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Où sont passés les soutiens de Bouteflika ?

Où sont passés les soutiens de Bouteflika ?

Alors que des marées humaines ont déferlé vendredi dans au moins 40 wilayas du pays pour dénoncer la candidature de Bouteflika, les défenseurs du cinquième mandat se confinent dans le silence.

24 heures après les marches imposantes du 22 février, on n’a pas encore entendu un seul soutien du président. Les quatre partis de l’Alliance, qui se sont adonnés à une surenchère en règle dans leur soutien au chef de l’État, qu’ils ont « supplié » des mois durant de se représenter et de continuer son œuvre, ne réagissent pas à la remise en cause dans la rue de l’option qu’ils ont dit défendre par « conviction ».

Les autres petits partis qui ont fait du soutien au pouvoir leur raison d’exister ne soufflent pas mot non plus, pas plus que les organisations dites de masse qui, avant ce vendredi historique, rivalisaient de formules pour dire leur fidélité au « père moudjahid ».

Il y a à peine quelques jours, l’organisation des agriculteurs, l’UNPA, lui promettait 5,4 millions de voix, tandis que le patron de la Centrale syndicale le comparait à Nelson Mandela. Le FLN, qui ne ratait aucune occasion pour s’approprier le candidat Bouteflika, a fièrement annoncé la veille même de la sortie du peuple dans la rue, avoir collecté 500 000 signatures. Le même jour, Abdelmalek Sellal, le directeur de campagne du président candidat, parlait de millions de parrainages.

Puis la surenchère a subitement pris fin. La sortie de Sellal, qui a réuni jeudi les directeurs de campagne au niveau des wilayas, est la dernière des soutiens du Bouteflika. Ces derniers avaient déjà étrangement adopté un profil bas lorsque le portrait du président a été décroché et piétiné par la foule mardi dernier à Khenchela. Il y a seulement quelques semaines, un tel geste aurait relevé du sacrilège et aurait valu à ses auteurs les foudres unanimes des partisans de la « continuité ».

On sait maintenant d’expérience que sur ce genre de question, les partis et organisations proches du pouvoir n’ont aucune marge de liberté. La simultanéité de leur silence ou de leur montée au créneau et la similitude des éléments de langage qu’ils utilisent cachent mal leur unique mode de fonctionnement : l’injonction venue d’en haut.

Dans les derniers mois de l’année 2018, lorsque l’option de la candidature de Bouteflika faisait encore objet de débat en haut lieu, les quatre partis de l’Alliance et les autres avaient fait montre d’une discipline de fer, parlant d’abord de continuité, puis de conférence nationale et enfin de cinquième mandat. Ils avaient agi en fonction des instructions. Ils ne s’en sont du reste jamais cachés.

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C’est cette injonction justement qui semble faire défaut en ce lendemain de colère populaire. S’ils en ont reçu, ce ne peut être que celle qui leur recommande de temporiser.

Si rien ne contraint les partis et autres organisations à s’exprimer, même si moralement leur silence ne passe pas, ce n’est pas le cas des organes de presse. Une chaîne de télé ne peut pas cesser la diffusion et un journal quotidien est tenu d’être sur les étals tous les matins. Un grand malaise se dégage de la teneur des éditions de ce samedi des journaux qui ont jusque-là pris fait et cause pour le cinquième mandat.

Si les quotidiens publics ont carrément zappé les marches d’hier, ceux du secteur privé mais proches du pouvoir en ont parlé mais d’une manière tronquée, rapportant unanimement que les Algériens sont sortis dans la rue pour réclamer des « réformes », du reste « promises par le président Bouteflika dans sa dernière lettre-programme ».

Des éléments de langage similaires qui démontrent que la lignée a été dictée par la même partie. On retiendra aussi qu’aucun journal ou chaîne de télé qui, il y a encore quelques jours faisaient ouvertement campagne pour le cinquième mandat, n’a dénoncé la montée au créneau contre le président ou même le piétinement de son portrait.

Tout ce beau monde tient le bâton par le milieu, en attendant des instructions claires. Lesquelles instructions ne tarderont pas à tomber et quelles qu’elles seront, elles seront suivies à la lettre et il ne serait pas étonnant de retrouver en première ligne des pourfendeurs de Bouteflika ses soutiens d’hier.

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