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Métiers en voie de disparition : visages d’Alger

Métiers en voie de disparition : visages d’Alger

TSA

Rémouleur, bricoleur, artisan en bois…ces petits métiers sont de plus en plus rares. La relève est quasi inexistante pour ces métiers qui requièrent un certain savoir-faire mais ne rapportent que des clopinettes. Toutefois, entre tendre la main ou gagner sa croûte honnêtement, le choix est vite fait par ces personnages rencontrés au détour des rues de la capitale.

Rémouleur 

Leur nombre se compte désormais sur les doigts d’une seule main. Le métier de rémouleur ne rapporte pas des fortunes. Pourtant, certains s’y accrochent comme à une bouée de sauvetage. C’est le cas de Mohamed. À 67 ans, à 8h tous les matins, il installe sa charrette à proximité du marché de Bab El Oued. Ici  les riverains sont habitués à sa présence.

©TSA

«  J’ai commencé à travailler comme rémouleur depuis 1984. J’affûte les couteaux et tous les ustensiles coupants et tranchants. Ma clientèle est éclectique : coiffeurs,  bouchers, ménagères,  chirurgiens, bijoutiers, tailleurs, couturières me rapportent leurs ustensiles à aiguiser. Couteaux, cisailles, haches, poignards, tondeuses, ciseaux retrouvent une seconde jeunesse après passage sur ma machine », s’enorgueillit Mohamed. « Les prix démarrent à 50 da » ajoute- t- il.

Son meilleur chiffre d’affaire de l’année, le rémouleur de Bab El Oued le réalise quelques jours avant l’Aïd El Adha. «  Je fais alors des heures supplémentaires afin de satisfaire toute ma clientèle. Couteaux et haches ont besoin d’être aiguisés avant le rituel du sacrifice du mouton », nous révèle-t-il. Vers 13 heures, après six heures passées à la verticale,  Mohamed remballe son matériel. Sa petite charrette reprend alors le chemin de la maison pour n’en ressortir que le lendemain matin.

Vendeur de couffin en alpha

Si vous passez par l’avenue Pasteur, vous ne pouvez pas le manquer. Tous les jours, Ammi Mohamed installe ses couffins en alpha sur le trottoir.  Il vend aussi des chapeaux de paille, des tapis, des corbeilles et des éventails fabriqués avec de l’alpha, de manière artisanale. À 89 ans Ammi Mohamed n’y voit presque plus.

« Ma vue a tellement baissé ces dernières années que je n’arrive plus à confectionner mes couffins moi-même comme je le faisais autrefois. Alors je les achète chez un artisan à Dellys où j’habite. Je préfère vendre des couffins que de tendre la main ».

Engoncé dans son bleu de travail, Ammi Mohamed  reconnaît être dans une grande précarité. «  Quand quelqu’un m’achète un panier ou un chapeau de paille, je suis heureux. Je ne peux rentrer voir ma famille à Dellys que de temps à autre. Je passe mes nuits dans un hammam de la Casbah et retrouve ce trottoir dès le matin pour y vendre mes couffins ».

Les couffins en alpha de cet octogénaire coûtent entre 700 et 1000 da.

Artisan en bois

Leur nombre se réduit comme peau de chagrin. Dans son atelier de la Casbah, Ziri Boualem perpétue un art ancestral qui se réduit comme peau de chagrin, par les temps qui courent. Il fabrique des bougeoirs à branches et des ustensiles de la vie quotidienne : shop, assiette, bonbonnière en bois. «  J’utilise du hêtre, une matière noble. Ma spécialité c’est les bougeoirs à branches que je décline dans un florilège de modèles et que je décore de motifs floraux et d’arabesques », confie-t-il.

Exposées sur une étagère, ces pièces finement ciselées trouvent surtout preneur chez les touristes de passage. «  C’est un travail de création qui nécessite beaucoup de temps. Chaque pièce est exclusive. Sans la passion qui m’anime pour ce métier, j’aurais raccroché depuis longtemps ».

Bougeoirs en bois : à partir de 5000 da

Bricoleur-réparateur

Les anciens le connaissent tous. Certes, il a joué les nomades à maintes reprises en changeant d’emplacement à l’intérieur du marché Ferhat Boussaad  (Meissonnier), depuis le milieu des années 80, mais il n’a jamais changé de vocation. Chechia couleur crème vissée sur la tête, yeux cerclés par des lunettes, Maamar Azzedine (72 ans) est occupé à remettre en marche une montre rapportée ce matin même par une cliente. Fer à souder entre les mains, le vieil homme s’applique dans son travail.

©TSA

Assis sur un tabouret, dans son minuscule local vitré du marché, il soude, répare, rénove tout ce qui tombe entre ses mains. «  Horloges, articles d’électroménager, transistors, télécommandes…je redonne vie à toutes ces épaves. Au lieu de les jeter et d’en racheter d’autres, les clients les remettent en route moyennant une petite somme d’argent. Les bricoleurs et autres horlogers sont en voie de disparition. Vous pouvez parcourir tout Alger, depuis Bab El Oued jusqu’ici, vous n’en trouverez pas. Aussi mes clients viennent des quatre coins de la capitale. Je suis fier de me rendre utile. À 13 heures, j’emporte les objets à restaurer  à la maison. Cela m’occupe l’après-midi. Vous savez ce que l’on dit : « Le travail c’est la santé ! ». Je viens de me faire opérer de la cataracte. Tant que mes yeux seront solides, je continuerai à endosser le costume de bricoleur».

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