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Report de la présidentielle : un décret qui suscite des interrogations

Report de la présidentielle : un décret qui suscite des interrogations

Le président Bouteflika a juré dans sa lettre aux Algériens du 11 mars qu’il ne voulait pas de cinquième mandat. « Il n’y aura pas de cinquième mandat et il n’en jamais a été question pour moi », a-t-il affirmé.

Son aveu a résonné comme un coup de tonnerre dans le ciel d’Algérie puisqu’il est intervenu après la convocation du corps électoral, l’annonce de sa candidature suivie de l’installation de son comité de campagne et du dépôt de son dossier devant le Conseil Constitutionnel. Un dépôt qu’il n’a pas effectué personnellement mais par le biais de son directeur de campagne qui a d’ailleurs changé. La démarche de Zaalane avait suscité un débat juridique sur sa légalité. Le coup de tonnerre a été suivi d’un déluge de questions qui s’est estompé sous l’effet des manifestations. Qu’il ait désiré ou non ce mandat, les manifestants exigent le départ du système dont il est l’incarnation.

À quelques heures d’un nouvel acte de la contestation se révèle un scénario maladroit qui confirme l’aveu présidentiel, trempé dans l’encre du journal officiel. Le 23 février, la veille de son départ pour Genève le chef de l’État a signé un décret permettant de transférer vers d’autres chapitres près de la moitié du budget prévu pour la campagne électorale. Il s’agit du décret présidentiel n° 19-75 du 18 Joumada Ethania 1440 correspondant au 23 février 2019 portant création de chapitres et transfert de crédits au sein du budget de l’État. En quatre articles, le texte a été publié au JO numéro 16 du 13 mars.

Dans son article 1, il stipule : « Il est créé au sein des nomenclatures des budgets de fonctionnement du ministère des affaires étrangères, du ministère de la justice, du ministère de l’intérieur, des collectivités locales et de l’aménagement du territoire et du ministère de la communication, les chapitres énumérés à l’état annexé au présent décret ». L’article numéro 2 annule « sur 2019, un crédit de vingt milliards quatre cent soixante-dix millions de dinars (20.470.000.000 DA), applicable au budget des charges communes et au chapitre n° 37-03 « Frais d’organisation des élections ». L’article 3 affecte aux ministères cités l’intégralité du montant.

La loi de finances avait prévu un budget global de 50 milliards de dinars. Une partie a pu en être consommée dans la révision des listes électorales, la confection des cartes d’électeurs, les frais de communication et peut-être le financement d’autres opérations.

S’agissant d’un décret signé le 23 février, il est clair que le contenu en avait été décidé bien avant et connu d’au moins le Premier ministre, le ministre des Finances, le ministre de l’Intérieur, en charge de l’organisation des élections, et les ministres concernés par la réaffectation du budget. Signé le 23 février mais publié le 13 mars. Des éditions du JO ont pourtant paru le 24 février, le 28 février et le 11 mars. Le décret a donc été mis sous le boisseau pendant trois semaines et publié en même temps que la décision n° 07/D.CC/19. Signée le jour même de sa parution, la décision dévoile la liste des 21 candidats ayant déposé leur dossier de candidature au scrutin programmé au 18 avril.

Le délai de trois semaines a permis de dissimuler la véritable intention de Bouteflika aux partisans du 5e mandat à tout prix. Le chef de l’état-major de l’armée en a fait partie. Le président semble s’être appuyé ensuite sur les manifestations pour décider d’annuler l’élection et avancer son programme de transition appuyé sur une prolongation du 4e mandat. Mais la rue ne l’a pas entendu. Et le général, désormais avisé, s’est progressivement rangé du côté du peuple. Il a pris ses distances avec le « parcours présidentiel » envisagé et a promis une solution qui jaillira au « moment propice ».

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