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Appel à une marche contre l’antisémitisme : la France divisée

Appel à une marche contre l’antisémitisme : la France divisée

Une marche nationale est prévue dimanche prochain à Paris contre l’antisémitisme. Annoncée comme une occasion pour afficher l’union de tout le pays contre les actes antisémites dans un contexte de guerre au Moyen-Orient, la marche suscite de profondes divisions.

Le vocable est trop instrumentalisé en France pour servir de motif d’unité de la classe politique et de la société.

Officiellement, la marche est initiée par les présidents des deux chambres parlementaires pour dénoncer la montée des actes antisémites, plus de 1.000 en un mois, selon le chiffre que livrent tous les médias français.

Mais certains soupçonnent un autre objectif derrière cette manifestation : celui d’apporter un soutien à Israël après le succès des marchés pro-palestiniennes, et dans la foulée pour l’extrême-droite de stigmatiser encore les musulmans.

Ne pouvant pas appeler directement à une manifestation de solidarité avec Israël alors que son armée commet un massacre dans la bande de Gaza, cette marche contre l’antisémitisme peut bien être une manière d’apporter un soutien à l’État hébreu sans se compromettre, mais aussi de jauger, à l’aune de la participation, l’état d’esprit de la société française vis-à-vis de ce qui se passe en Palestine.

Jean-Luc Mélenchon a été le premier à dénoncer une manière détournée de soutenir Israël. Le chef de La France Insoumise (LFI) voit dans la marche de dimanche prochain un rendez-vous des amis du « soutien inconditionnel au massacre », « sous prétexte d’antisémitisme ».

« L’ambiguïté des objectifs de cette démarche permet les soutiens les plus insupportables », a indiqué pour sa part le LFI dans un communiqué, estimant qu’ « on ne lutte pas contre l’antisémitisme et le racisme dans la confusion ».

Le Parti d’extrême-gauche a donné une autre raison de ne pas participer à la manifestation : l’annonce de la participation du Rassemblement national.

L’ancienne présidente du parti d’extrême-droite, Marine Le Pen, a indiqué qu’elle prendra part à la marche et a appelé tous les partisans du parti à faire de même. D’autres personnages d’extrême-droite, comme Éric Zemmour
ou Marion Maréchal Le Pen ont aussi annoncé leur participation.

Antisémitisme en France : le lourd passif de l’extrême-droite

Hormis le parti Les Républicains (droite), l’annonce de la participation de ce courant politique met mal à l’aise le reste de la classe politique, y compris le gouvernement et le parti du président Emmanuel Macron.

Le secrétaire général de Renaissance, Stéphane Séjourné, a appelé les participants « à ne pas être les complices de la banalisation d’un parti fondé par des antisémites », en référence au Rassemblement national, anciennement Front national.

L’extrême-droite française est rattrapée par son passé au moment où elle s’y attendait le moins. Depuis le début de la guerre en Palestine, le RN et les autres se sont fait les champions du soutien inconditionnel à Israël et de l’ « antisémitisme ».

Jean-Luc Mélenchon et son parti ont été en revanche ostracisés et accusés d’antisémitisme pour avoir tenu à dénoncer également les crimes israéliens et appelé à un cessez-le-feu et à une solution à la question palestinienne.

Mais le passé du RN a fini par remonter à la surface. « À mon sens, le Rassemblement national n’a pas sa place dans cette manifestation », a tranché Olivier Véran, porte-parole du gouvernement.

Le Parti communiste a, lui aussi, annoncé qu’il ne marchera pas aux côtés d’un parti fondé par Jean-Marie Le Pen, « condamné plusieurs fois pour antisémitisme » et des « collaborateurs » du nazisme. Les socialistes, eux, y prendront part tout en reconnaissant que « l’extrême-droite n’a pas sa place dans cette marche ».

En tentant de défendre son parti contre les accusations d’antisémitisme, le très inexpérimenté président du RN, Jordan Bardella, l’a enfoncé en déclarant que Jean-Marie Le Pen n’était pas antisémite, soulevant un tollé dans le pays.

Consciente du poids du passé de son parti, Marine Le Pen a fait profil bas, disant accepter de marcher en queue du peloton puisque la présence du RN dérange.

Cette obsession en France pour l’antisémitisme contraste avec l’indifférence vis-à-vis de l’islamophobie qui monte également et qui se banalise jusque dans les grands médias.

Dans une lettre au président de l’autorité de régulation de l’audiovisuel, le recteur de la Grande mosquée de Paris, Chems-Eddine Hafiz, a dénoncé la « banalisation d’une parole essentialiste, stigmatisante, raciste et haineuse » à l’égard des musulmans.

Dans ce contexte, la marche de dimanche risque de sortir de son objectif en servant les partisans d’Israël et de l’extrême-droite qui sont en première ligne dans la stigmatisation des musulmans depuis le début de la guerre contre Gaza.

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