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Programme télé pendant le ramadan : de petites étincelles et beaucoup de ratées

Programme télé pendant le ramadan : de petites étincelles et beaucoup de ratées

Plus de dix jours après le début du Ramadan, les programmes de télévision continuent d’alimenter les discussions et les débats dans les médias et sur les réseaux sociaux. Cette année, le débat est plus intense et les critiques plus nombreuses et plus visibles. Etat des lieux.

Les caméras cachées, Cheba Dalila et les autres

Devenues incontournables en période de ramadan depuis quelques années, les caméras cachées (cette année : « Tefret fik » (Dzair TV), « Dar teksar » (Echourouk TV) et « Redou Balkoum » (El Bilad TV)) sont les plus exposées à la critique. Jouant sur la violence et de la jalousie, les trois caméras cachées reproduisent le « déjà vu » et visent « le buzz ». « Redou Balkoum » serait même un copier-coller d’une caméra cachée diffusée par la chaîne marocaine Medi 1 TV sous le titre « Rod balek », il y a quelques années.

La chanteuse de Rai Cheba Dalila, apparue le Ramadan 2017 dans la caméra cachée « Studio teksar » d’Ennahar TV, est revenue cette année dans au moins deux autres caméras cachées. « Une bonne cliente », selon le langage de l’audiovisuel. Jetant ses chaussures sur les animateurs qui la provoquent, Cheba Dalila a attiré les « vues » sur les réseaux sociaux. C’est ce qui semble intéresser le plus les concepteurs des caméras cachées.

Islam Aris, qui a reproduit le concept du « Teksar » (la casse) à Echourouk TV après l’avoir testé à Ennahar TV en 2017, a expliqué l’invitation de Cheba Dalila, Warda Charlomanti ou Benchenet junior par le fait qu’ils sont suivis par « des millions de fans » et parce que « la plupart des jeunes » écoutent le Rai.

Un joueur de football, invité de « Tefret fik », a menacé devant la caméra d’assassiner l’animateur. Dans « Rodou balkoum », une femme a giflé son mari et menacé une prétendue rivale de la « mettre dans une bouteille » ! Dans le même registre de l’agressivité, « Oss Darek ya M’Barek », diffusée par Ennahar TV, est une caméra cachée qui montre une équipe venant menacer des victimes de détruire leurs maisons. Vous pouvez imaginer le choc. Est-ce réellement de « la matière » pour faire rire ?

Le journaliste Kada Benamar d’Echourouk TV, qui anime chaque soir l’émission « Ramadan Show » consacrée aux programmes télés, a ironisé en disant que « le Cabaret » est entré dans nos maisons à l’heure du ftour par la porte des caméras cachées.

Où est donc passée l’ARAV ?

Face à ses dérives constatées depuis le début du Ramadan, l’Autorité de régulation de l’audiovisuelle (ARAV) garde curieusement le silence. N’a-t-elle pas toutes les prérogatives nécessaires d’agir concrètement sur le terrain et de rappeler à l’ordre les chaînes privées ? Le statut toujours imprécis de ces chaînes, algériennes sans l’être, limite-t-il son action ? Jusqu’à quand cette situation de « zone grise » va-t-elle durer ?

Des questions sans réponse pour l’instant. Djamel Kaouane, ministre de la Communication, a dénoncé, la semaine écoulée, « la violence » de certaines émissions de télévision et a parlé de « manque de créativité ». Il n’a pas désigné de chaînes.

La question de la violence et de l’humiliation des invités a été largement évoquée, le Ramadan 2017, avec l’affaire Rachid Boudjedra, mais rien ne semble avoir été fait pour éviter la reproduction des mêmes actes cette année.

« Bougroune » suscite la controverse

Sans aucun contenu intellectuel, artistique ou, même médiatique, les caméras cachées de cette année, à l’image de celles du Ramadan 2017, sont à passer à la trappe. Elles témoignent d’une course effrénée et aveugle au «buzz » de la plupart des chaînes sans respect de l’éthique et des règles de diffusion à l’heure d’une grande audience.

«Bougroune » (celui qui a des cornes), la série qui met la chanteuse et comédienne Rym Ghezali à l’épreuve de la réalisation et de l’écriture du scénario, suscite la controverse. D’abord parce qu’un tapage a été fait avant sa diffusion par Ennahar TV qui devait la diffuser avant de se raviser en changeant d’avis à la dernière minute pour raisons budgétaires.

Ensuite par la série elle-même qui raconte l’histoire d’une reine qui a vécu 30.000 ans avant notre ère et qui voyage dans le temps. Une série qui donne l’impression de rivaliser avec « Achour El Acher » de Djaffer Kacem, de loin la plus suivie durant les deux précédents Ramadan et aurait même causé des ennuis à Echourouk TV en raison de son humour politique incisif.

Echourouk TV, qui n’a pas pu terminer le tournage de la série « Rais Corso », dans laquelle Salah Aougrout, qui a campé le personnage du roi Achour El Acher, joue le rôle principal, a acquis à la dernière minute les droits de diffusion de « Bougroune ». Cette série, qui puise dans le registre du fantastique, se détache par la qualité des décors, des costumes et des effets spéciaux (VFX) mais souffre d’une faiblesse du scénario et des dialogues.

Rym Ghezali, apparue à la télévision notamment dans le sit com « Nass M’lah city », a refait le montage de « Bougroune » à la demande du diffuseur pour allonger le format. Elle a été critiquée, entre autres, pour les noms drôles donnés aux personnages : « bouzoulouf », « loubia », « douara », « Tak Taw », « M’kibes », etc… « C’est de l’art et l’imagination n’a pas de limites dans l’art. L’histoire se déroule, il y a 30.000 ans. Vous pouvez donc tout imaginer durant cette période. Dans les croyances africaines, le bélier, c’était l’animal protecteur. Si j’avais choisi de film « Alice au pays des merveilles », on m’aurait reproché de faire parler un gros lapin ! », nous a-t-elle expliqué au téléphone.

Rym Ghezali a réussi à placer « Bougroune » dans la grille de MBC qui le diffuse sur son canal 4. La chaîne saoudienne s’est toujours montrée hermétique aux travaux télévisuels algériens prétextant un problème de « dialecte », incompréhensible au Moyen-Orient. « Et bien, « Bougroune » est diffusé sur MBC en dialecte algérien. Pour la première fois. J’en suis fière », souligne Ryam Ghezali.

El Khawa confirme pour la deuxième saison

La chaîne MBC et d’autres chaines arabes négocient avec El Djazairia One et les producteurs pour l’acquisition des droits d’El Khawa, selon Mohamed Salah Daas, directeur général de la chaîne. Invité du TSA Direct, il a indiqué qu’El Khawa est le programme de télévision le plus vu durant ce Ramadan 2018.

Réalisé par le tunisien Madih Bélaïd, « El Khawa » continue la saga des Mostefaoui sur fond d’intrigues, de complots de famille, de trafic de drogue, de coups de couteau dans le dos et de luttes de gangs. Les producteurs Imad Henouda (Algérie) et Aymen Djouadi (Tunisie) ont réuni « une brochette » de stars aux côtés de comédiennes débutantes comme Zahra Harkat et Manel Djaffar et de comédiens confirmés comme Nadia Talbi, Khaled Benaissa, Abdelkader Djeriou, Souhila Mâalem, Lydia Laarni, Idir Benaibouche ou Fizia Tougourti.

Sollicitée, Carmen Lebbos est la première comédienne libanaise à participer à un drama algérien. Les franco-algériens Djamel Barek, Slimane Dazi et Lyes Salem sont également distribués dans El Khawa 2 dont le casting joue beaucoup sur les têtes d’affiches. C’est ce qu’explique la présence des Raimen Kader Japonais et Cheb Nasro dans la chanson du générique.

Mais est-ce suffisant pour assurer la réussite ? Sara Bertima, qui a écrit le scénario, a tenté de sauvegarder, plus au moins, la ligne dramatique avec la précédente saison, même si l’histoire paraît boiteuse avec peu de rebondissements et des dialogues rachitiques. Ce qui semble presque sûr est qu’il n’y aura pas de saison 3 pour El Khawa qui, cette année, a bénéficié du soutien de cinq sponsors. Ce qui est déjà une prouesse.

L’ENTV revient aux devants de la scène

Cette année, l’ENTV, avec ses deux canaux A 3 et Canal Algérie, a gagné certaines positions dans la bataille audiovisuelle du Ramadan, contrairement aux saisons précédentes, grâce à une sélection plutôt bien étudiée. Il y a d’abord le sit com « Messy » de Mohamed Nazim Kaïdi dont la force vient du choix des comédiens, la plupart venant du théâtre comme Seifdine Bouha, Mohamed Seghir Boudaoud, Hanane Bekar, Souad Sebki, Adila Soualem, Houria Bahloul et Sabrina Boukeria, mais aussi de la thématique et de la réalisation aérienne. L’histoire se déroule dans les cuisines d’un traiteur où Messy, la fille venue de la campagne, sème la bonne humeur et provoque la jalousie.

Autre sit-com en vue, « Bab Dechra » de Walid Bouchebah d’après un scénario de Lamia Kahli et Sid Ali Bouchafaa. Cette satire sociale marque le retour de Beyouna au petit écran. Au fil des épisodes, l’histoire, faite de dialogues légers et de situations burlesques, évolue sans évoluer dans un huis clos ouvert. Un choix artistique qui permet à Walid Bouchebah, assisté de Driss Benchernine, deux hommes du théâtre, d’ironiser sur le vécu actuel des algériens avec une certaine finesse.

L’ENTV est entrée aussi dans la bataille du drama avec « Nar el barda » (feu froid) de Farid Benmoussa d’après un scénario de Bouchra Malek avec Aida Guechoud, Khaled Benaissa et Nesrine Serghini. Ce feuilleton social évoque la question de la démission parentale et les dégâts qu’elle peut provoquer ainsi que les amours trahies.

L’équipe de Jornane El Gosto se redéploye

Jornane El Gosto était l’un des programmes les plus suivis les Ramadans précédents. Il n’est plus diffusé. L’équipe qui a fait son succès s’est redéployée dans d’autres sitcoms, séries et émissions.

Mohamd Khassani est présent notamment dans « El Khawa » dans un rôle tragique et dans « Ana wiyak », aux côtés de Nassim Hadouche et Kamal Abdat, deux autres comédiens sortis de Jornane El Gosto. Diffusé par Dzair TV, « Ana Wiyak » (moi et toi) rencontre un certain succès en raison de sa teneur comique.

Nabil Asli, le Bahlito de Jornane El Gosto, est lui aussi présent dans un duo avec Nassim Hadouche, « Dekious et Mekious », diffusé par Echourouk TV. Dekious et Mekious sont deux vieillards à la langue fourchue et qui ont le mot sur tout ce qui les entourent et qui n’hésitent pas à mentir pour glorifier leur passé. La réalisation artistique de ce sit-com est assurée par Abdelkader Djeriou, le même qui a assuré la conception artistique de Jornane El Gosto. Comédien, Abdelkader Djeriou est également distribué dans le feuilleton El Khawa2.

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