search-form-close
Cevital, Peugeot et Blumberg Grain : trois illustrations de la gestion chaotique des investissements

Cevital, Peugeot et Blumberg Grain : trois illustrations de la gestion chaotique des investissements

NEWPRESS

La volonté de Blumberg Grain, une entreprise spécialisée dans les céréales, d’investir en Algérie tourne mal. Malgré le soutien officiel des plus hautes autorités du pays, le projet de réalisation de silos de stockage modernes – avec 200 millions de dollars de réduction de pertes pour l’Algérie à la clef – n’a pas encore vu le jour après 13 mois de négociations.

Ce blocage incompréhensible n’est pourtant pas le premier. Trois cas symptomatiques révèlent une situation inquiétante : les tergiversations et l’opacité de la gestion des investissements en Algérie sont un facteur décourageant, démontrant que le blocage des investissements n’est pas une simple vue de l’esprit.

Un bâton tendu

En premier lieu, l’Algérie vient de s’exposer à une gigantesque déconvenue : la compagnie Blumberg Grain a présenté un projet de réalisation de silos ultramodernes de stockage des récoltes céréalières. Jusqu’à présent, le pays perd près de 200 millions de dollars chaque année en raison des conditions d’entreposage : silos à ciel ouvert, humidité, oiseaux, rats… Plusieurs facteurs font qu’une partie non-négligeable de ces denrées est gaspillée.

Le projet de l’entreprise américaine a enthousiasmé le premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui y a apporté son soutien, ainsi que le ministre de l’Industrie et des Mines Abdeslam Bouchouareb et même le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, selon le PDG de la compagnie.

Mais depuis 13 mois, les blocages bureaucratiques ont empêché la signature du contrat. Blumberg Grain se met alors à un lobbying intensif, impliquant des sénateurs ou membres de la chambre des représentants américains. Mieux, le président Donald Trump suivrait ce dossier de près, l’entreprise étant originaire de sa région. Cette affaire prend donc une tournure politique.

| LIRE AUSSI : « Trump suit la question de près » : un projet d’investissement américain en Algérie prend une tournure politique

Les blocages dont l’origine reste mystérieuse pourraient passablement détériorer les relations avec la première économie du monde. Le PDG de l’entreprise menace l’Algérie d’un procès, notamment parce qu’il soupçonne l’Algérie de violer sa propriété intellectuelle. En effet, Blumberg Grain a confié les plans d’ingénierie au gouvernement.

L’État pourrait se retrouver ainsi devant les tribunaux. Ou comment l’Algérie tend le bâton pour se faire battre… Dans tous les cas, c’est une catastrophe pour l’image du pays, au moment où le Forum des chefs d’entreprise (FCE) et les autorités mènent une campagne pour attirer les investisseurs américains.

Le coup de bâton

« Pas de sentiments en affaires ». Un dicton que l’Algérie ne semble pas avoir intégré. Le cas de l’installation industrielle de Peugeot le prouve. Le constructeur français est connu, en Algérie, pour avoir été un mauvais élève en matière fiscale. Certes.

Pour se conformer à la nouvelle législation, Peugeot a entrepris un projet d’usine de montage avec des partenaires algériens. Il bénéficie du soutien du gouvernement français et le gouvernement algérien a accueilli favorablement le projet.

Mais depuis maintenant plus d’un an, le projet est bloqué. Le gouvernement, par la voix de Bouchouareb, répète que l’Algérie a posé des exigences pour donner son feu vert, sans dire lesquelles. Le constructeur répond et affirme avoir rempli toutes les conditions imposées par l’Algérie, laissant entendre que le problème est « politique ». Sauf que le département de Bouchouareb se mure dans le silence

Une manière de mettre un coup de bâton à Peugeot pour son comportement ? Possible. Mais la méthode est contestable. Laisser un investisseur (quel qu’il soit) en suspens renvoie une image désastreuse d’une administration bureaucratique et d’un gouvernement qui impose une gestion politique (et anti-économique) de l’investissement dans le pays. À croire que l’Algérie croule sous les requêtes d’investissement, au point de pouvoir se permettre de filtrer les entrées de capitaux.

Le bâton dans les roues

Ce genre d’agissements ne se limite pourtant pas aux investisseurs étrangers. En effet, plusieurs acteurs nationaux sont confrontés à des situations similaires. Le cas de Cevital, le plus médiatisé, est à ce titre éloquent. L’exemple le plus récent est lié au refoulement, par l’entreprise portuaire de Béjaia (EPB), d’un navire transportant du matériel pour une usine de trituration de graines oléagineuses. Un produit que l’Algérie importe à 100%.

Le plus grand groupe privé national, dirigé par Issad Rebrab, dit avoir tous les agréments et les autorisations de l’Agence nationale du développement de l’investissement (Andi). Mais l’EPB a empêché le débarquement des machines, pour des raisons floues, exigeant une preuve de la destination finale de ces équipements. Une mesure qui semble largement outrepasser les prérogatives de l’entreprise portuaire.

Cet investissement de Cevital n’est pas le seul concerné. Issad Rebrab a dénoncé, à maintes reprises, les bâtons dans les roues de la part du gouvernement et de l’administration. Comme lot de consolation, Cevital peut au moins se « rassurer » en pensant qu’elle est loin d’être la seule entreprise confrontée à ce genre de situations.

  • Les derniers articles

close