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« Lemma », nouvel album de Souad Asla avec onze chanteuses de Béchar (vidéo)

« Lemma », nouvel album de Souad Asla avec onze chanteuses de Béchar (vidéo)

« Lemma » est le nouvel album de la chanteuse algérienne Souad Asla. Il sortira la semaine prochaine à la faveur de deux concerts prévus à la salle Ibn Zeydoun à Alger les 3 et 4 février 2018. Il s’agit de l’aboutissement d’un spectacle vivant, lancé en 2015, avec des voix féminines de la région de la Saoura.

Un spectacle original. L’album contient seize chansons puisées dans les styles et les expressions musicales et poétiques du sud-ouest algérien comme Ferda (genre de chant de Kenadsa), Djebbariat (les ensembles féminins traditionnelles de Béchar), Zefani, El Hadra (expression chantée proche des Aissaoua), le Diwan (gnawi), El Melhoun et El Haydous. Chants et danses, le Haydous existe aussi au Maroc.

« Dans l’album, tous les styles ne sont pas représentés. Et, le spectacle Lemma n’est pas encore terminé, pas assez peaufiné à mes yeux. Nous tournons depuis deux ans, mon premier but a été toujours la production de cet l’album. J’aurais voulu faire un coffret complet puisque nous avons collecté au moins cinquante morceaux prêts à être enregistrés. Nous avons enregistré au studio vingt six morceaux dont seize sont portés dans le nouvel album. Il était important pour moi de faire cet album surtout que ces chansons n’ont jamais été enregistrées auparavant. C’est une manière de les répertorier pour qu’elles ne se perdent pas », a déclaré, ce mercredi 31 janvier, Souad Asla, lors d’une conférence de presse à la salle Frantz Fanon, au complexe Riad El Feth, à Alger.

Onze chanteuses ont participé à l’album enregistré fin décembre 2016 entre Alger et Taghit. « J’ai sollicité des chanteuses que je connaissais depuis mon enfance comme El Hadja Zaza, Hasna El Becharia, Zahoua et Mabrouka. Elles sont presque de la famille. J’ai grandi avec elles. Après la casting, nous avons fait quatre ou cinq résidences avec des tours de chants à Taghit où nous avons trié ensemble les styles musicaux. Nous avons enregistré pendant dix jours avec un rythme de huit heures de studios. Les trois premiers jours étaient difficiles parce qu’il fallait familiariser les femmes au studio, aux micros et au son. Il fallait les mettre à l’aise. Par exemple, au lieu de se mettre debout, nous nous sommes assises par terre. Nous avons crée l’ambiance de maison. Il y avait beaucoup d’émotion et de fatigue. Je tiens à remercier ces femmes, de vraies battantes », a déclaré Souad Asla.

La Hadra de Taghit

Elle a confié porter ce rêve de rassembler des morceaux du patrimoine culturel populaire de Béchar depuis plusieurs années. « L’idée m’est venue après mes multiples voyages à Béchar et notamment à Taghit où tous les vendredi les femmes faisaient de la hadra. À chaque voyage, je constatais que le groupe diminuait. Les jeunes filles n’assistaient pas à la cérémonie. Quand j’ai posé la question, on m’a répondu que les filles n’aimaient pas ce genre de musique. J’ai eu comme une alerte car si toutes les chanteuses disparaissaient, le patrimoine risquait également d’être effacé à tout jamais. C’est là que j’ai décidé de monter un spectacle avec ces femmes. Elles ont refusé car la cérémonie se faisait en intimité. J’ai rencontré ensuite Rabéa Boughazi qui dirige une association pour la sauvegarde du patrimoine à Béchar. Je lui ai parlé de mon projet. Elle a décidé de m’appuyer. À partir de là, j’ai commencé mon casting. Il n’y a que des instruments traditionnels et percussions. J’ai fait quelques arrangements mais je n’ai pas voulu trop toucher aux chansons et les garder à l’état brut », a-t-elle détaillé.

Un concert à Béchar ?

« Je souhaite faire une tournée au niveau national pour faire découvrir aux Algériens une partie de leur patrimoine musical. Nous avons une tournée en mars prochain en France avec un concert au Festival des Tours de Babel et des concerts à Toulouse, à Grenoble et à Paris », a déclaré Souad Asla. Qu’en est-il d’un concert à Béchar? « Je ne pense qu’on puisse organiser un concert à Béchar. Les femmes y sont conservatrices. Elles ne veulent paraître devant leurs familles. Avec le temps, les choses vont changer », a déclaré Rabéa Boughazi, présente à la conférence de presse.

Souad Asla garde l’espoir de chanter sur scène à Béchar avec les autres chanteuses. « J’avoue qu’il était difficile de réunir les femmes puisqu’il fallait convaincre les maris et les frères pour qu’elles puissent m’accompagner et voyager. Je me suis portée garante pour les jeunes filles. Il y a un peu de réticence à Béchar. Cela fait presque dix sept ans que je suis dans la musique. J’ai mis beaucoup de temps à venir chanter en Algérie. Je craignais la réaction de ma famille. Il m’a fallu du temps pour pouvoir m’imposer. Nous allons essayer de nous libérés toutes ensemble. Cela va se faire petit à petit. Il ne faut pas forcer les choses. Et nous ferons un beau spectacle à Béchar. Les gens m’envoient des messages pour nous soutenir », a-t-elle confié. Souad Asla a fait écouter l’album à ses cousines et ses sœurs. « Dès les premières notes, elles ont commencé à pleurer, à raconter des histoires et ce qu’évoquaient pour elles ces chansons. Des chansons populaires très connues. J’ai gardé les paroles avec de petits arrangements musicaux », a-t-elle souligné.

Une pochette en Pop’art

La pochette de l’album a été conçue par Moustache qui a choisi de puisé dans le Pop’art à la Andy Warhol. « Je voulais donner un côté flashy et attractif. Comme c’est une musique traditionnelle, on s’attend en général à une pochette avec des couleurs terre. J’ai mis quelques codes visuels comme le tapis et les motifs africains », a-t-il précisé. « Je ne voulais un album avec la photo du désert ou celle d’un chameau », a appuyé Souad Asla.

Elle a déclaré avoir eu beaucoup de difficultés pour la production de l’album faute de financement. « Nous avons tapé à quelques portes qui sont restées fermées », a-t-elle regretté. Elle a lancé un appel pour que la protection du patrimoine immatériel (chants, poésie, musiques et danses) de Béchar soit prises en charge par les pouvoirs publics. Elle a souhaité que ce patrimoine soit enregistré dans des coffrets. Quatre chansons de l’album « Lemma » seront mis en clip avec une réalisation de Badi Sahraoui.

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