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Y a-t-il un malaise chez les Touaregs algériens ?

Y a-t-il un malaise chez les Touaregs algériens ?

Les dernières interventions et menaces de l’Amenokal de l’Ahaggar dans la presse suscitent de nombreuses interrogations et des réactions.

Fin février, Ahmed Idabir est sorti de son silence pour dénoncer ce qu’il qualifie de marginalisation des notables, sa mise à l’écart et la situation qui prévaut dans la wilaya de Tamanrasset.

« Les Touaregs ne se reconnaissent plus dans cette wilaya où les étrangers de l’Afrique noire ont plus de droits que les autochtones. Inadmissible ! », a lancé le chef des Touaregs à Tamanrasset dans une déclaration à Liberté. Il a également parlé de « notables importés » et « tiré à boulets rouges sur les autorités locales », selon la même source.

Un ultimatum qui expire ce dimanche

Le lendemain de cette intervention publique, Ahmed Idabir passe carrément aux menaces. « Si aucune suite ne nous est donnée d’ici à dimanche prochain (4 mars), Tamanrasset sera le théâtre d’une manifestation grandiose. Toutes les tribus targuies, jusque-là retenues d’investir la rue pour éviter d’en rajouter une couche aux soubresauts et spasmes de protestation qui secouent le pays, seront invitées à un grand rassemblement au chef-lieu de wilaya pour exprimer leur ras-le-bol et crier à tue-tête contre la hogra (l’avanie) », a prévenu l’Amenokel avant de menacer aussi de remettre sa « démission ».

Mercredi, Mohamed Akhamoukh, fils de l’ancien Amenokal et actuel sénateur a répondu à Ahmed Idabir. Les Touaregs « n’ont jamais subi et ne subissent aucune forme d’exclusion ou de marginalisation, et ne revendiquent nullement un statut. Les tribus vivent sur la terre de leurs ancêtres, jouissant de tous leurs droits et exercent leurs devoirs en toute liberté, à l’instar de tous leurs concitoyens dans le reste du pays. Ils jouissent de manière équitable des richesses de leur pays et des projets de développement initiés », a-t-il soutenu dans une déclaration à El Watan.

Dans ce contexte, la question est de savoir si les interventions de l’Amenokal traduisent réellement un malaise. « Il (Ahmed Idabir) pose un problème personnel et veut le transformer en un problème de wilaya ou de tribus », relativise Abbas Bouamama, sénateur et notable de la wilaya d’Illizi.

Pour lui, le timing de cet appel n’est pas anodin puisqu’il intervient à quelques mois du renouvellement des membres du Conseil de la nation et à une année de l’élection présidentielle. « Il y a un conflit familial entre lui et son neveu Mohamed Akhamokh (le fils de l’ancien Amenokal) autour du siège du Conseil de la nation », poursuit notre interlocuteur qui souhaite qu’il n’y ait pas de « surenchères » autour des Touaregs et des tribus.

« À qui va-t-il présenter sa démission ? »

Mais que représente finalement l’Amenokal aujourd’hui ? Dans ses déclarations, Ahmed Idabir affirme avoir été élu par 300 tribus targuies. « Sauf que dans tout le grand Sud, il n’y a pas 300 tribus targuies et arabes », affirme Abbas Bouamama.

En réalité, les Touaregs « ne croient plus à la politique de l’Amenokal », selon lui. « Les choses ont changé. Aujourd’hui, les tribus veulent voir leurs propres enfants dans les assemblées élues. Chez nous, les gens votent », assure notre interlocuteur qui se demande : « À qui va-t-il présenter sa démission ? Et quelles sont les tribus qu’il représente ? Le système de l’Amenokal est parti avec le colonisateur français. Maintenant, quand il y a un problème, ce sont les notables qui interviennent. Et Ahmed Idabir est un notable parmi d’autres », insiste-t-il.

« Des rapports loin de la réalité »

Selon lui, ni le Sud, ni les Touaregs ne sont « marginalisés ». « Si le projet de transfert d’eau d’In Salah à Tamanrasset sur 700 kilomètres, c’est de la marginalisation, je ne sais pas ce que c’est peut-être le développement », argumente Abbas Bouamama. Il ajoute : « Les Touaregs aussi ne sont pas marginalisés. Ils sont directeurs et cadres dans les institutions ».

Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de problèmes qui se posent actuellement au Sud et des manques comme ailleurs, selon lui. M. Bouamama cite notamment le trafic de documents qui a permis à des étrangers de devenir Algériens. « Un problème qui est en train d’être réglé puisque de nouvelles dispositions ont été prises par le ministre de la Justice », souligne-t-il.

Le sénateur évoque également la question relative aux migrants subsahariens. « C’est un problème que personne ne peut nier », affirme ce notable d’Illizi. Dernièrement, Amnesty International a accusé les autorités de « profilage ethnique » et « d’arrestations arbitraires ».

| LIRE AUSSIMigrants : Amnesty international accuse les autorités algériennes de recourir au « profilage ethnique »

« Ces organisations ne voient pas ce qui se passe sur le terrain, notamment au Sud. Leurs rapports sont loin de la réalité. Ces migrants subsahariens posent réellement des problèmes de trafic de monnaie, de trafic de drogue, de prostitution, de mendicité. Et ce n’est pas le fait de quelques personnes seulement. Ce sont des réseaux organisés », avance le sénateur. « Le problème aussi réside dans le fait que ces personnes n’ont aucun papier. Les contrôler devient extrêmement difficile », ajoute-t-il.

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