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Entretien avec Nazim Zouiouèche, ancien PDG de Sonatrach

Entretien avec Nazim Zouiouèche, ancien PDG de Sonatrach

Le gouvernement a décidé d’aller vers l’exploitation du gaz de schiste après l’avoir abandonnée en 2015. Est-ce qu’il fait le bon choix ?

L’Algérie a effectivement des réserves et des capacités de production de gaz de schiste qui doivent être un jour exploitées. Mais présenter l’exploitation du gaz de schiste comme étant la formule qui peut résoudre immédiatement certains problèmes suscite quelques questions. La première étape consiste à faire des recherches et des études pour savoir exactement ce qu’on a comme potentiel et ce qu’on peut concrètement produire. Si on prend l’exemple des États-Unis, puisque c’est le seul, on voit qu’il y a une différence entre le potentiel et ce qu’ils sont capables de produire qui est de 10 à 15% seulement.

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Quelle est la deuxième étape ?

La deuxième étape est celle de la réalisation. En général, on cherche l’hydrocarbure dans des roches très peu poreuses et très peu perméables. On va forer des puits horizontaux pour avoir le maximum de contact avec la roche qui renferme l’hydrocarbure avant de fracturer. L’exemple américain nous a montré que les puits pour le gaz de schiste perdent pratiquement 70 à 75% de leur productivité. Cela veut dire qu’il faut forer le plus possible, le plus vite possible et fracturer le plus vite possible pour maintenir un plateau de production et essayer de maîtriser les coûts.

Combien de temps faudrait-il pour passer à la phase de production ?

Je pense qu’il faudrait dix à douze ans.

Outre le côté financier, l’exploitation du gaz de schiste suscite aussi des préoccupations d’ordre écologique et environnemental qui ont d’ailleurs été posées en 2015 par les habitants d’In Salah…

En 2015, l’exploitation du gaz de schiste a fait peur aux habitants d’In Salah parce qu’il n’y a pas eu de campagne d’explications. Je crois qu’on peut trouver des solutions à ce problème. Quand on fracture, il faut effectivement une quantité importante d’eau (de 15.000 à 20.000 M3). Les habitants d’In Salah avaient eu des craintes pour les nappes albiennes dans leur région. Les quantités de ces nappes sont limitées mais elles sont énormes (Près de 40.000 milliards de M3). Ce qui pourrait éventuellement poser problème est le fait qu’on prélève de l’eau au niveau des oasis. Le niveau de l’eau pourrait baisser et ne plus permettre son exploitation. Pour revenir à l’exemple américain et les problèmes (de pollution, NDLR) posés par l’exploitation du gaz de schiste, je vous rappelle que les États-Unis ont fracturé près des lieux habités. Ce n’est pas le cas de l’Algérie puisque cela se passera dans une zone relativement désertique.

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Ahmed Ouyahia a également estimé que la loi sur les hydrocarbures doit être révisée. Partagez-vous son avis ?

Le Premier ministre a raison. Notre loi sur les hydrocarbures n’est plus attractive. Nous avons lancé quatre appels d’offres. Nous avons des réponses insignifiantes. Les étrangers qui viennent investir en Algérie prennent des risques. Ils forent et s’ils ne trouvent rien, ils s’en vont après avoir perdu leur argent. Donc quand ils trouvent quelque chose, ils espèrent en tirer un profit correct. Les philanthropes ne viennent plus dans ce métier.

Que faut-il revoir en premier ?

La taxation des profits exceptionnels au-delà de 30 dollars. Ensuite, il faut apprendre aussi à traiter l’investisseur comme un partenaire et non comme un ennemi qui vient sucer le sang des Algériens.

Est-ce que l’Algérie n’a pas d’autres choix ?

Nous avons une solution plus rapide : le solaire. Cette énergie a deux avantages : les réserves sont infinies et son exploitation peut se faire beaucoup plus rapidement. Le solaire nous permettra de dégager les quantités de gaz qu’on utilise pour l’électricité, soit pour le marché national, soit pour le marché international. Il ne faut pas oublier que l’ère des hydrocarbures est en train de s’achever. On est en train de passer dans une autre dimension, celle des énergies renouvelables. Le gaz est le vecteur de transition.

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