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Les malades non-Covid victimes collatérales de la flambée du Covid-19 en Algérie

Les malades non-Covid victimes collatérales de la flambée du Covid-19 en Algérie

La flambée du Covid-19 qui touche l’Algérie depuis plusieurs jours se traduit sur le terrain par la hausse du nombre de décès et des cas de contaminations, et la fermeture des services dédiés au traitement des autres malades non Covid-19. La situation est particulièrement difficile à Alger, la wilaya la plus touchée par la Covcid-19.

Dans une note de service datée du 24 novembre, le chef de service de chirurgie pédiatrique du CHU Nafissa Hamoud (ex Parnet) décidait que « la prise en charge des urgences chirurgicales est suspendue jusqu’à nouvel ordre ».

Cette note a fait réagir le Dr Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) qui l’a postée sur son compte Facebook. « En dehors du fait que ce genre de note de service relève de la compétence de l’autorité administrative de l’établissement, même dans une structure hospitalière privée, cette décision extrême apporte encore une fois la preuve de la désorganisation et du cafouillage qui caractérisent la gestion de la crise sanitaire » marquée la pandémie de la Covid-19, a critiqué le Dr Merabet dans un commentaire accompagnant ladite note.

Contacté par TSA, le Dr Merabet livre sa réflexion face à une pratique devenue courante, avec la flambée du Covid-19 qui met les hôpitaux en situation de saturation.

« Ce n’est pas une première (fermeture d’un service non Covid), puisqu’il y a d’autres services qui ont connu la même décision », affirme-t-il. Selon le Dr Merabet, par ce genre de décision, « on est en train de fermer la porte devant des urgences médico-chirurgicales, en réorientant les malades vers d’autres établissements qui sont eux-mêmes déjà débordés avant même la survenue de la Covid ».

« Ils le sont encore plus depuis », renchérit le praticien en faisant part des « capacités limitées » des autres services de chirurgie infantile, que ce soit pour les urgences ou bien pour les interventions programmées. « Ce sont des capacités assez limitées et qui ne sont pas extensibles à souhait », alerte le professionnel de santé.

« Nous sommes dans une organisation qui ne peut pas répondre aux besoins ni accompagner les situations de besoins », alerte encore le Dr Merabet. La suspension des urgences chirurgicales touche également le service de neurochirurgie de l’EHS Aissat Idir à Alger, déplore encore le Dr Merabet.

« L’EHS Aissat Idir (hôpital spécialisé dans la neurochirurgie) a fermé ses portes à la face des malades qui se présentent pour des urgences de neurochirurgie, parce que tout simplement, il a été décidé de l’ériger en hôpital spécial Covid », explique notre interlocuteur.

Pour la prise en charge de l’épidémie de Covid, le Dr Merabet préconise de dégager des surfaces tout en les dotant de moyens et les « homologuer » pour la prise en charge de la majorité des malades Covid qui n’ont pas besoin de lits de réanimation.

Il demeure entendu qu’un minimum de commodités est nécessaire. « On aurait pu le faire depuis le début, et malgré qu’aujourd’hui, la situation est en train de se dégrader à vue d’œil, mais par rapport à cette décision (installer des hôpitaux de campagne) les autorités sont encore en train de réfléchir. On ne comprend pas toute cette lenteur et ce manque de réactivité », tempère le Dr Lyes Merabet.

Mercredi, le Pr Mustapha Khiati, président de la Forem, avait sonné lui aussi l’alerte. « On assiste comme en mars dernier à une suspension des interventions chirurgicales et des services qui ne vont plus assurer leurs activités, je cite essentiellement les malades chroniques », s’est-il inquiété dans un entretien à TSA.

L’exemple à suivre de l’EHU Oran

De son côté, Dr Mohamed Bekkat Berkani, président du Conseil de l’Ordre des médecins propose de dédier des espaces pour la prise en charge des cas Covid afin de laisser la place dans les hôpitaux aux situations d’urgences chirurgicales et pour la prise en charge des autres maladies chroniques.

« Certains syndicats de médecins ont suggéré la Safex, pourquoi pas ? », acquiesce ce membre du comité scientifique de suivi de la Covid en Algérie. « Le Covid demande des sources d’oxygène et des sources de réanimation. Or, si vous prenez toutes les sources de réanimation et d’oxygène qu’il y a dans les hôpitaux, il n’en restera pas beaucoup pour les urgences médico-chirurgicales », explique le Dr Bekkat Berkani.

Selon ce membre du comité scientifique de suivi de l’épidémie du Covid-19, les urgences chirurgicales des hôpitaux ne doivent souffrir de report, d’autant que les malades ont eux aussi besoin de sources d’oxygène.

Le ministre de la Santé Abderrahmane Benbouzid a déjà dit non aux hôpitaux de campagne, estimant qu’ils sont difficiles à gérer, et que les capacités hospitalières sont suffisantes pour prendre en charge l’ensemble des malades.

Le bon exemple est donné par l’EHU Oran dont les responsables ont aménagé un hôpital attenant (le Nedjma) pour accueillir les malades Covid et permettre ainsi aux autres services de l’EHU de continuer à fonctionner sans interruption.

« Au début, durant la première vague (de l’épidémie), tous les services prenaient en charge les cas Covid, et pratiquement nous avions relégué au deuxième rang les autres pathologies. Aujourd’hui, avec le temps et l’expérience et la nouvelle organisation qu’on a lancée, nous avons concentré tous nos malades (Covid) dans un seul établissement dédié uniquement au Covid », explique le Pr Salah Lellou chef de service Pneumologie à l’EHU Oran, contacté par TSA.

Une expérience à laquelle beaucoup de praticiens ont appelé et qui devrait être généralisée pour que les malades non-Covid ne deviennent pas des victimes collatérales de la flambée du Covid-19 qui touche l’Algérie.

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