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La Turquie prend la tête de l’islam de France

La Turquie prend la tête de l’islam de France

Le 1er juillet, c’est le représentant de l’islam turc, Ahmet Ogras, qui succédera à Anouar Kbibech à la tête du Conseil français du culte musulman (CFCM) pour un mandat de deux ans. Il en était déjà le vice-président.

Depuis la création du CFCM en 2003, l’institution avait toujours été présidée par des représentants de l’islam algérien (via la Mosquée de Paris avec Dalil Boubakeur) ou marocain (Rassemblement des musulmans de France avec Anouar Kbibech). Mais le système électoral de l’institution, fortement contesté, a conduit fin 2012, à la mise en place d’une direction collégiale et d’une présidence tournante.

Alors que l’UOIF a refusé d’y siéger, l’alternance des trois principales fédérations (Mosquée de Paris, RMF et CCMTF) conduit donc aujourd’hui Ahmet Ogras, président du Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF) depuis 2012, à prendre la direction du Conseil français du culte musulman.

Officiellement, le CCMTF, créé en 2001, représente l’ensemble de l’islam turc de France (il gère la plupart des lieux de culte) et non uniquement la voix d’Ankara. « Un faux nez », analyse pour TSA, Bernard Godard, un ancien des renseignements généraux, spécialiste de l’islam en France. Il est en réalité une émanation de l’Union turco-islamique des affaires théologiques (la DITIB), une structure de la direction des affaires religieuses turques (le Diyanet). Bref, une organisation qui émane directement de l’État turc. À l’étranger, cette structure dispose d’attachés aux affaires religieuses qui officient dans chaque ambassade et consulat pour coordonner, notamment, l’envoi d’imams.

Bien que plus discrète, la DITIB a aussi une fonction politique. Au moment du référendum en Turquie au mois d’avril (qui visait à renforcer les pouvoirs du Président), le bureau des affaires religieuses aurait ouvertement donné des directives aux imams du pays pour inciter les fidèles à voter « oui ».

Si l’ancien président du CCMTF Haydar Demiriyuret était un agent administratif de la DITIB, Ahmet Ogras lui « ne connaît rien aux réseaux associatifs » et n’a aucune expérience dans le domaine religieux, précise le spécialiste Bernard Godard.

Patron d’une agence de voyages spécialiste de la Turquie, Ahmet Ogras, 46 ans, est l’ancien président de la branche française de l’UETD (Union des démocrates turcs européens), dont il a également participé à la formation en 2005. Cette structure n’est autre que la vitrine européenne de l’AKP, le parti du président turc Erdogan. Elle a notamment été à l’initiative de grandes réunions électorales pro-Erdogan en Allemagne et en France avant le référendum. Ahmet Ogras, dont l’un des membres de sa belle-famille est conseiller d’Erdogan, ne cache pas sa proximité avec le Président turc.

La création du CFCM avait vocation à ce que le culte musulman se dote d’un organe de représentation français. Il a finalement conduit à un renforcement de l’emprise des États d’origine. En l’occurence du Maroc, de l’Algérie et de la Turquie.

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