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Rencontre entre un routier et un dromadaire assoiffé dans le sud algérien

Rencontre entre un routier et un dromadaire assoiffé dans le sud algérien

Dialogue dans la cabine d’un camion arrêté au bord de la route quelque part dans le sud de l’Algérie.

On entend « meskine » (le pauvre). « Arrwah » (vient) lance le chauffeur du camion en direction d’un dromadaire.

La scène se déroule dans le grand sud algérien. Elle a été vue et partagée des milliers de fois. Le chauffeur exhibe par la fenêtre du camion un bidon d’eau. De la cabine, il verse un peu d’eau pour encourager l’animal à s’approcher,

Rencontre de l’homme et du dromadaire

Mais l’animal hésite et reste de l’autre côté de la route. Le chauffeur ouvre alors la portière et descend avec le bidon d’eau à la main pendant que la personne qui l’accompagne film la scène.

L’animal qui hésitait jusqu’alors fait plusieurs pas en direction du chauffeur. C’est un jeune dromadaire, son pelage est encore clair.

Le chauffeur tient à bout de bras le bidon plein d’eau et le lève à hauteur de l’animal. Comme s’il s’agissait d’un biberon, le dromadaire boit directement au goulot. Pas une goutte d’eau ne se perd.

Dans la chaleur, imperturbable, le chauffeur maintient à bout de bras le bidon d’eau qui se vide rapidement.

Encore quelques gouttes. Un seul bras suffit au chauffeur maintenant pour soulever le bidon. Puis, plus d’eau. L’homme jette le bidon au sol et s’en retourne vers le camion.

Le jeune animal ne bouge pas, la tête tournée vers le camion. Un peu comme pour dire qu’il a encore soif.

Dans ce décor minéral loin de tout, la scène se poursuit. L’image tremble un peu et bouge. À nouveau, le chauffeur près de l’animal avec un bidon d’eau. Est ce la vidéo qui tourne en boucle ?

Un bidon puis un deuxième


Non. La prise de vue est plus rapprochée. Le chauffeur est allé chercher un deuxième bidon d’eau et cette fois ci, la personne qui l’accompagne est descendue du camion.

L’homme est face au dromadaire, à nouveau, il tend le plus haut possible qu’il peut le récipient rempli d’eau. L’animal tend le cou. Il boit et boit encore. De plus près, on aperçoit la belle couleur du pelage de l’animal. À travers sa peau, on devine ses côtes.

À nouveau, l’animal absorbe l’eau sans perdre la moindre goutte du précieux liquide. Le bidon se vide rapidement. L’homme est presque sur la pointe des pieds.

La tête du jeune animal est à deux mètres de haut. Dernières gouttes. À nouveau, un seul bras pour relever le plus haut possible le bidon d’eau que cette fois ci le chauffeur ramène avec lui.

Il retourne vers la cabine du camion. On s’aperçoit que c’est un camion frigorifique.

Désarroi de l’homme et du dromadaire

Comment ce dromadaire s’est-il retrouvé perdu de la sorte ? Certainement égaré après s’être éloigné de ses congénères.

Dans le grand sud algérien, nombreux sont ces troupeaux de dromadaires qui errent entre de maigres pâturages.

Ils ne sont pas abandonnés, en témoignent le marquage sur leur peau. Le plus souvent, ils appartiennent à des propriétaires habitant la ville et qui pratiquent l’élevage selon la technique dite du « h’mil ».

Des propriétaires qui laissent leurs troupeaux pâturer au printemps autour de points d’eau et qui les récupèrent à la saison sèche. Manifestement, celui-ci se sera perdu.

Ce type d’élevage présente l’inconvénient de risques de divagation des animaux le long des routes avec d’éventuels accidents.

Plus grave, la maigre végétation désertique est la proie des animaux affamés. Une végétation, qui seule peut retenir le sable et dont le rôle est indispensable.

On peut se demander qui ressent le plus de désarroi. Le chauffeur avec le confort et la sécurité de son camion au réservoir rempli de carburant ou le dromadaire assoiffé ?

Par son geste l’homme témoigne du caractère désertique du sud, de la difficulté de survivre dans cet univers minéral chauffé à blanc.

Une survie difficile autant pour les animaux que pour les humains. C’est ce qui aura, inconsciemment ou non, interpellé chacun d’entre nous qui regardons cette scène.

Sur le ruban d’asphalte un autre camion apparaît au loin. Il est temps de poursuivre la route.

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