À rien, sinon à enhardir davantage l’occupant israélien et à renforcer son sentiment d’impunité.

Des promesses soufflées par les bombardements israéliens

Ce n’est pas, pourtant, ce que prédisaient les dirigeants des Émirats arabes unis, de Bahreïn, du Soudan et du Maroc lorsqu’ils signaient tour à tour les accords d’Abraham entre août et décembre 2020 sous l’égide du président américain Donald Trump.

Ces quatre pays arabes s’ajoutaient aux trois autres États de la région qui avaient reconnu officiellement l’État d’Israël, l’Égypte, la Jordanie et la Mauritanie. Cette dernière a toutefois rompu en 2010 avec Tel-Aviv les relations établies en 1999 par le président Mouaouiya Ould Taya.

Le Maroc n’a jamais caché que sa reconnaissance d’Israël s’inscrivait dans « une dimension patriotique », dans le cadre de l’accord triangulaire prévoyant aussi la reconnaissance par les États-Unis de la marocanité du Sahara occidental. Ses responsables s’étaient toutefois défendus d’avoir sacrifié la cause palestinienne pour leurs intérêts dans le dossier sahraoui.

« Nous avons des principes et un attachement vis-à-vis de la question palestinienne. Et nous avons des atouts et des canaux qui servent la paix dans la région : personne d’autre ne dispose de l’expérience de cohabitation entre juifs et musulmans que nous avons », déclarait le ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita au lendemain de la conclusion de l’accord.

Plus explicite, le chef de la diplomatie marocaine affirmait que la déclaration conjointe entre son pays, les États-Unis et Israël « constituait un appui considérable aux constantes nationales concernant la question du Sahara marocain et la cause palestinienne ».

Le roi Mohamed VI allait aussi continuer à porter la cause palestinienne en sa qualité de président du comité Al Qods, avait-on entendu.

Le prince héritier des Émirats, Mohamed Ben Zayd (MBZ) considéré comme le chef de file côté arabe des accords d’Abraham, s’était vanté d’avoir, en échange de la normalisation, « stoppé » l’annexion d’une partie de la Cisjordanie par Israël, considérée à l’époque comme « imminente ».

Ce qui n’était pas tout à fait vrai puisque la déclaration américaine évoquait seulement une « suspension ». À l’annonce  de l’accord entre Israël, Bahreïn et les Émirats, le président égyptien Abdelfatah Sissi, dont le pays entretient des relations avec Israël depuis plus de 40 ans, s’en était félicité, saluant une étape qui  « vise à consolider la stabilité et la paix au Moyen-Orient et qui permettra de trouver une solution juste et permanente à la cause palestinienne ».

Toutes ses promesses viennent d’être soufflées par les bombardements israéliens, comme le sont les édifices de la bande de Gaza.

Un bradage sans contrepartie

En revanche, les Palestiniens, qui divergent sur bien des questions,  ont affiché une rare entente pour dénoncer les accords et crier à la « trahison ».

L’Autorité palestinienne avait dénoncé une « trahison et une agression contre le peuple palestinien, dans l’objectif de souffler l’Initiative de paix arabe, les décisions des sommets arabes et islamiques, la légitimité internationale et de négliger les droits et les valeurs sacrées des Palestiniens ».

« Merci de ne pas nous rendre service. Nous ne sommes les feuilles de figuier de personne », avait lancé Hanane Achraoui, de l’OLP.

Le mouvement Fatah en avait conclu que les Émirats arabes unis  « renoncent à leur devoir religieux, national et humanitaire en faveur de la cause palestinienne », tandis que Hamas, qui se trouve aujourd’hui dans la ligne de mire de l’armée israélienne, évoquait « un coup de couteau perfide » contre le peuple palestinien.

À peine quelques mois après, les appréhensions des différentes factions palestiniennes s’avèrent fondées.

Ce qui se passe en ce moment dans la bande de Gaza et dans les territoires occupés démontre que les accords n’ont pas apporté la paix ni une perspective de libération pour la Palestine et met les signataires arabes des accords d’Abraham, peut-être dans la gêne, mais assurément devant leurs responsabilités historiques et surtout face à leur gros mensonge. Ceux qui avaient dénoncé une « normalisation » et non « un accord de paix » n’ont pas eu tort.

Parler de « bradage » sans contrepartie de la cause palestinienne n’est pas erroné non plus. Les Arabes ont toujours rejeté l’offre d’Israël de se retirer des territoires occupés en 1967 contre sa reconnaissance. Une reconnaissance que certains d’entre eux lui offrent aujourd’hui sans un centimètre de terre.

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