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Hausse des prix et TPE boudés par les commerçants : les réponses de Boulenouar

Hausse des prix et TPE boudés par les commerçants : les réponses de Boulenouar

Dans cet entretien, le président de l’Association des commerçants et artisans algériens (ANCA), Hadj-Tahar Boulenouar, répond aux questions sur la hausse des prix des produits de consommation. Il explique pourquoi les commerçants boudent le paiement électronique.

Une hausse des prix des produits de consommation est enregistrée sur les marchés. Comment l’expliquez-vous ?

Tout d’abord, l’augmentation n’est pas générale et n’a pas touché tous les produits, surtout alimentaires. Concernant les légumes, en comparaison avec la même période l’année passée, les prix sont stables. On enregistre même une diminution.

Par exemple, dans la catégorie viande blanche, au cours de la période fin décembre-début janvier 2020, les prix du poulet n’avaient pas descendu en dessous de 320 DA le kilo. Cette année, les prix ont baissé.

Pas plus tard que ce matin, le kilogramme de poulet tourne autour de 260 DA. Pourtant, en ces périodes de fins d’années et de fête de Yennayer, la demande a tendance à augmenter sur ce produit. L’année passée, pendant les dix premiers jours de janvier, le prix du poulet avait même atteint 360 DA le kilo.

Pareil pour les produits agricoles de saison ?      

Il n’y a pas de grande différence par rapport à l’an dernier à la même période. En revanche, les pâtes ont connu une légère hausse avant même la fin de l’année 2020. Cette augmentation s’explique par la décision de suspendre la subvention de l’État pour les matières premières (céréales, farine, semoule) pour les industriels.

Même si cette mesure a été gelée, l’augmentation a quand même été maintenue. Dans ce cas de figure, les producteurs en assument la responsabilité. C’est à eux d’expliquer le pourquoi de cette augmentation.

D’autre part, on évoque une augmentation du prix du sucre destiné aux industriels – le prix du sucre destiné à la consommation reste plafonné à 90DA/kg-. Jusqu’à présent, il n’y a aucune annonce officielle ni du côté des industriels dans ce sens.

En supposant que le prix du sucre destiné aux industriels et transformateurs augmente, que les produits fabriqués à base de sucre vont certainement augmenter. C’est le cas des boissons, des confiseries, les confitures, les produits de pâtisserie, etc.

« Il est illusoire de croire que les prix peuvent chuter si la production est insuffisante »

En parlant de sucre, vous avez fait une proposition aux industriels pour éviter qu’il ne répercute la hausse éventuelle du sucre sur leurs produits finaux. Quelle est leur réponse ?

Nous avons suggéré aux transformateurs que, dans le cas où les prix augmentent effectivement, de réduire la quantité de sucre dans leurs produits sans en augmenter les prix.

À ce propos, les Algériens sont parmi les plus gros consommateurs de sucre dans le monde. On est largement au-dessus de la moyenne mondiale. La consommation normale d’un individu varie entre 20 et 25 kilogrammes annuellement, alors que nous Algériens nous en consommons entre 40 et 43 kilos par an.

Annuellement, nous importons 2 millions de tonnes de sucre et des matières premières (sucre roux, canne à sucre, sucre de canne…) pour une facture de 900 millions à 1 milliard de dollars. La facture a même atteint, il y a deux ou trois ans, 1,2 milliard de dollars. Par cette suggestion, nous comptons participer à la campagne de réduction des quantités de sucre, de sel et de matières grasses dans les produits alimentaires.

Les légumes connaissent aussi des variations. Est-ce par manque de production ?

Je dois dire tout d’abord que pour les produits non subventionnés c’est la loi du marché qui en détermine les prix à travers la règle de l’offre et de la demande. À mesure que la production augmente, les prix tendent à diminuer.

À l’exemple de la pomme de terre qui est devenue un repère en matière de prix, lorsque la production est en diminution, les prix augmentent, jusqu’à 80 DA le kilo en moyenne, et lorsqu’elle est disponible en quantités les prix peuvent chuter jusqu’à 40 DA/kg.

La seule façon de faire baisser les prix c’est de produire en quantité. Il est illusoire de croire que les prix peuvent chuter si la production est insuffisante.

Comment expliquez-vous les prix chers des agrumes pourtant de saison ?

Les agriculteurs expliquent que la production de cette année des agrumes est en baisse par rapport à celle de l’année passée, du fait que la saison de la pluie avait connu du retard.

La plupart des agriculteurs ne disposent pas de puits ; il y a d’autres cas où des cultures sont à quelques encablures d’un barrage rempli d’eau mais celle-ci n’arrive pas aux champs faute de conduite, etc.

« Il y a trop d’impôts et de taxes »

La généralisation des terminaux de paiement électronique (TPE) devait être effective dès cette année, elle vient d’être reportée pour la fin de 2021. L’association des consommateurs Apoce explique l’échec de l’opération par un refus de transparence de la part des commerçants. Qu’est-ce que vous répondez ?

C’est totalement faux. Si le commerçant refusait la transparence, il ne se serait pas inscrit au registre de commerce.

Il aurait pris le chemin de l’informel comme ces centaines de vendeurs dans la rue. La raison en est qu’il y a une forte pression en matière d’impôts.

Les commerçants boudent le paiement électronique de peur d’être imposés encore plus. Nous sommes parmi les pays où les impôts sont les plus élevés.

À cela il faut ajouter la concurrence déloyale des commerçants informels qui, eux, ne paient rien. En plus, ils s’accaparent la clientèle parce qu’ils vendent moins cher. Il y a trop d’impôts et de taxes. Si les gens fuient les impôts, c’est parce qu’ils sont très élevés. C’est cette hausse des impôts qui fait que les commerçants se méfient.

Par ailleurs, il est important d’agir sur les mentalités des clients qui ne sont pas préparés au paiement électronique et préfèrent utiliser le cash. Dans ce cas, le commerçant ne jugera pas nécessaire de se doter d’un terminal de paiement électronique s’il ne sert à rien.

Enfin, la révolution numérique dans les pays qui nous ont devancés ne s’est pas faite par des décisions administratives. Et puis, le commerçant est le dernier maillon de la chaîne.

Quand vous avez une administration qui n’a pas basculé dans l’informatisation, quand le système financier et bancaire n’est pas informatisé, comment allez-vous l’imposer au simple commerçant ?

Commençons d’abord par le système financier, bancaire et administratif ! Nous espérons que ce sera fait durant l’année 2021 et souhaitons que ce ne soit pas encore reporté pour une autre année.

 

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