Saada Arbane, la femme qui accuse Kamel Daoud de s’être inspiré de son histoire personnelle pour écrire son roman « Houris », a déposé une nouvelle plainte en France contre l’écrivain franco-algérien. Cette fois, c’est pour diffamation que Kamel Daoud est poursuivi.
Le roman Houris a été sacré prix Goncourt en octobre 2024. L’œuvre a comme trame de fond le drame du personnage principal, Aube, qui a échappé, à six ans, à une tentative d’égorgement par les terroristes pendant la décennie noire en Algérie dans les années 1990. Elle en a gardé de graves séquelles, dont une longue cicatrice au cou et la perte de la voix.
L’écrivain a présenté son œuvre comme une « fiction », mais une femme, Saada Arbane, de la région de Tiaret, dans l’Ouest de l’Algérie, a reconnu son histoire. « Aube », c’est elle, a-t-elle soutenu, révélant qu’elle a raconté son drame à la psychiatre qui la suivait et qui n’est autre que l’épouse de Kamel Daoud. Elle a assuré qu’elle n’a jamais donné son accord pour que ce qu’elle a vécu soit raconté dans un roman.
Soutenue par l’organisation nationale des victimes du terrorisme, Mme Arbane a déposé plainte devant le tribunal d’Oran en novembre dernier. « L’éthique veut qu’on ne peut construire sa gloire sur le malheur des faibles. Kamel Daoud a construit sa gloire sur le malheur de Saada. Il a étranglé une deuxième fois la voix dans la gorge de ma cliente », a accusé son avocate Fatma-Zohra Benbraham le 21 novembre en conférence de presse à Alger. Une autre plainte a été déposée contre l’écrivain simultanément et devant la même juridiction au nom de toutes les victimes du terrorisme.
Saada Arbane dépose une troisième plaine contre Kamel Daoud, la deuxième en France
« Cette jeune femme malheureuse clame que c’est son histoire. Si je peux comprendre sa tragédie, ma réponse est claire : c’est complètement faux », s’est défendu l’écrivain dans le journal Le Point.
En février dernier, la femme a déposé plainte contre Daoud en France, devant le tribunal judiciaire de Paris, pour non-respect de sa vie privée. Elle réclame 200.000 euros de dommages et intérêts. Naturalisé Français en 2020, Kamel Daoud réside en France.
Sa réaction à cette plainte lui a valu de nouvelles poursuites. Dans une interview au Figaro le 3 avril dernier, il s’est offusqué du fait que, selon lui, « la France ne peut même pas protéger Kamel Daoud en France, à Paris, et ne peut rien pour Boualem Sansal en Algérie ».
Saada Arbane poursuit Kamel Daoud pour diffamation
« C’est une démonstration de force : Alger peut déposer une plainte contre Kamel Daoud en France ; la France ne peut même pas envoyer son avocat à Alger », a-t-il ajouté en allusion à la détention en Algérie depuis novembre dernier de l’écrivain également franco-algérien Boualem Sansal.
Saada Arbane a déposé plainte pour diffamation. Elle n’est pas nommée dans l’entretien, mais elle « n’a pas besoin d’être citée, elle est parfaitement identifiable », a expliqué son avocat, Me Bourdon.
Selon le journal Le Point, pour lequel Daoud travaille comme chroniqueur, l’écrivain franco-algérien a reçu ce lundi 5 mai par huissier une citation directe à comparaître devant la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, spécialisée dans les affaires de presse.
Le directeur de la publication du Figaro, Marc Feuillée, est lui aussi poursuivi, selon la même source, précisant qu’une première audience est prévue le 13 juin prochain.
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