Les deux principaux mouvements Palestiniens, le Hamas et le Fatah, se rencontrent ce jeudi 29 février à Moscou à l’initiative de la Russie.
La particularité de cette énième tentative de réunification est qu’elle porte sur un objectif concret et survient en pleine guerre que mène Israël contre Gaza depuis le 7 octobre dernier.
Sous l’égide d’une grande puissance, membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, la rencontre pourrait constituer un tournant dans la guerre en cours dans l’enclave palestinienne.
L’objet de la rencontre de ce jeudi est la constitution d’un gouvernement d’union nationale qui se chargera de la reconstruction de la bande de Gaza, presque entièrement détruite par l’agression israélienne qui dure depuis près de cinq mois.
La Palestine est divisée de fait en deux entités dirigées par deux gouvernements distincts depuis 2007, l’Autorité palestinienne dominée par le Fatah en Cisjordanie et le gouvernement du Hamas dans la bande de Gaza.
La dernière initiative de réunification des factions palestiniennes a lieu à Alger, à l’initiative du président Abdelmadjid Tebboune, en octobre 2022. Quatorze factions, parmi lesquelles le Hamas, avaient signé la « Déclaration d’Alger » par laquelle elles s’étaient engagées sur un certain nombre de principes, dont celui de l’unité nationale comme base de résistance pour la libération de la Palestine, et accepté un calendrier électoral.
Le déclenchement de la guerre à Gaza suite à l’attaque spectaculaire du 7 octobre dernier menée par les brigades Ezzedine Al Qassam, la branche armée du Hamas, a fait naître une nouvelle réalité dans les territoires palestiniens.
La Russie qui, contrairement aux pays occidentaux, a su garder de bons rapports avec les deux principaux mouvements palestiniens, a annoncé le 16 février par la voix de son vice-ministre des Affaires étrangères, Mikhaïl Bogdanov, qu’elle a adressé une invitation à l’ensemble des factions palestiniennes sans exception, y compris le Djihad Islamique qui mène la résistance à Gaza aux côtés de la branche armée du Hamas.
Réunion de Moscou entre les factions palestiniennes : la balle dans le camp du Hamas ?
Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a indiqué le 18 février qu’il accueillait favorablement l’initiative russe, posant comme préalables l’engagement à respecter le principe d’une seule autorité, d’une législation unifiée et la « lutte populaire pacifique » comme unique voie de résistance.
Le lendemain, le 19 février, une délégation du Hamas s’est rendue à Moscou pour la deuxième fois depuis le début de la guerre après la visite du 26 octobre dernier.
Dans la foulée, le gouvernement palestinien de Mohammed Shtayyeh, en poste à Ramallah depuis le printemps 2019, a remis sa démission lundi 26 février au président Abbas qui l’a acceptée. La décision est en lien avec la rencontre prévue à Moscou de laquelle devrait être issu un nouvel exécutif de technocrates.
Shtayyeh a expliqué que de nouvelles mesures sont nécessaires pour tenir compte de la nouvelle réalité dans la bande de Gaza et réaliser un « consensus interpalestinien » pour aller vers la création d’un État palestinien ayant autorité sur tous les territoires.
La solution à deux États fait quasiment l’unanimité de la communauté internationale, y compris des États-Unis, et seul le gouvernement de Tel-Aviv continue à la rejeter. Les Palestiniens doivent désormais parler d’une même voix et présenter un interlocuteur comme premier pas afin d’aider la communauté internationale à mettre en œuvre la solution à deux États.
L’initiative de Moscou risque de fâcher le gouvernement israélien, avec l’invitation adressée au Hamas et au Djihad Islamique, et de mettre une pression supplémentaire sur le président américain Joe Biden dont la réélection en novembre prochain est, estiment les observateurs, tributaire en partie de ce qu’il fera dans le dossier palestinien.
Depuis le début de la guerre, Biden plaide pour la solution à deux États tout en maintenant un soutien inconditionnel au gouvernement Netanyahu qui refuse catégoriquement une telle solution.
La diplomatie russe est, elle, plus cohérente. Elle peut frapper un grand coup en ne laissant plus d’arguments aux pays occidentaux qui tergiversent pour imposer un cessez-le-feu et mettre en branle la solution à deux États.
Mais comme l’ont expliqué des dirigeants de l’Autorité palestinienne, la balle est d’abord dans le camp du Hamas qui, même s’il a accepté l’invitation de Moscou, n’a rien laissé filtrer de ses intentions.