L’attaque menée à l’aube ce samedi 7 octobre par le Hamas palestinien contre le territoire israélien est la plus retentissante et la plus spectaculaire jamais menée contre Israël en 75 ans d’existence, en dehors des guerres épisodiques israélo-arabe.
Même lors de la guerre du Kippour en 1973, où l’armée israélienne a été sérieusement malmenée, il n’y a pas eu d’inclusion des armées arabes dans la profondeur du territoire israélien.
Jusque-là, les actions de la résistance palestinienne se limitaient à des tirs de roquettes sur les colonies de la bande frontalière, des attaques au couteau ou des attentats-suicides.
Ce samedi, aux premières heures de la journée, les combattants des brigades Ezzedine Al Qassam, la branche armée du mouvement Hamas, ont pris d’assaut le territoire israélien comme le ferait une armée régulière, par les airs, la mer et au sol.
L’attaque est baptisée « Déluge d’Al Aqsa« , en référence à la mosquée d’Al Qods, troisième lieu saint de l’Islam, qui fait l’objet ces dernières semaines de violations et profanations des colons israéliens, protégés par la police.
L’attaque surprise des combattants palestiniens est unique à tout point de vue. Elle a d’abord pris de court l’armée israélienne par son modus operandi. C’est la première fois que le Hamas combine une attaque à la fois terrestre, maritime et aérienne en utilisant des ULM légers pour contourner le dispositif de défense israélien. Les brigades Ezzedine Al Qassam ont annoncé avoir lancé 5.000 roquettes en direction du sud et du centre d’Israël.
بأقل الإمكانيات.. « الطائرات الشراعية » تحدث فرقاً استراتيجياً للمقاتلين الفلسطينيين وتحقق عنصر المفاجأة في مواجهة الجيش الإسرائيلي#العربية pic.twitter.com/yyBSaM0QQh
— العربية (@AlArabiya) October 7, 2023
Arrivés par dizaines depuis le territoire sous blocus de Gaza, les combattants ont littéralement libéré de vastes territoires, occupant des sites militaires et des colonies, tuant et capturant des dizaines de soldats.
Les images qui tournent en boucle sur les médias du monde entier sont inédites. On y voit des combattants palestiniens se pavaner en maîtres dans les colonies, des milliers de colons qui prennent la fuite dans une panique générale, des voitures et des immeubles en feu, des corps gisant à même le sol.
"Les Occidentaux approuvent sans hésitation la « résistance » des Ukrainiens face aux Russes, ils dénient aux Palestiniens qui subissent le joug colonial le droit de résister. Ce n’est plus du « double standard », c’est un racisme crasseux. https://t.co/nXLMSWg8sw
— akram belkaïd🇵🇸🍉 (@akrambelkaid) October 7, 2023
Palestine – Israël : il y aura un avant et un après 7 octobre
Mais les images les plus saisissantes sont sans doute celles des soldats israéliens sortis de leurs chars par les vainqueurs ou plaqués contre terre, dénudés. Le bilan est lui aussi jamais vu. Plus de 100 morts et de 1000 blessés et au moins 53 soldats kidnappés et emmenés à Gaza par les combattants palestiniens.
L’opération se poursuit toujours. En fin d’après-midi, l’armée israélienne a fait état de 22 « lieux de combat » et de situations de prise d’otages toujours en cours dans le sud.
Pour Israël, c’est un énorme affront. Le pays voit se briser le mythe de l’invincibilité de son armée et des critiques ciblent déjà les services de sécurité qui n’ont rien vu venir. Il s’agit d’une « faillite majeure" des services de renseignement israéliens, estime David Khalfa, de l’Observatoire de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient de la Fondation Jean-Jaurès (France) dans un entretien à France 24.
Certains n’hésitent pas à comparer ce qui s’est passé aux attaques du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. « Il n’est pas exagéré de dire qu’Israël a vécu son 11 Septembre. En 35 ans de suivi du conflit, je ne me souviens pas d’un tel bilan (…) Des images sidérantes. Réoccuper Gaza ne réglera rien », a écrit sur X le journaliste français Georges Malbrunot.
Il n'est pas exagéré de dire qu'Israel a vécu son 11 Septembre. En 35 ans de suivi du conflit, je ne me souviens pas d'un tel bilan: des dizaines de morts, des infiltrations de dizaines d'hommes en armes des dizaines d'otages. Des images sidérantes. Reoccuper Gaza ne réglera rien
— Georges Malbrunot (@Malbrunot) October 7, 2023
On ne sait pas si Israël a l’intention de réoccuper la bande de Gaza, qu’il a évacuée en 2005, mais le pays se dit d’ores et déjà en guerre. Des attaques aériennes sont menées contre les positions du Hamas depuis la matinée, faisant des centaines de morts.
Le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a promis de faire payer au mouvement palestinien un prix « qu’il n’a jamais vu ».
L’attaque de ce samedi risque en tout cas de faire bouger les lignes dans la région et d’influer peut-être sur le processus de normalisation en cours entre Israël et certains pays arabes.
Le prince héritier d’Arabie Saoudite Mohamed Ben Salmane a annoncé récemment que son pays se rapprochait d’un accord avec Israël. Quelle sera la posture du royaume et des six pays qui ont acté leur normalisation avec Israël après cette attaque, de surcroît qu’une guerre totale contre le Hamas, avec son lot d’exactions, est plus que probable ?
https://twitter.com/RTarabic/status/1710702801880224161?s=20
L’attaque de ce 7 octobre pourrait en effet changer plein de choses dans la géostratégie régionale et rien que pour cela, la comparaison avec le 11 septembre n’est pas tout à fait exagérée.
L’attaque a aussi confirmé ce que le monde ne savait que trop bien du parti pris de l’Occident en faveur d’Israël. L’opération du Hamas est unanimement et fermement condamnée, de l’Europe en Amérique, comme « une attaque terroriste ».
كتائب القسام تنشر مشاهد لاقتحام موقع إيرز العسكري شمال قطاع #غزة، وقتل وأسر من فيه من الجنود الإسرائيليين pic.twitter.com/kPEYkBTc6u
— TRT عربي (@TRTArabi) October 7, 2023
Au lieu de mettre en garde contre l’escalade, les dirigeants occidentaux se sont curieusement donné le mot pour souligner dans leurs déclarations qu’Israël « a le droit de se défendre », avant même le début des attaques israéliennes contre Gaza. Ces mêmes dirigeants n’ont pas soufflé mot lorsque l’armée israélienne tuait les Palestiniens par dizaines à Jénine, en Cisjordanie.
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