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Smaïl Goumeziane, un réformateur convaincu, tire sa révérence

Smaïl Goumeziane, un réformateur convaincu, tire sa révérence

Smaïl Goumeziane, décédé mardi à 75 ans, est de ces ministres qui n’ont pas eu besoin de faire de vieux os au gouvernement pour laisser leur empreinte et un souvenir indélébile auprès de l’opinion.

C’est en homme de conviction qu’il intègre le gouvernement réformateur de Mouloud Hamrouche comme ministre du Commerce en 1989, poste qu’il ne gardera pas longtemps puisqu’il partira en 1991, avec tout le gouvernement.

Avant cet unique passage comme ministre, il avait occupé plusieurs hauts postes de responsabilité aux ministères des industries lourdes et légères et dirigé deux entreprises publiques.

Intellectuel plutôt engagé qu’organique, le jeune cadre a rejoint le gouvernement dans un moment crucial de l’histoire du pays, marqué par une ouverture démocratique véritable et une volonté de passer d’une économie dirigée vers un système libéral.

En social-démocrate, il a toujours plaidé pour une transition en douce, un libéralisme humain et une ouverture qui ne soit pas au détriment des couches les plus faibles, des choix qu’il continuera à défendre dans ses nombreuses réflexions, que ce soit dans ses livres ou ses contributions dans des médias étrangers.

On l’a toujours dit proche du fondateur du FFS, Hocine Aït Ahmed. Ce parti est d’ailleurs l’un des premiers à lui rendre hommage à l’annonce de son décès.

« Homme d’une grande compétence, d’une culture prodigieuse, et d’une riche production intellectuelle, il n’a jamais hésité à montrer sa disponibilité pour accompagner le travail de réflexion, d’analyse, et de proposition économique et politique. Nous perdons en lui, un homme d’une grande gentillesse, et un fidèle ami du FFS », écrit le premier secrétaire du FFS, Youcef Aouchiche.

Dans la période d’ouverture et de réformes où Goumeziane dirigeait le département du Commerce, Abderrahmane Hadj-Nacer était gouverneur de la Banque d’Algérie.

« Un exemple de patriotisme »

Il le décrit comme « un honnête homme, exemple de patriotisme et de l’apport que peuvent apporter les émigrés, que certains traitent de harkis, au pays ». « Smaïl Goumeziane a prouvé qu’un émigré pouvait revenir au pays, gérer un grand ministère, faire du bon, sans prendre un centime », ajoute Hadj-Nacer.

En 1992, la parenthèse démocratique se ferme brutalement et tout le projet de réformes politiques et économiques avec. La situation sécuritaire se dégrade progressivement et, Smaïl Goumeziane retourne en France où il a émigré avec ses parents à l’âge de 5 ans.

Dans un entretien au quotidien El Watan publié le 7 février 2005, Goumeziane sur son départ du gouvernement : « On est, en principe, rarement ministre à vie. Ce qui était important, en ce soir du 4 juin 1991, c’était le sort réservé aux réformes démocratiques. On sait ce qu’il en est advenu. Je n’ai pas tout de suite songé à partir à l’étranger. Jusqu’à décembre 1991, je me suis engagé comme candidat dans le processus des législatives. Suite à son interruption en janvier 1992, j’ai jugé plus utile de me consacrer à des travaux de recherche universitaire sur l’évolution de l’économie algérienne depuis 1962 ».

En France, ses compétences et ses diplômes (il est docteur en économie), lui permettent de se faire une place à l’université Paris Dauphine où il enseignera pendant de longues années l’économie du développement et les relations internationales.

Il se consacre aussi à l’écriture et publiera plusieurs ouvrages dont L’Algérie et le nouveau siècle, Ibn Khaldoun, un génie maghrébin, La tiers mondialisation,  Fils de Novembre, Le pouvoir des rentiers, Le mal algérien. 

Il publiera également régulièrement des contributions dans la presse, restant toujours fidèle à ses convictions et collé à l’actualité de son pays et celle de la communauté algérienne en France.

Son dernier livre, « L’Islam n’est pas coupable », est inspiré par l’actualité brûlante en France et se veut comme une réponse à ceux qui tentent de semer l’amalgame entre la religion musulmane et l’islamisme politique. Avec son décès, l’Algérie perd une compétence avérée et un homme de conviction.

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