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Rougeole : quand une petite négligence sape les efforts de plusieurs décennies

Rougeole : quand une petite négligence sape les efforts de plusieurs décennies

Sans crier gare, la rougeole réapparaît comme pour nous rappeler cette indéniable vérité : une maladie ne part jamais réellement.

Elle peut refaire surface si les vecteurs de sa propagation sont de nouveau réunis où si les facteurs qui ont permis son éradication ne sont plus là.

Cette infection virale était donc juste tapie quelque part, attendant son heure et la moindre faille dans le système de santé mis en place laborieusement par l’Algérie volontariste postindépendance. Six décès pour 4000 cas enregistrés, c’est beaucoup pour une maladie qu’on croyait endiguée.

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Dans un passé lointain, les familles algériennes ne donnaient pas de prénom à leurs nouveaux nés avant qu’ils aient subi l’épreuve de la rougeole. C’est le professeur Mostefa Khiati, président de la Fondation de la promotion de la recherche médicale qui raconte l’anecdote pour rappeler que cette maladie est en fait endémique dans notre pays, c’est-à-dire qu’elle a toujours existé.

Durant la période coloniale donc, et même bien avant sans doute, tous les enfants étaient censés contracter la rougeole dans les premières années de leur vie. Et beaucoup n’y survivaient pas.

Les politiques de santé publique adoptées par les gouvernements algériens dès les premières années de l’indépendance finiront par porter leurs fruits. Pas seulement la rougeole, mais beaucoup d’autres maladies infantiles seront progressivement éradiquées, à la faveur d’une meilleure couverture sanitaire de tout le territoire, un accès pour tous à la gratuité des soins et à la sécurité sociale et surtout d’ambitieux programmes de vaccination notamment à l’école publique, elle aussi gratuite et obligatoire.

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S’ensuivra une baisse notable de la mortalité infantile et une meilleure espérance de vie pour l’ensemble de la population. Une politique tellement efficace que même dans les périodes difficiles traversées par le pays sur le plan économique ou de la stabilité sociale, aucune épidémie de grande ampleur n’a été enregistrée, en dehors de sporadiques grippes saisonnières.

Mais pourquoi donc le retour de la rougeole, maintenant que le pays se porte nettement mieux sur le plan de la couverture sanitaire ?

Dès les premiers cas signalés dans le sud du pays, on a eu droit à des explications, certaines farfelues, d’autres rationnelles. Les plus sérieuses rappellent qu’il y a eu, il y a quelques années, une rupture de stock du vaccin anti-rougeole et c’est peut-être là le point de départ de la tragédie.

S’ensuivra une tentative des autorités de rattraper le retard, sans trop de succès puisque la campagne sera quasiment boycottée suite au décès d’un élève. Les spécialistes signalent aussi une autre probable rupture, celle de la chaîne du froid, pour expliquer la propagation de la maladie en premier lieu dans les régions du sud du pays. Tout cela semble concorder et, n’en déplaise aux adeptes du buzz sur les réseaux sociaux, les lobbies du mal n’y sont pour rien.

Les autorités ont aussi failli sur le plan de la communication, laissant le soin aux réseaux sociaux de répandre les rumeurs les plus farfelues suite au décès d’un écolier, attribué à un vaccin avarié.

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La campagne de boycott qui s’ensuivra aurait pu être évitée si on avait adopté un langage de franchise, en expliquant aux parents qu’il n’existait pas de risque zéro en médecine et qu’aucun vaccin, ni aucun médicament d’ailleurs, n’est fiable à 100%.

Des insuffisances et des failles, il y en a eu et, maintenant qu’elles sont identifiées, aux autorités de tâcher de les combler et de faire en sorte qu’elles ne se reproduisent plus.

Les mêmes causes induisent nécessairement les mêmes effets, la moindre négligence nous vaudra inévitablement le réveil d’autres maladies endémiques, pas seulement la rougeole. Ce serait dommage pour un pays qui a tant investi dans les infrastructures sanitaires et les équipements, dans la formation du personnel médical, bref, un pays qui a fait le plus dur…

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