L’Algérie veut réduire les transferts de devises pour sauvegarder ses réserves de change. Parmi les mesures proposées dans l’avant-projet de Loi de finances 2021 figure le paiement à terme de certaines importations. Une mesure critiquée par le think-tank algérien Care.
Le Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (Care) réagit aux dispositions contenues dans l’avant-projet de Loi de finances 2021 et met en garde contre les conséquences néfastes que pourrait induire le paiement « à terme » des importations.
Le think-tank algérien demande aux pouvoirs publics de « reconsidérer ce projet de mesure, pour autant que le texte de cet avant-projet de Loi des finances viendrait à être confirmé ».
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L’article 112 du PLF dispose qu’ « en dehors des opérations d’importation portant sur les produits stratégiques, les produits alimentaires de large consommation, les produits ayant le caractère d’urgence pour l’économie nationale, les produits importés par les institutions ou administrations de l’État et ceux importés par les entreprises publiques économiques, le paiement des opérations d’importation s’effectue au moyen d’un instrument de paiement dit « à terme » payable à trente jours à compter de la date d’expédition des marchandise ».
« Ne répétons pas les erreurs du passé », met en garde dans un communiqué le Care, qui rappelle : « Notre pays avait déjà eu à adopter la même mesure en 1994. Des entreprises avaient alors été contraintes d’importer leurs intrants à crédit (notamment avec l’emprunt « Beregovoy ») alors qu’elles souhaitaient payer leurs achats en devises sans recours à un quelconque crédit. On leur a fait subir, contre leur volonté, un risque de change. Lorsqu’advient la dévaluation, elles se sont retrouvées avec des dettes quasiment doublées. Beaucoup de nos entreprises productrices de l’époque n’y ont pas survécu. D’autres sont restées avec des bilans plombés de dettes gonflées d’agios et intérêts de retards qu’elles subissent encore, 26 années plus tard ».
« Si la réelle motivation est de différer le paiement des importations et ainsi obtenir un financement de la balance des paiements de quelques milliards de dollars (un mois d’importations), ce n’est pas la meilleure méthode. Cet emprunt extérieur qui ne dit pas son nom coûterait beaucoup plus cher qu’un simple emprunt extérieur souverain », poursuit le Cercle qui estime que « l’objectif annoncé dans l’exposé des motifs ne peut être sérieusement poursuivi ».
Il signale « que les lois et règlements en vigueur à ce jour ne donnent nulle part de définition précise de cette notion de produit stratégique ou de produit ayant un caractère d’urgence pour l’économie nationale », ce qui pourrait ouvrir la voie à des « passe-droits » et au « favoritisme ».
Le Care dénonce aussi « la discrimination clairement affichée en direction d’entreprises de statut public, que la législation nationale prohibe par ailleurs » et tient à attirer l’attention des autorités compétentes sur un aspect considéré comme « complexe ».
« Dans la pratique, et pour les produits qui seront considérés in fine comme stratégiques ou de large consommation, l’exemption du recours au crédit s’appliquera-t-elle uniquement aux produits finis importés ou s’étendra-t-elle aux intrants qui entrent dans leur fabrication locale ? Si les intrants en question venaient à être exclus, ce serait alors une forme d’avantage préférentiel conféré à l’importation d’un produit fini, par rapport au même produit fabriqué localement », analyse le cercle de réflexion.