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13e vendredi : face à la « fuite en avant » du pouvoir, le mouvement populaire « s’inscrit dans la durée »

13e vendredi : face à la « fuite en avant » du pouvoir, le mouvement populaire « s’inscrit dans la durée »

Les Algériens vont-ils sortir en masse demain à l’occasion du 13e vendredi de mobilisation populaire ? Dans cet entretien croisé, Abdelouahab Fersaoui, président du RAJ et Said Salhi, vice-président de la Ligue algérienne des droits de l’Homme, apportent des réponses.

Après les démonstrations des étudiants et des avocats cette semaine, comment s’annonce le 13e vendredi ?

Abdelouahab Fersaoui, président de RAJ. Demain ce sera le 2e vendredi de mobilisation populaire depuis le début du Ramadhan, personnellement je m’attends à ce qu’il y aura le maximum de mobilisation comme on a l’habitude de le voir. Surtout après les deux grandes mobilisations des étudiants et des avocats de mardi dernier. Cela a été une démonstration de force pour dire qu’il n’y a pas lieu de revenir en arrière. Ces deux marches constituent un très bon indice sur le fait que le mouvement populaire pacifique n’est pas près de s’essouffler. Au contraire, le mouvement va se poursuivre avec la même cadence. Cette détermination est motivée par le refus du pouvoir en place, trois mois après le début du mouvement, de répondre à la revendication du peuple pour le changement du système. Le pouvoir s’accroche malheureusement à l’organisation des élections le 4 juillet, malgré le refus du peuple algérien et en dépit du rejet de ce scrutin par un nombre important d’élus au niveau national ainsi que des magistrats.

Les Algériens sont conscients que le mouvement s’inscrit dans la durée, conscients aussi de la nécessité de ne pas lâcher leur mouvement pacifique, seul garant face à ce système qui continue à faire la sourde oreille.

Saïd Salhi, vice-président LAADH. Je pense que le test a bien été réussi par le peuple, vendredi dernier, le premier du mois de Ramadhan. Les citoyens ont montré qu’ils sont mobilisés quelles que soient les conditions.

Pour ce qui est de l’évolution de la situation, nous disons qu’il n’en a rien été. Il n’y a eu rien de nouveau en rapport avec nos aspirations, nos attentes. Jusque-là, le système s’accroche à sa feuille de route et dont la rue réclame tout simplement l’abandon et notamment l’organisation de l’élection du 4 juillet. Nous considérons que ce scrutin est dangereux pour le pays. La balle reste dans le camp du pouvoir.

Comment expliquez-vous cet entêtement et ce refus du pouvoir d’écouter la rue ?

Abdelouahab Fersaoui. Une chose est sûre : le pouvoir n’est pas prêt à céder. Il prend le temps de préparer sa propre transition qui l’arrange, au-delà des élections du 4 juillet qui, selon moi, n’auront pas lieu. Raison pour laquelle le pouvoir prépare sa propre transition à même de garantir le maintien du système d’une manière ou d’une autre. Il y a un autre scénario, que nous ne souhaitons pas, et qui consiste aux yeux du pouvoir à épuiser toutes les ‘’solutions constitutionnelles’’ pour justifier l’application des articles relatifs à l’instauration de l’état d’urgence ou l’état de siège. Pour contrer cela, il n’y a pas de recette magique, il faut maintenir le mouvement d’une manière pacifique durant les vendredis et aussi les jours de semaine.

Saïd Salhi. C’est une fuite en avant. Du côté du système il n’y a aucune vision, il temporise et joue encore sur l’usure. Il joue sur les tentatives de division du Hirak. Je dirai que si le système maintient les élections pour le 4 juillet, cela revient à exacerber les tensions et à accentuer la crise.

Aujourd’hui, d’anciens hauts responsables ont été présentés devant le tribunal de Sidi M’hamed. Quel est votre commentaire ?

Said Salhi. Nous l’avons dit depuis le début. Nous sommes contre une justice sélective, nous sommes contre une justice qui, à la limite, va être utilisée comme instrument dans une guerre de clans. Il y a certes des figures qui sont impliquées et qui sont réclamées par la rue, mais en tant que défenseurs des droits de l’Homme, nous disons qu’il faut mettre la justice à l’abri et renforcer son indépendance d’autant que le Hirak a libéré les juges et les avocats. Il faut justement laisser la justice poursuivre cette lancée vers sa libération et son indépendance.

Est-ce que ce n’est une réponse du pouvoir à une revendication de la rue ?

Said Salhi. C’est une réponse destinée à dévier le Hirak de sa revendication première, à savoir le changement du système qui constitue aujourd’hui la priorité. La mise en place d’une justice indépendante ne peut avoir lieu que dans le cadre d’une nouvelle république, réellement démocratique et véritablement basée sur la séparation des pouvoirs.

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