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« On va avoir encore des grossesses non désirées, des avortements clandestins… »

« On va avoir encore des grossesses non désirées, des avortements clandestins… »

Myriam Belala est présidente de SOS femmes en détresse.

Elle revient dans cet entretien sur le rejet par les députés de la commission de la santé de l’APN des dispositions élargissant le champ d’interruption thérapeutique de grossesse contenues dans le projet de loi sur la santé.

Les dispositions liées à l’avortement viennent d’être retirées du projet de loi sur la santé. Une réaction ?

En réalité, je n’ai aucun espoir dans cette assemblée nationale pour qu’elle apporte une modification ou des nouveautés dans ce domaine.

On a vu ce qui s’est passé lors de l’examen des amendements du Code pénal en ce qui concerne les violences contre les femmes. C’était terrible. Cela dit, même durant la décennie noire, les femmes violées par les terroristes n’avaient pas la possibilité de recourir à un avortement.

Le ministre de la Santé avait pourtant signé un décret pour le permettre. Sauf que le HCI (Haut-commissariat islamique) avait fait une fatwa disant que ces femmes n’avaient pas besoin de l’avortement puisqu’elles ont été violées par des musulmans. Aujourd’hui, c’est encore pire. L’idéologie islamiste est largement répandue.

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Le rejet de ces dispositions élargissant le champ de l’avortement thérapeutique était-il prévisible ?

Bien sûr ! Personnellement, ce qui m’aurait étonné aurait été le maintien de ces dispositions. Nous avons déjà constaté qu’il y avait beaucoup de violences verbales lorsqu’il s’agit de ce genre de sujets.

À chaque fois qu’une question liée aux droits des femmes est à l’ordre du jour, ils mettent en avant la religion. Très peu de députés sont ouverts au dialogue. Ils sont toujours réfractaires à tout ce qui peut toucher à la femme, surtout l’avortement. Ils ne le conçoivent même pas dans les cas de viols. Ils sont très islamisés.

Je pense qu’il ne pourra rien y avoir encore tant que l’assemblée est composée majoritairement d’islamo-conservateurs.

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Une montée de l’intolérance au sein de la société ?

Absolument, il n’y a pas eu une grande évolution concernant les femmes. On fait toujours un pas en avant puis un autre en arrière. C’est extrêmement difficile. Si à chaque fois le président doit légiférer par ordonnance, ce n’est pas toujours acquis.

L’idéologie islamiste est ancrée dans la société aujourd’hui. Et ces députés sont issus de la société. En plus, certains d’entre eux n’ont aucun parcours politique et aucune conscience citoyenne. Alors que l’idéologie islamiste a pris beaucoup de chemin, les démocrates forment aujourd’hui une minorité dont les voix sont étouffées.

D’ailleurs, certains députés sont parfois pour (ce genre de dispositions, NDLR) mais ils ont peur de choquer la société.

Quelles seront selon vous les conséquences de ce rejet s’il venait à être validé lors de la séance plénière consacrée au vote de la loi sur la santé ?

On va avoir encore des grossesses non désirées, des avortements clandestins, des femmes vont parfois mourir ou avoir de grands problèmes de santé, et des enfants seront encore abandonnés. On va continuer à assister à des drames.

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